Marie-Hélène Lafon

Marie-Hélène Lafon

Histoire du fils

Portrait 00'06'29"

Philippe Chauveau :

Bonjour Marie-Hélène Lafon.

Marie-Hélène Lafon :

Bonjour.

Philippe Chauveau :

Votre actualité chez Buchet-Chastel : Histoire du fils. C'est une grande histoire d'amour peut-être, en tout cas de fidélité avec cette maison d'édition. C'est aujourd'hui le treizième titre que vous publiez chez eux. En tant qu'auteure, autrice ? Comment dois-je vous appeler ?

Marie-Hélène Lafon :

Auteure.

Philippe Chauveau :

En tant en tant qu'auteure, comment pourriez-vous la qualifier cette relation avec votre maison d'édition?

Marie-Hélène Lafon :

Je dis volontiers que c'est un mariage de raison qui a réussi et qui a tenu. Peut-être que les mariages de raison tiennent davantage que les mariages de passion. C'est à dire que cette maison d'édition, j'avoue que je ne la connaissais pas quand j'ai commencé à chercher un éditeur. J'ai très naturellement envoyé mes textes, d'abord chez des éditeurs qui publiaient les écrivains que j'admirais. Et ces maisons n'ont pas pris mais Buchet-chastel a pris mes premiers textes, et donc l'histoire dure depuis ce moment là. C'est en ce sens que j'ai dit que c'était un mariage de raison.

Philippe Chauveau :

Justement, vous rappelez la sortie de votre premier titre en 2001. Depuis, vous avez une place bien à part en librairie dans le cœur des lecteurs. Cette relation là aussi, on a parlé de la relation avec la maison d'édition, mais la relation avec les lecteurs, comment s'est-elle construite ? Comment la voyez-vous, la percevez-vous aujourd'hui?

Marie-Hélène Lafon :

La relation avec les libraires et les lecteurs, les lecteurs et les libraires, les libraires étant les passeurs des livres vers les lecteurs, j'enfonce des portes ouvertes, c'est une relation qui m'a cueilli sur le vif quand j'ai commencé à publier. Je n'allais pas moi même rencontrer des écrivains vivant dans des librairies avant de publier donc j'ignorais absolument qu'il existait en France un tel tissu vivace de libraires qui sont des athlètes et qui inventent des moments de rencontre entre les lecteurs et les écrivains. Et je les accompagne volontiers. Je vais beaucoup en librairie. J'aime la rencontre avec les lecteurs, à condition qu'il y ait du texte, c'est autour du texte que nous nous rassemblons. Je lis volontiers à voix haute. On échange, on parle, ça parle et c'est merveilleux. Je le fais très volontiers.

Philippe Chauveau :

J'aime à dire, lorsque je parle de vous, que vous êtes la romancière des racines : les racines familiales, les racines de la terre. Et puis, vous avez mis cette phrase de Valère Novarina en exergue de votre roman : « le langage est notre sol, notre chair ». Comme si là aussi, par le langage, il y avait des racines. Est-ce que c'est une bonne définition de ce que vous essayez de transmettre par l'écriture? C'est l'importance des racines ?

Marie-Hélène Lafon :

L'importance de la source. Je crois que je préfère le mot source au mot racine. Pourtant, j'ai un lien ancien, fort et nourricier aux arbres. Mais vous entendez bien ce qu'il y a de plus ouvert, de plus fluide, de plus libre dans le mot source, ça procède du même élan. Il est vrai que j'ai la chance ou la grâce de puiser à des sources premières qui me sont très essentielles. Peut-être que mes livres, en effet, vont de ce côté là et que les lecteurs y trouvent du grain à moudre. En ce sens qu'ils peuvent peut être remonter à leurs propres sources et chercher des forces. Nous en avons besoin.

Philippe Chauveau :

L'attachement à votre terre d'origine, votre terre natale. Comment le justifiez-vous? Pourquoi le mettre dans vos livres?

Marie-Hélène Lafon :

Ce n'est pas du tout un choix, c'est une nécessité. Cet attachement, et vous employez ce mot à juste titre, rime avec arrachement puisque j'en suis partie de ce pays. J'ai toujours su que j'en partirai et je crois que j'y étais d'autant plus attaché très tôt que je savais que je n'y vivrais pas. Vous voyez, je pense que là, il y a vraiment un lien très étroit, très profond et instinctivement, sans même y réfléchir et sans faire de calculs, j'ai toujours pensé que si un jour j'écrivais, j'écrirais du lieu et du milieu d'où je venais. Parce qu'il y avait là quelque chose d'essentiel qui, je n'en disconvient pas un, relevait peut être d'une sorte de culpabilité, du sentiment d'avoir une dette à payer, comme tous les transfuges sociaux. Peut-être. Et pourquoi pas? Il se trouve que c'est le matériau qui, naturellement, remonte quand je suis à l'établi d'écriture.

Philippe Chauveau :

Quel regard portez-vous justement sur l'évolution de notre langue? Y a t il des inquiétudes ou au contraire, avez-vous l'impression que c'est une langue qui continue à évoluer, à changer, à bouger?

Marie-Hélène Lafon :

Elle est vivante, donc forcément, elle évolue, elle change, elle bouge. Je n'ai pas du tout de problème avec ça, même si j'ai naturellement tendance un peu surannée, à chérir le subjonctif plus-que-parfait et autres fantaisies. Mais je n'ai pas, je crois, en dépit du fait que je puisse éventuellement jouer un peu avec ça, je n'ai pas un rapport fondamentalement et définitivement et violemment réactionnaire, au sens étymologique du terme à la langue. En revanche, ce qui me paraît éventuellement et même assurément risqué c'est que le vocabulaire, si vous voulez, les nuances innombrables et précieuses que la langue met à notre disposition ne se perdent à la faveur des tournures plus sommaires et de rétrécissements, c'est un risque essentiel. Parce-que si on simplifie la langue, on simplifie le monde, on en saisit plus les nuances.

Philippe Chauveau :

Si je vous entends, est-ce qu'il y a une part de militantisme, que ce soit pour l'enseignante ou pour l'auteure? Est-ce que par l'écriture, vous vous sentez militante pour défendre la langue?

Marie-Hélène Lafon :

Je ne me sens pas du tout militante, mais je me sens politiquement embarquée et engagée, politique et poétique ça ne se sépare pas. L'écriture c'est politique et le métier de professeur aussi. Le mot militant, j'ai toujours eu du mal avec ça. Mais évidemment que c'est une lutte à couteaux tirés, avec des enjeux essentiels.

Philippe Chauveau :

Votre actualité Marie-Hélène Lafon chez Buchet-Chastel, c'est votre nouveau titre, ça s'appelle Histoire du fils.

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  • Depuis son premier titre en 2001, « Le soir du chien », Marie-Hélène Lafon est restée fidèle à son éditeur Buchet-Chastel. Par la qualité de son écriture, son travail sur les mots et la syntaxe mais aussi par les histoires dont elle s’empare, telle une conteuse, elle a fédéré autour d’elle un public fidèle, libraires ou des lecteurs, sensible à son écriture développée dans plus d’une douzaine de titres dont « Sur la photo », « L’annonce » ou « Nos vies », des romans qui font partie d’une...Les sources de Marie-Hélène Lafon - Présentation - Suite
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    Philippe Chauveau : Voilà un livre assez peu épais, mais il y en a des choses dedans, sur le plan de l'écriture. Bien sûr, on y reviendra, puis aussi sur cette histoire de famille que vous racontez. Nous sommes dans vos terres, au centre de la France, que vous connaissez bien. Et puis, ce fils, c'est André dont on va suivre le parcours. André est né d'une aventure de sa mère, Gabrielle. Ce n'est pas elle qui va l'élever puisqu'elle préfère vivre sa vie Parisienne avec un P majuscule. Il va être élevé par son oncle et sa...Les sources de Marie-Hélène Lafon - Livre - Suite