Journaliste, Marie-Noëlle Demay a notamment participé à la création du magazine « Gala » mais on retrouve aussi sa plume dans « Marie-Claire » ou « Voici ». Outre le journalisme à la page people, l’autre passion de Marie-Noëlle Demay, c’est la mode et on ne s’étonnera pas qu’en prenant la plume romanesque, elle choisisse de raconter Karl Lagerfeld et ce, de façon on ne peut plus originale. Dans « Le crocodile devenu le sac à main de Karl Lagerfeld », paru en 2018, quelques mois seulement avant la mort du...
Aliénor d'Aquitaine, il y eut un soir, il y eut un matin de Marie-Noëlle Demay - Présentation - Suite
Philippe ChauveauBonjour Marie-Noëlle Demay
Marie-Noëlle DemayBonjour.
Philippe ChauveauMerci d'avoir accepté notre invitation. Nous allons parler d'Aliénor et puis nous allons aussi parler de Karl Lagerfeld on verra s'il y a un lien. Mais on va surtout faire un petit peu plus connaissance. Votre nom de plume, on le connaît puisque vous avez travaillez dans la presse magazine ? Il y eu Voici, il y a eu Marie-Claire, il y a eu Gala. Vous avez même participé à la création du magazine Gala. Pourquoi le choix du journalisme et...
Aliénor d'Aquitaine, il y eut un soir, il y eut un matin de Marie-Noëlle Demay - Portrait - Suite
PhilippeVoici donc un sujet incroyablement romanesque et néanmoins authentique. Vous nous parlez d'Aliénor d'Aquitaine, cette grande dame de notre histoire. Pourquoi ce choix Marie-Noëlle Demay, vous nous le dites, le sujet vient à vous. Mais vous décidez de nous parler des dernières années d'Aliénor. Elle a plus de 70 ans, son fils Richard Cœur de Lion vient de mourir.C'est à dire qu'il ne s'agissait pas pour vous de faire une biographie romancée d'Aliénor, mais bien de parler de ce moment de vie ou elle va aller quérir sa...
Aliénor d'Aquitaine, il y eut un soir, il y eut un matin de Marie-Noëlle Demay - Livre - Suite
Marie-Noëlle Demay
Aliénor d'Aquitaine, il y eut un soir, il y eut un matin
Présentation 00'02'36"Journaliste, Marie-Noëlle Demay a notamment participé à la création du magazine « Gala » mais on retrouve aussi sa plume dans « Marie-Claire » ou « Voici ». Outre le journalisme à la page people, l’autre passion de Marie-Noëlle Demay, c’est la mode et on ne s’étonnera pas qu’en prenant la plume romanesque, elle choisisse de raconter Karl Lagerfeld et ce, de façon on ne peut plus originale. Dans « Le crocodile devenu le sac à main de Karl Lagerfeld », paru en 2018, quelques mois seulement avant la mort du créateur, c’est bien ce drôle de reptile aquatique qui racontait le quotidien du grand nom de la couture. Drôle, enlevée, pertinent, ce premier livre laissait entrevoir une ambition littéraire plus large.
On se réjouira donc de retrouver Marie-Noëlle Demay avec un sujet sans doute plus fort et une écriture désormais assurée.
Délaissant notre monde contemporain, la romancière nous entraine en 1199. Richard Cœur de Lion vient de mourir, victime d’un tir d’arbalète lors du siège de Châlus. Veillée par sa mère, Aliénor, Richard laisse un royaume divisé entre Plantagenêts et Capétiens sans oublier la jalousie de son propre frère Jean sans Terre, reparti en Angleterre. Pour apaiser les tensions, il faut une union qui fasse taire les oppositions. A 75 ans, quittant son abbaye de Fontevraud, Aliénor d’Aquitaine prend la route de l’Espagne pour quérir sa petit-fille, Blanche, douze ans, afin qu’elle épouse son oncle, le roi de France Louis VIII.
C’est cette partie de la vie d’Aliénor que nous raconte Marie-Noëlle Demay, d’avril 1199 à avril 1200. Et à travers deux récits, celui d’Aliénor, puisant dans ses souvenirs, et celui de la future Blanche de Castille, qui alors âgée de 12 ans, ne sait pas encore quel sera son destin de reine, elle qui sera la mère du futur Saint Louis.
Sur les routes d’Aragon, des Pyrénées et d’Aquitaine, le dialogue entre ses deux femmes qui ne se connaissaient pas, deux générations face à un monde en ébullition, la grand-mère et sa petite-fille, deux femmes face à la violence des hommes. L’intrépide Aliénor face à la douce Blanche. Mais deux tempéraments, deux caractères qui marqueront notre Histoire.
Habilement construit, joliment écrit avec juste ce qu’il faut de référence à l’époque pour créer une ambiance, ce roman se lit avec un réel plaisir.
« Aliénor d’Aquitaine, il y eut un soir, il y eut un matin » de Marie-Noëlle Demay est publié aux Presses de la Cité.
Marie-Noëlle Demay
Aliénor d'Aquitaine, il y eut un soir, il y eut un matin
Portrait 00'06'57"Philippe Chauveau
Bonjour Marie-Noëlle Demay
Marie-Noëlle Demay
Bonjour.
Philippe Chauveau
Merci d'avoir accepté notre invitation. Nous allons parler d'Aliénor et puis nous allons aussi parler de Karl Lagerfeld on verra s'il y a un lien. Mais on va surtout faire un petit peu plus connaissance. Votre nom de plume, on le connaît puisque vous avez travaillez dans la presse magazine ? Il y eu Voici, il y a eu Marie-Claire, il y a eu Gala. Vous avez même participé à la création du magazine Gala. Pourquoi le choix du journalisme et pourquoi le choix du journalisme aller, je vais peut être employer un gros mot du journalisme people ?
Marie-Noëlle Demay
Alors le choix du journalisme ? Je crois qu'on peut dire vocation, parce qu'à sept ans, je voulais déjà. Je voulais être journaliste/reporter/photographe, au grand dam de mes parents qui vivaient en province. Et mon père me répétait toujours : « ma fille, beaucoup d'appelés et peu d’élus » . On connaît absolument personne dans ce secteur, tu vas jamais arriver. Et je lui ai démontré le contraire, mais je l'ai écouté.
Philippe Chauveau
C’est ce qui vous motivé.
Marie-Noëlle Demay
Mais voilà, mais je l'ai écouté parce qu'il a dit écoute, d'un tempérament un peu fantasque donc le journalisme, très bien, l'École du Louvre, pourquoi pas ? Ou quelque chose dans le journalisme, vraiment, mais tu vas faire des études de droit, ce qui mettra un peu de plomb dans la tête. Et j'ai fait un DEA, ce qu'on appelle aujourd'hui un master deux de droit public. Et pendant toutes mes études, l'été, moi, au lieu de partir en vacances, je travaillais dans des journaux gratuitement comme stagiaire. Pour vous dire, j'ai même travaillé à Télé-Loisirs. J'ai remplacé un de mes premiers postes la dame du courrier des lecteurs et je me souviens très bien d'un envoi d'un lecteur qui avait envoyé des insectes morts dans une boîte. Il fallait les identifier. Donc franchement quand on a fait ça, on a tout fait.
Philippe Chauveau
La création de Gala, j'imagine que ça reste un beau souvenir parce que Gala s'est quand même imposé comme un magazine majeur dans la presse française.
Marie-Noëlle Demay
Non mais j'étais si jeune surtout. Et ça a été une opportunité incroyable. Nous étions trois Patrick Marescaux, Valérie Calazel et moi. Axel Ganz, patron de Prisma Presse, bien sûr, qui nous avait dit avec son délicieux accent : « Je veux un jour de France de l'an 2000 ».
Philippe Chauveau
Le jour de France de l’an 2000.
Marie-Noëlle Demay
Voilà. Et donc on est allés rechercher des vieux jours de France sur les quais on a regardé un peu.
Philippe Chauveau
Vous vous êtes inspiré de la maquette et du contenu.
Marie-Noëlle Demay
On s'est inspiré du contenu. Bien sûr je me souviens, les carnets d'Edgard Schneider sont devenus des pieds dans le caviar. Enfin voilà, c'est une époque que les moins de 20 ans.
Philippe Chauveau
Et même si Gala a évolué. L'ADN reste le même.
Marie-Noëlle Demay
Oui, parce que l'ADN reste extrêmement fort. Ça veut dire qu'on avait quand même bien tout de suite saisi et fondé, enfin mit un squelette qui était vraiment solide puisqu'aujourd'hui il n'a pas tant changé que ça.
Philippe Chauveau
Vous avez donc cette plume journalistique ? Et puis, il y a peut être aussi et j'imagine, cette appétence pour l'écriture en tant que journaliste et pour l'écriture aussi romanesque. Ça veut dire que vous êtes également une lectrice ?
Marie-Noëlle Demay
Oui, bien sûr. Je crois que c'est difficile d'être à la fois journaliste et de pouvoir prétendre écrire quelque chose sans s'être nourri auparavant d'auteurs et de lire tout. Et moi, j'ai toujours été une lectrice boulimique, donc je lis à peu près tout ce qui me tombe sous la main. Que ce soit des magazines, des romans, des livres. Je n'ai pas de, je ne m'interdis rien, tout m'intéresse.
Philippe Chauveau
Et en littérature, plutôt des classiques ou des romans contemporains, des Français ou des étrangers.
Marie-Noëlle Demay
Plutôt des classiques, plutôt des classiques français. Plutôt là, la langue française dans ce qu'elle a de plus noble, de plus pure, j'allais dire.
Philippe Chauveau
En 2018, il y a ce premier roman, vous faites un pas, vous passez de l'écriture journalistique à l'écriture romanesque, mais en gardant néanmoins un orteil dans ce que vous aimez, à savoir la mode et le people, puisque vous allez parler de Karl Lagerfeld. Mais par l'intermédiaire de son sac à main et par l'intermédiaire du crocodile qui a servi pour faire le sac à main. C'était un livre qui était à la fois drôle, pertinent, enjoué, qui disait aussi beaucoup de choses, de la personnalité de Karl Lagerfeld et qui permettait de raconter un peu l'histoire de ce créateur. C'était peu de temps avant sa disparition.
Marie-Noëlle Demay
C’était six mois après, puisqu'il a eu le temps de le lire. Je le lui ai envoyé. C'était pas très facile parce que je ne veux pas dévoiler pour les lecteurs qui ne l’auraient pas lu, mais à un moment, Karl disparaît et donc c'était une confrontation dont je savais qu'elle serait compliquée pour lui. Mais je, je comptais sur son sens de l'humour puisqu'à la fin quand même il ressuscite. Donc je comptais sur son sens de l'humour. Et savez vous ? On m'a raconté il y a très peu de temps comment ça c’était passé, parce que je lui ai envoyé le livre, évidemment, je lui écrit une lettre. Je le connaissais, bien sûr, mais là, j'ai été très discrète et sobre. Donc je lui ai envoyé un mot, envoyer le livre. Et il paraît que il l'a reçu au studio. Il l’a emmené le soir et le lendemain matin, il est arrivé et tout le monde lui a dit : « Et alors alors ? » Et il a répondu Marie-Noëlle m'a tué. Versus Omar m'a tuer, TIER. Je trouvais ça tellement Karl, c'est tellement drôle. Il a été bienveillant, ça l'a fait rire.
Philippe Chauveau
Il y avait ce premier roman, donc, dont Karl Lagerfeld était le personnage principal. Après Le crocodile, bien évidemment, mais qui vous laissait un petit peu dans votre, je vais dire dans votre zone de confort ? On restait dans la mode on restait dans le people dans un univers que vous maîtrisez parfaitement. Et puis là, vous faites aussi un grand pas en nous parlant d’Aliénor. On va reparler du contenu du roman dans un instant. Mais est ce à dire aussi que vous avez envie peut être de gommer Marie-Noëlle la journaliste people pour justement montrer que, petit à petit, vous cheminer vers une autre envie d'écriture ?
Marie-Noëlle Demay
Alors je crois que pas du tout. Ça s'est fait de façon totalement naturelle. Parce que cinq minutes avant de regarder le documentaire qui m'a donné cette idée, je ne savais pas que j'allais écrire sur Aliénor. Et franchement, on m'aurait dit que j'allais écrire un jour un roman historique, ou tout au moins sur fond historique, je l'aurais jamais cru. Donc il n'y a pas de calcul parce que je suis très à l'aise avec mon, avec ma casquette de people, culture, art de vivre, être journaliste spécialisée, je n'ai aucun souci là dessus. Je n'ai pas voulu écrire Aliénor pour me donner une assise ? Pas du tout. Je l'ai écrit tout simplement parce qu'elle est venue me chercher, parce que le sujet s'est imposé et que je n'ai pas résisté à cet appel là. Mais ç'aurait pu être quelqu'un d'autre, mais ce fut elle.
Philippe Chauveau
Mais ça veut dire qu'aujourd'hui, vous voulez continuer à la fois dans l'écriture journalistique et vous voulez aussi continuer dans l'écriture romanesque ? Le virus de l'écriture romanesque est pris ?
Marie-Noëlle Demay
J’espère. Absolument. Oui, oui, totalement, bien sûr. Évidemment, les deux, les deux sont complémentaires. Pour moi.
Philippe Chauveau
C'est votre actualité. Marie-Noëlle Demay, ça s'appelle Aliénor d'Aquitaine. Il y eût un soir, il y eût un matin, c'est aux éditions Presses de la Cité.
Marie-Noëlle Demay
Aliénor d'Aquitaine, il y eut un soir, il y eut un matin
Livre 00'07'45"Philippe
Voici donc un sujet incroyablement romanesque et néanmoins authentique. Vous nous parlez d'Aliénor d'Aquitaine, cette grande dame de notre histoire. Pourquoi ce choix Marie-Noëlle Demay, vous nous le dites, le sujet vient à vous. Mais vous décidez de nous parler des dernières années d'Aliénor. Elle a plus de 70 ans, son fils Richard Cœur de Lion vient de mourir.
C'est à dire qu'il ne s'agissait pas pour vous de faire une biographie romancée d'Aliénor, mais bien de parler de ce moment de vie ou elle va aller quérir sa petite fille en Espagne. Pourquoi faire le choix de parler d'Aliénor, femme âgée ?
Marie-Noëlle Demay
Là, c'est la même chose, je ne l'ai pas choisi. En fait, le sujet s'est imposé à moi quand je me suis dit : mais cette femme vient de perdre sans doute l'être qu'elle aimait le plus au monde, qui était son fils. Et elle va néanmoins trouver la force alors qu'elle a presque 75 ans ce qui est quand même quasiment le double...
Philippe
Pour l'époque.
Marie-Noëlle Demay
Pour l'époque, c'est incroyable. Elle va aller traverser les Pyrénées en plein hiver pour aller chercher cette jeune fille qui doit être l'aînée normalement, qui doit Oraka qui a le même âge que l'héritier capétiens. Et elle revient avec Blanca. Pourquoi ? Personne ne le sait vraiment ? Et ça, ça m'a intrigué. Je me suis dit : mais tiens, mais qu'est ce qui s'est passé ? Pourquoi l'amener une mais pas l'autre ? Qu'est ce qui s'est passé dans sa tête et tout de suite mon imagination s'est mise en marche. Donc j'ai dû évidemment beaucoup, beaucoup travailler sur le sujet et j'ai trouvé intéressant de pouvoir faire cet échange entre la vieille reine et la jeune infante. Cet échange d'émotion, cet échange de sentiments.
Philippe
Et alors pour raconter cette histoire, vous vous basez sur un fait authentique, alors je plante le décor. Avril 1199, Richard Cœur de Lion est mortellement blessé d'un tir d'arbalète. On vient chercher, on envoie un chevalier à Fontevraud où est recluse Aliénor. Elle va veiller son fils pendant près d'une semaine, il va mourir. Et parce qu'il y a des tensions avec le roi de France et parce qu'il y a des tensions avec le propre frère de Richard, Jean sans Terre, il faut une union, il faut un mariage. Et c'est comme ça que Aliénor part en Espagne quérir sa petite fille pour lui faire épouser le futur Louis VIII. Il y a donc tout ce cheminement vers l'Espagne. Et puis il y a cette cette rencontre. Alors quels sont les outils que vous avez utilisés pour faire œuvre romanesque à partir d'éléments authentiques ?
Marie-Noëlle Demay
Je crois que le premier outil, c'est de me glisser dans la peau de Aliénor. Si c'est possible, et puisqu'elle me l'a permis quelque part, c'est d'essayer de vraiment entrer dans en elle, essayer de comprendre qu'est ce qui pouvait la motiver ? Évidemment, tout ça aidée par énormément de lectures, énormément de documentation puisqu'il a fallu que je me documente.
Moi qui ne connaissait strictement rien, je dois vous dire je suis pas du tout historienne, donc il a fallu que j'avale beaucoup, beaucoup de documentation, tant sur Aliénor, aussi sur Richard, sur tout le climat politique, sur aussi blanche parce que Blanche est très importante. Et pour pouvoir la faire dialoguer avec Aliénor, il fallait quand même que je sache un peu quelles personnes elle allait devenir pour deviner quel enfant elle avait été.
Philippe
On précise que cette petite Blanche qui elle a douze treize ans, va devenir, en épousant Louis VIII, Blanche de Castille et donc la mère de Saint Louis.
Marie-Noëlle Demay
La mère du futur Saint Louis et qui va reproduire étonnamment bien des schémas de sa grand mère. Le fils préféré, une certaine opiniâtreté, un goût du pouvoir, une force comme ça, interne. Et aussi cette espèce de chose totalement incroyable qui est, je le disais, d'avoir un fils entre tous, entre tous aimé.
Philippe
La force de votre romance, c'est d'être construit sur une année d'avril 1199 à avril 1200. C'est le dialogue entre ces deux femmes. À un moment, c'est Aliénor qui parle et qui raconte un peu ses souvenirs ou qui se parle à elle même et qui souvent même convoque son son fils récemment décédé. Et puis l'autre voix, c'est celle de Blanche que l'on arrache à ses parents que l'on arrache à sa sœur, sa sœur qui a une pointe de jalousie puisque c'était elle qui aurait dû être choisie initialement. Et comment passe t on de l'Espagne ensoleillée à l'Aquitaine ? Et puis ensuite pour rejoindre la Normandie ? Et puis vous faites aussi le choix d'avoir sous une écriture très contemporaine, très moderne, mais néanmoins d'essayer de nous emmener dans une ambiance qui rappelle celle de cette époque. Comment avez vous travaillé cette écriture très différente de ce qu'avait été votre précédent roman ?
Marie-Noëlle Demay
Vous le savez, je dois vous avouer une chose je ne l'ai pas travaillé. C'est vraiment venu de façon assez naturelle. C'est à dire que, comme j'essayais de me couler en elle, ou elle s'écoulait en moi, je ne sais pas trop, mais en fait, je n'ai pas hésité. Le plus compliqué, toujours pour moi, c'est de trouver la première phrase. La première phrase elle est très courte, ce sont deux mots : "ta peau". Mais après ? Après, la chose est venue naturellement. Je ne fais jamais de plan. Je me laisse totalement guider et donc je n'avais pas de plan. La seule chose que j'avais de travailler, c'était le chemin et donc j'ai travaillé les étapes en me disant : alors voyons voir les chevaux, les bœufs qui étaient attelés, combien de temps est ce qu'ils allaient mettre entre deux étapes ? Quelles étapes sont les plus crédibles ? Ou est ce qu'il y a des châteaux, quels châteaux il y avaient au Moyen Âge ? Ou elles ont pu s'arrêter ? Ou est ce qu'elles ont pu se reposer ? Quelles ont été les problématiques ? Ou est ce que elles dorment ?
Philippe
Je tiens à préciser aussi, et vous le dites dans les toutes dernières pages, que votre travail de romancière, certes, a néanmoins été soutenu et approuvé par Martin Aurell, qui est l'un des spécialistes d'Aliénor.
Marie-Noëlle Demay
Oui et quel honneur et quel bonheur il m'a fait.
Philippe
Ce qu'il veut dire qu'il y a une véracité historique ce que vous racontez.
Marie-Noëlle Demay
Oui, oui. Si Martin Aurell le dit, je pense qu'on peut le croire puisqu'il est, comme vous le dit, un grand spécialiste des Plantagenêt, d'Aliénor en particulier. J'osais pas lui envoyer le livre et il a eu cette phrase qui était pour moi le plus beau des cadeaux venant de lui, il m'a dit : "Moi, ça fait 40 ans que je vis avec Aliénor et elle est exactement en tant que femme dans ces ressorts intimes, celle que j'imagine.".
Philippe
Alors vous me dites c'est un livre sur Aliénor et sur celle qui va devenir Blanche de Castille, donc un livre basé sur la grande Histoire, mais sous une plume romanesque, pour raconter deux grands noms de notre histoire nationale. Mais c'est aussi l'histoire de deux femmes. Ce sont deux très beaux portraits de femmes que vous nous raconter. Y a t il une part de féminisme dans cette envie d'écrire aussi là dessus ? Parce qu'elles sont confrontées à la violence, à la violence des hommes ? Et si, si, Aliénor va quérir sa petite fille, c'est bien pour essayer d'apaiser ces tensions que créent les hommes. Alors est ce qu'il y a une part de féminisme dans votre travail ?
Marie-Noëlle Demay
Ce qui m'a frappé, c'est qu'elle soit aussi contemporaine. C'est-à-dire que Aliénor, c'est toutes les femmes d'aujourd'hui, quelque part. Et ça, j'ai trouvé ça fantastique. Alors, si ça doit être une part de féminisme, oui.
Philippe
Voilà un très agréable moment de lecture, non seulement par la qualité de l'écriture, mais aussi par le sujet que vous nous raconter. Ces deux femmes qui ont marqué l'histoire. Et puis surtout ces deux portraits de femmes, cette cette grand mère et cette petite fille, cette femme à la fin de sa vie, et puis celle qui s'en va vers son, vers, son destin.
Un très beau roman que je vous recommande particulièrement Aliénor d'Aquitaine, il y eut un soir, il y eut un matin, Marie-Noëlle Demay, vous êtes publiée aux Presses de la Cité. Merci beaucoup.
Marie-Noëlle Demay
Merci à vous.