Après un premier titre en 2001, Fabrice Humbert fait réellement son entrée en littérature avec « Biographie d’un inconnu » sept ans plus tard. Mais c’est réellement avec le titre suivant « L’origine de la violence » qu’il se fait connaitre du grand public. Primé à plusieurs reprises, le roman est adapté au cinéma par Elie Chouraqui. Depuis, Fabrice Humbert n’a cessé d’écrire et son œuvre, d’une forte exigence littéraire ne cesse d’interroger sur la société et ses évolutions.« La fortune de...
Le monde n'existe pas de Fabrice Humbert - Présentation - Suite
Philippe Chauveau
Bonjour Fabrice Humert.
Fabrice Humbert
Bonjour Philippe.
Philippe Chauveau
Un nouveau titre chez Gallimard, Le monde n'existe pas. Votre aventure a commencé en 2008. Votre aventure en tant qu'écrivain, c'est bien ça ?
Fabrice Humbert
Oui. En 2008, lorsque j'ai rencontré les éditeurs du Passage. Après une carrière d'auteur, c'est d'abord de l'écriture. J'écris depuis l'âge de 20 ans. Mais c'est vrai que la concrétisation institutionnelle, si je puis dire, c'est à partir de 2008.
Philippe Chauveau
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Le monde n'existe pas de Fabrice Humbert - Portrait - Suite
Philippe Chauveau
Avec ce nouveau titre, Fabrice Humbert, Le monde n'existe pas, nous allons faire connaissance avec Adam. Adam et journaliste, a-t-il réussi sa vie ? L'histoire nous le dira. En tout cas, il est à New-York et il découvre sur les écrans de Times Square un visage qu'il connaît bien, un ami d'enfance, un ami d'adolescence. Le roman s'ouvre comme cela. Qui est-il cet Adam ? Comment est-il né dans votre imagination ?
Fabrice Humbert
Un jour, à ma table de travail, j'ai écrit un chapitre qui mettait en scène Adam,...
Le monde n'existe pas de Fabrice Humbert - Livre - Suite
Fabrice Humbert
Le monde n'existe pas
Présentation 00'02'37"Après un premier titre en 2001, Fabrice Humbert fait réellement son entrée en littérature avec « Biographie d’un inconnu » sept ans plus tard. Mais c’est réellement avec le titre suivant « L’origine de la violence » qu’il se fait connaitre du grand public. Primé à plusieurs reprises, le roman est adapté au cinéma par Elie Chouraqui. Depuis, Fabrice Humbert n’a cessé d’écrire et son œuvre, d’une forte exigence littéraire ne cesse d’interroger sur la société et ses évolutions.
« La fortune de Sila », « Eden Utopie », « Comment vivre en héros », autant de titres qui font de Fabrice Humbert une valeur sûre du monde littéraire actuel.
Voici Adam Vollmann. Il est journaliste au New Yorker et un jour, sur les écrans géants de Times Square apparait le visage d’un ami d’adolescence, Ethan Shaw, recherché par la police pour avoir violé et assassiné une adolescente. Pour Adam, il est impossible qu’Ethan ait pu commettre un tel acte. Dès lors, rejoignant la petite ville de son enfance, Adam va mener l’enquête. Mais bien vite, la réalité se délite, les certitudes s’effondrent, les personnages tombent les masques. Et si finalement, tout n’était qu’illusion.
Démarrant comme un thriller, le nouveau roman de Fabrice Humbert interroge sur le lien étroit entre la réalité et le récit, sur la manipulation des faits, sur l’omniprésence des réseaux sociaux dans nos vies, sur ces fake news, ces fameuses fausses nouvelles qui peuvent détruire une existence. Au cœur d’une Amérique profonde, bien loin des buildings et des avenues des grandes métropoles, Fabrice Humbert entraine le lecteur dans une histoire où tout n’est que faux-semblant, où même les souvenirs d’enfance s’évaporent laissant le personnage central de ce roman dans la plus complète solitude. S’appuyant sur de nombreuses références littéraires et cinématographiques, le roman est aussi une réflexion sur l’écriture et le pouvoir des mots et sur le mensonge dans lequel chacun peut se complaire pour fuir une réalité.
Reste une question, dans ce monde qui n’existe pas, où tout n’est qu’apparence, comment rester soi-même et à qui se fier ?
« Il arrive un moment dans une existence, où l’on comprend qu’on est que soi-même, mais qu’il y a peut-être une force suffisante dans ce seul moi, dans ce petit moi pétri de doutes, de failles et d’insuffisances. Et c’est à soi qu’il faut poser les questions ».
« Le monde n’existe pas » de Fabrice Humbert est publié chez Gallimard.
Fabrice Humbert
Le monde n'existe pas
Portrait 00'07'13"Philippe Chauveau Bonjour Fabrice Humert.
Fabrice Humbert Bonjour Philippe.
Philippe Chauveau Un nouveau titre chez Gallimard, Le monde n'existe pas. Votre aventure a commencé en 2008. Votre aventure en tant qu'écrivain, c'est bien ça ?
Fabrice Humbert Oui. En 2008, lorsque j'ai rencontré les éditeurs du Passage. Après une carrière d'auteur, c'est d'abord de l'écriture. J'écris depuis l'âge de 20 ans. Mais c'est vrai que la concrétisation institutionnelle, si je puis dire, c'est à partir de 2008.
Philippe Chauveau Tout commence avec Biographie d'un inconnu. Lorsque vous regardez le chemin parcouru, même si les années ne sont pas si nombreuses. Mais vous avez quand même fait votre petit bonhomme de chemin dans le monde de l'édition. Quelles images gardez vous ? Quels sont les moments forts qui reviennent? Vous êtes passé chez plusieurs éditeurs. Vous avez reçu des prix. Vous avez un titre qui a été adapté au cinéma. Quels sont les moments forts de ce parcours ?
Fabrice Humbert Le moment fort de ce parcours, c'est la publication de L'origine de la violence, puisque avant, j'étais vraiment un auteur ignoré. Et tout d'un coup, j'ai connu ce qui arrive, en fait très rarement. Je m'en suis rendu compte plus tard dans le monde de l'édition, c'est vraiment le grand succès. Et ça correspondait à un livre que j'avais porté pendant quatre ans, qui disait beaucoup de choses et de ma famille et de moi, et donc je dirais que ça a été un événement fondateur, qu'en plus j'ai beaucoup aimé ensuite le travail pour monter le film, le travail avec Elie Chouraqui, qui est une personnalité énorme. Ça a été un grand moment de cette carrière.
Philippe Chauveau Huit titres à votre actif en quelques années. Quel est le point commun ? Le dénominateur commun de tous ces titres. Il y a des personnages très différents, des intrigues très différentes, des lieux très différents dans ce que vous avez raconté au fil de ces différents romans ? Mais il y a sans doute un fil rouge.
Fabrice Humbert Forcément, il y a des points communs, mais autant sur certains livres, il y a eu clairement un cadre, notamment pour trois d'entre eux. Il y a eu cette espèce de fil rouge de la violence, d'une étude de la violence. Autant pour les autres, pas forcément. Alors je lisais dans un article de Libération la semaine dernière que j'ai trouvé très bon de Claire Devarrieux, que le fil rouge était celui de l'identité. C'était une espèce de quête identitaire, un trouble identitaire qui s'exprimait dans chacun des livres. Moi, je n'en ai pas forcément conscience. Mais en lisant ça, j'ai été assez persuadé. Parce que c'est vrai que clairement, L'origine de la violence, Eden Utopie, Le monde n'existe pas, celui-ci. Il y a quand même cette quête identitaire qui est très marquée. Donc, je pense que c'est toujours un peu ça. Alors, même si pour moi, j'ai une espèce de réflexion sur la vie, ce truc qui nous arrive, qui a tendance à s'accélérer, qui parfois manque de sens. Mais en gros, malgré Camus, malgré l'existentialiste, je trouve quand même que ça en a. Et je dirais que, comme pour tout écrivain, c'est un peu comme pour tout artiste, c'est un peu la source de la création chez moi.
Philippe Chauveau Au-delà des destins individuels que vous nous racontez dans vos romans, c'est toujours aussi une peinture de la société, avec ce qu'elle a généralement de plus sombre. C'est le cas encore avec Le monde n'existe pas. Est-ce que par l'écriture, vous essayez de conjurer une réalité qui ne vous convient pas ? Un monde qui vous fait peur?
Fabrice Humbert Alors oui, j'ai dit récemment dans une émission de radio, pour reprendre un titre de James Bond, le monde ne suffit pas. C'est sûr que si j'écris des livres, c'est parce que le monde ne suffit pas. Mais en même temps, cette analyse sociale sombre dont vous parlez, je pense qu'elle n'est pas tout le temps sombre. C'est à dire que ce qui vous fait dire ça, c'est qu'effectivement, lorsque vous lisez L'origine de la violence, lorsque vous lisez avant la chute, vous n'avez pas l'impression que le monde qui nous entoure est hyper gai. Mais je dirais que c'est quand même plus, et notamment dans les derniers livres, une sorte de tentative de compréhension du monde comme il est sans que ce soit forcément une tragédie. C'est-à-dire que...
Philippe Chauveau Sans juger alors...
Fabrice Humbert Oui sans juger. Voilà, il y a toujours une espèce de fatalisme assez étrange dans cette marche du monde. Et donc, souvent, je le décris sans que ce soit une peinture sombre, à mon sens.
Philippe Chauveau Lorsque vous êtes à votre table de travail, lorsque vous relisez peut-être aussi vos manuscrits ou vos livres précédents, vous reconnaissez-vous ? Y-a-t'il deux Fabrice Humbert en vous ? Ou bien finalement, êtes-vous un seul et même personnage ?
Fabrice Humbert Je ne me relis jamais parce que pour chacun des livres, j'ai beaucoup travaillé et sur le moment, je suis intensément à l'intérieur et lorsque c'est fini, je ne peux pas relire parce que ça m'ennuie. Par exemple, ce qui est bizarre, c'est que je n'ai même pas lu de traduction de mes livres alors que, par exemple, j'ai un niveau suffisant d'anglais et d'allemand pour lire des traductions. Mais je n'ai même jamais regardé.
Philippe Chauveau Mais avez-vous l'impression que c'est le même Fabrice Humbert qui a écrit tous ces livres ? Ou est ce qu'un jour, il y a personne différent ?
Fabrice Humbert Oui, c'est clairement le même Fabrice Humbert qui a écrit tous ces livres. Mais, j'ai quand même changé, notamment la thématique cruciale de la violence dans L'origine de la violence, celle-là, elle est beaucoup plus distanciée. Voilà, je suis comme vous, Philippe, je prends de l'âge.
Philippe Chauveau C'est gentil de me le rappeler. La petite flamme de l'écriture, en revanche, elle est toujours bien là ?
Fabrice Humbert Nous, vous vous êtes inchangé.
Philippe Chauveau La petite flamme de l'écriture est-elle toujours aussi présente qu'en 2008 ?
Fabrice Humbert La petite flamme de l'écriture, oui, mais ça, c'est ma vie. Peut-être que ce qu'il y a de plus qu'en 2008, c'est la littérature. J'ai toujours été un obsédé de lecture, mais maintenant, je voudrais arrêter de travailler pour me consacrer à l'étude. Pas forcément à l'écriture. Bon l'écriture de toute façon, c'est le courant de mon travail, de ma vie, etc. Mais me consacrer pleinement à l'étude de la littérature, des savoirs en général, mais aussi de la littérature, ça m'irait très bien maintenant. La chambre close, je me mets à étudier jusqu'à ma mort. Très bien.
Philippe Chauveau Votre actualité, Fabrice Humbert chez Gallimard, le monde n'existe pas.
Fabrice Humbert
Le monde n'existe pas
Livre 00'06'50"Philippe Chauveau Avec ce nouveau titre, Fabrice Humbert, Le monde n'existe pas, nous allons faire connaissance avec Adam. Adam et journaliste, a-t-il réussi sa vie ? L'histoire nous le dira. En tout cas, il est à New-York et il découvre sur les écrans de Times Square un visage qu'il connaît bien, un ami d'enfance, un ami d'adolescence. Le roman s'ouvre comme cela. Qui est-il cet Adam ? Comment est-il né dans votre imagination ?
Fabrice Humbert Un jour, à ma table de travail, j'ai écrit un chapitre qui mettait en scène Adam, voyant suur les écrans de Times Square, la silhouette et le visage de l'admiration de son adolescence, à savoir Ethan Shaw, la star du lycée, un peu plus âgé que lui, l'homme qu'il admirait et qui, en plus, le protégeait. Et je me suis arrêté à la fin du chapitre lorsque l'on apprend que ce même homme est accusé du viol et du meurtre d'une adolescente.vEt je n'ai pas poursuivi ce livre, et six mois plus tard, relisant ce chapitre, j'ai eu envie de continuer. Mais en réalité, il y avait des problématiques de long terme parce que je voulais faire depuis quelques années sans réussir à trouver la situation. La solution, c'était un mélange de fiction et de réalité. Comment le récit arrive à créer sa propre réalité. Tous ces éléments qui font du récit la possibilité de créer un monde autonome, ça m'intéressait. Je ne savais pas comment le faire. J'avais écrit un livre qui mélangeait le rêve et la réalité. C'était la même idée, mais finalement, c'était raté parce que le monde du rêve est très difficile, mais vraiment développer ce mélange de rêve et de réalité, je n'avais pas réussi. Et puis, tout d'un coup, avec ce chapitre inaugural, tout se cristallisait, toute cette question du récit qui parvient à créer sa propre réalité. Ça devenait Le monde n'existe pas.
Fabrice Humbert Alors c'est vrai que lorsque l'on est lecteur et que l'on aime les histoires, on va plonger dans cette intrigue que vous nous proposez. Les premières pages sonnent comme un véritable thriller, parce que ce fameux Adam qui est journaliste et qui voit son ami d'enfance sur les écrans géants, accusé du viol et du meurtre d'une adolescente. Il se dit c'est pas possible, ce garçon, je le connaissais, il n'était pas comme ça. Ce qui va être l'occasion pour Adam de revenir dans la petite ville de son adolescence à Drysden. Voilà le point de départ. Et puis, il va y avoir une enquête, mais très vite, c'est ce que vous nous expliquiez, c'est qu'on ne sait plus si on est dans le récit, si on est dans la réalité. Quels sont les personnages authentique et les inventions. Il y a ces histoires qui n'en sont pas. Vous vous êtes perdu avec vos personnages ? Ils vous ont pris par la main ou vous saviez exactement qui menait la danse, qui était le marionnettiste ?
Fabrice Humbert Alors ça commençait effectivement comme un thriller. Et d'ailleurs, je trouve que les intrigues de thriller sont souvent intéressantes, mais en fait, je ne peux pas les lire. Je ne vois des thrillers qu'à la télé parce que très souvent, il n'y a aucune écriture. C'est même parfois, à mon avis, illisible. Enfin, là, c'est même pas un jugement de valeur. C'est simplement que je dis que je ne peux pas les lire. Mais en revanche, à l'image, ça ne me fait pas ça. D'abord parce que je suis moins rompu à la réalisation qu'à l'écriture. Il y a des défauts que je peux ne pas voir, mais aussi parce que je trouve que les thrillers Américains ont une réalisation qui, très souvent, est excellente. Donc, j'ai repris ce début, effectivement, mais là, avec la grande différence que peu à peu., effectivement, on ne sait plus si ce qu'on nous raconte est vrai ou si on est dans le mensonge et la fiction. Est-ce que le narrateur est fiable ? On ne le sait jamais.
Philippe Chauveau C'est ce qui fait la force du livre. Que le lecteur soit perturbé parce qu'on est un peu comme Adam, finalement. Toutes nos certitudes vacillent. Toute la réalité se délite au fil des pages. Il y a aussi d'autres points importants à signaler. C'est qu'avec cette petite ville que vous imaginez de Drysden, c'est une métaphore de l'Amérique d'aujourd'hui que vous avez aussi eu envie de nous raconter ?
Fabrice Humbert C'est une certaine Amérique d'aujourd'hui, ce n'est pas toute l'Amérique. Les Etats-Unis sont un pays qui est vraiment fait de contradictions intenses. La situation politique actuelle le montre. Et lorsqu'on va aux Etats-Unis, dans d'autres lieux que New York, Los Angeles ou les Rocheuses, on se rend compte que c'est quand même un pays très différent de l'Europe et la ville de Drysden qu'il y a ici, et la collusion entre mon premier séjour aux États-Unis, dans le Colorado que j'avais adoré, et puis récemment, un reportage que j'ai fait au Dakota du Nord qui est l'État où jamais personne ne va, mais en fait, c'est quand même très intéressant pour comprendre les États-Unis. C'était un reportage que j'ai fait. J'étais très content d'y aller. Après, j'ai trouvé ça tout bonnement affreux. J'ai passé une semaine abominable et en plus, dans une chaleur terrifiante et avec une violence endémique et l'ambiance pesante qu'il y avait dans cette ville réapparaît dans la ville de Drysden. En fait, Drysden, c'est le mélange de mon séjour merveilleux au Colorado. Ça se passe au Colorado, dans la nature du Colorado, mais en même temps, c'est l'ambiance pesante que j'avais ressentie dans cette ville du Dakota du Nord.
Philippe Chauveau On a évoqué la ville de Drysden que vous avez imaginée. Pourquoi était-ce important que votre action se passe aux États-Unis ? Est-ce que ce roman aurait pu exister en Europe, en France ou ailleurs qu'aux États-Unis ? Alors non. C'est sûr que c'était aux États-Unis parce que les États-Unis sont le pays de la fiction. Souvent, on ne connaît pas les États-Unis, mais en revanche, les images des États-Unis ont happé notre cerveau. New-York est une image. Manhattan, surtout, est une image, mais les Rocheuses aussi. Ce livre sur la fiction ne pouvait se passer qu'aux États-Unis.
Philippe Chauveau Votre actualité, Fabrice Humbert, Le monde n'existe pas. C'est votre nouveau titre. Vous êtes publié aux éditions Gallimard. Merci beaucoup.
Fabrice Humbert Merci.