Si son nom est bien connu en librairie, Antoine Rault figue aussi en bonne place sur les colonnes Morris des boulevards parisiens.Il a plusieurs fois été récompensé aux Molières notamment pour « Le diable rouge » avec Claude Rich ou « Le système » avec Lorant Deutsch.En cette rentrée 2022, il est d’ailleurs au Théâtre des Variétés avec sa nouvelle pièce, « Au scalpel » réunissant sur scènes Davy Sardou et Bruno Salomone dans un duo à la fois drôle et grinçant.Mais c’est aussi le romancier qui nous intéresse et,...
Monsieur Sénégal d'Antoine Rault - Présentation - Suite
Philippe ChauveauBonjour Antoine.
Antoine Rault Bonjour
Philippe ChauveauJ'ai plaisir à vous accueillir pour votre actualité. Aux éditions Plon, M. Sénégal qui est votre sixième roman puisque c'est le romancier que nous recevons aujourd'hui. Mais c'est aussi l'homme de théâtre et on va également en parler, que ce soit le roman, que ce soit le théâtre, c'est l'écriture. Pourquoi la place de l'écriture dans votre vie Antoine Rault?
Antoine Rault Parce que j'en ai besoin. Fondamentalement, quand j'écris pas, en fait, je tourne...
Monsieur Sénégal d'Antoine Rault - Portrait - Suite
Philippe ChauveauAntoine Rault, votre actualité aux éditions Plon. Ce nouveau titre Monsieur Sénégal, avec cette cette belle couverture. Nous sommes en 1919, à quelques semaines du grand défilé du 14 juillet, le défilé de la Victoire et nous allons faire connaissance avec Amadou Lo, Amadou, Louis, les Guinéens. Il est venu en France avec beaucoup d'autres de ses comparses tirailleurs sénégalais.
Antoine RaultOn les appelait tous comme ça. Tirailleurs sénégalais. Alors qu'en fait ils ? Quel que soit, ce qui montre à quel...
Monsieur Sénégal d'Antoine Rault - Livre - Suite
Antoine Rault
Monsieur Sénégal
Présentation 00'02'40"Si son nom est bien connu en librairie, Antoine Rault figue aussi en bonne place sur les colonnes Morris des boulevards parisiens.
Il a plusieurs fois été récompensé aux Molières notamment pour « Le diable rouge » avec Claude Rich ou « Le système » avec Lorant Deutsch.
En cette rentrée 2022, il est d’ailleurs au Théâtre des Variétés avec sa nouvelle pièce, « Au scalpel » réunissant sur scènes Davy Sardou et Bruno Salomone dans un duo à la fois drôle et grinçant.
Mais c’est aussi le romancier qui nous intéresse et, là encore, Antoine Rault a su, au fil des années, montrer l’étendue de son talent.
En 2010 parait « Je veux que tu m’aimes » chez Albin Michel qui séduit les libraires et les lecteurs. Par l’histoire de ce gamin malaimé, l’auteur dévoilait alors une écriture affirmée et une sensibilité touchante.
Puis avec « La danse des vivants » et « La traversée du paradis », il nous entrainait dans une grande saga à la fois historique et romanesque sur les traces d’un jeune homme amnésique devenu le jouet des services secrets français et allemands.
Enfin, en 2020 sortait « De grandes ambitions » évoquant les rêves brisés d’une bande de copains sur trois décennies, des année 80 à l’an 2000.
Dans ses romans, au-delà d’une écriture fluide, équilibrée et habilement travaillée, Antoine Rault aime à placer des destins individuels au cœur de la grande histoire, à entrainer des anonymes face à des évènements qui les dépassent.
Avec « Monsieur Sénégal », son nouveau titre, voici Amadou Lo. Il est guinéen mais est devenu bien malgré lui tirailleur sénégalais pendant la Grande guerre. Des copains, il s’en est fait dans les tranchées, mais une fois l’armistice signée, tous ceux qui en ont réchappé sont rentrés chez eux. Tous sauf Amadou, que le médecin-major Desvaux veut garder à sa disposition pour des raisons ambiguës. Et voilà comment Amadou se retrouver dans une petite ville de Franche-Comté aux premières heures des années 20. Le déracinement, la peur de l’autre, le racisme ordinaire, l’évolution des mœurs, la fragilité psychologique des rescapés de la guerre, la vie d’une petite bourgade dans une France qui veut oublier la tragédie mais vit encore repliée sur elle-même… autant de thèmes abordés dans ce formidable roman d’Antoine Rault.
« Monsieur Sénégal » est publié aux éditions Plon
Antoine Rault
Monsieur Sénégal
Portrait 00'08'31"Philippe Chauveau
Bonjour Antoine.
Antoine Rault
Bonjour
Philippe Chauveau
J'ai plaisir à vous accueillir pour votre actualité. Aux éditions Plon, M. Sénégal qui est votre sixième roman puisque c'est le romancier que nous recevons aujourd'hui. Mais c'est aussi l'homme de théâtre et on va également en parler, que ce soit le roman, que ce soit le théâtre, c'est l'écriture. Pourquoi la place de l'écriture dans votre vie Antoine Rault?
Antoine Rault
Parce que j'en ai besoin. Fondamentalement, quand j'écris pas, en fait, je tourne en rond, je me déprime. Il y a quelque chose de. C'est vrai que quand je suis en gestation, d'un roman par exemple, ou d'une pièce de théâtre, ce temps de recherche, il arrive un moment ou je finis par être extrêmement angoissé. J'ai l'impression que je n'ai rien fait. C'est dire qu'en fait, je commence à exister quand je commence à mettre vraiment les mots. Au delà des brouillons, des notes, etc Quand je mets vraiment les mots sur le papier un par un et que je rature, je recommence quand j'ai l'impression que j'ai fait au moins une page, deux pages, trois pages. Et si je ne fais pas ça le reste du temps ... Bien sûr, il faut s'imprégner. On ne peut pas écrire sans arrêt, mais en même temps, il arrive à un très vite, un moment ou il faut que j'écrive. Parce que sinon, sinon, je me dilue.
Philippe Chauveau
Vos textes sont une prolongation de vous mêmes, en quelque sorte.
Antoine Rault
En tout cas, ils correspondent le plus à ce que je suis probablement dans le fond, à dire que d'ailleurs, je pense pas que quand un écrivain est sincère, il ait besoin d'une biographie ou d'une autobiographie, parce qu'au fond tout est dans ce qu'il écrit. Et ce n'est pas parce qu'on écrit un roman, par exemple, comme celui dont on va parler, qui se passe en 1919, qu'on n'est pas profondément inscrit dans. Dans ce roman là, on raconte sa propre. Je pense que si on est sincère, on raconte qui on est aussi. On exprime en tout cas sa sensibilité, son regard sur le monde.
Philippe Chauveau
Qu'est ce qui vous a poussé à l'écriture ? Si l'on revient un peu sur sur le passé, même s'il n'est pas si éloigné que ça. Qu'est ce qui vous pousse à l'écriture ? Est ce que c'est une façon de vous protéger, de dire des choses que vous n'aviez pas, que vous n'arriviez pas à exprimer, que ce soit par le théâtre ou par le roman ? Pourquoi avoir pris la plume ?
Antoine Rault
Je pense que depuis que je suis tout petit, j'ai toujours écrit. Sans doute pour de façon secrète au départ, comme toujours, sans doute pour un canal. Mais l'écriture, c'était la façon secrète d'exprimer un autre qu'un autre, Antoine, un autre, un autre, un autre personnage, moins timide que celui que j'étais dans la dans la vraie vie, mais un peu plus, plus plus flamboyant, peut être aussi plus. Au départ, c'est ça, quand on est un enfant, on se raconte des histoires et on est un personnage pas mal. Et donc, je pense que j'ai eu besoin d'écrire pour me. Pour me trouver, j'ai besoin de faire que de laisser une trace. En fait, je pense que si j'avais été un homme préhistorique, j'aurais sans doute peint des mammouths sur les grottes.
Philippe Chauveau
Donc c'est votre, c'est votre grotte à vous faire les grottes. Alors il y a eu les succès de librairie Je veux que tu m'aimes, La traversée du paradis, pour n'en citer que quelques uns. Et puis des succès de théâtre aussi avec Le Diable rouge, avec Le Caïman. L'écriture romanesque vient avant et après celle du théâtre. Ça s'est passé dans quel ordre ou simultanément ?
Antoine Rault
J'ai commencé par le théâtre. En fait, puisque quand j'étais adolescent, j'ai commencé à faire du théâtre en amateur. Donc comme comme comédien, c'était un peu mon but. Je voulais, je voulais devenir comédien. Et puis en même temps, j'écrivais, j'écrivais avant d'avoir fait du théâtre. Donc je me suis. J'aimais beaucoup, beaucoup les auteurs de théâtre. J'ai été nourri de lectures, de pièces de théâtre.
Antoine Rault
Je lisais une pièce comme un musicien, une partition de musique entre la musique. Moi, je voulais une pièce de théâtre et je la vois alors que beaucoup de gens ne lisent pas de théâtre parce qu'ils ont du mal à se représenter ce que ça donne quand je peux lire un pièce de théâtre ou un scénario de film d'ailleurs, et je me le représente parfaitement.
Antoine Rault
Donc c'était j'ai. J'ai eu envie de ça et je crois que j'aimais beaucoup le dialogue et que j'avais un sens assez vif du dialogue. Donc j'ai commencé par le théâtre, donc au fond, je suis rentré dans l'écriture romanesque progressivement et au fond, ce qui me passionne dans l'écriture romanesque et qui fait que ça prend plus d'importance pour moi sans doute maintenant que le théâtre, c'est justement cette possibilité, ce champ des possibles extraordinaire.
Antoine Rault
On peut tout faire avec. Quand on écrit un roman, et plus ça va, plus ce qui m'intéresse, c'est le on va dire c'est facile, c'est le style, c'est la forme. Même si je suis persuadé que ce qui compte, c'est d'abord d'avoir un grand sujet. Le fond est essentiel, mais quand même, la forme, c'est ce côté ludique. C'est à dire comment ?
Antoine Rault
Comment je raconte l'histoire. C'est le point de vue qui compte dans une histoire.
Philippe Chauveau Alors aujourd'hui, vous vous plaisez finalement sous cette double casquette de romancier et de dramaturge. Et ce qui justifie que vous avez finalement une double actualité puisqu'il y a ce roman que nous avons évoqué Un Monsieur au Sénégal, aux éditions Plon. Et puis, en parallèle, il y a cette cette nouvelle pièce qui qui est donnée au Théâtre des Variétés avec Davy Sardou et Bruno Salomone au scalpel que vous avez présenté à Avignon et qui maintenant est sur scène à Paris.
Philippe Chauveau
En quelques mots.
Antoine Rault
C'est le thème d'Abel et car c'est une comédie grinçante, grinçante, quasi policière puisque au fait, il y a, il y a un suspense jusqu'au bout. On est, on ne sait pas ou est la vérité et qu'est ce qui va se passer. Mais on redoute qu'il se passe quelque chose de extrêmement dramatique. Ce sont deux frères. L'un est chirurgien, l'autre est photographe.
Antoine Rault
Il ne se voit plus depuis longtemps et tout d'un coup, le photographe débarque à 10 h du soir chez le chirurgien. Pourquoi ? C'est une pièce qui réfléchit sur les racines de la haine, qui se nourrit de petits riens. Mais dans la vie, les petits riens ne sont pas rien. Mais tout en fait. Au fond, on est une addition de petits riens, un petit rien.
Antoine Rault
C'est quelquefois quelque chose qui fait basculer votre existence. C'est une pièce qui parle de la justement, de ces relations fraternelles qui vont jusqu'au fratricide.
Philippe Chauveau
Qui incite aussi à la réflexion pour chacun des ça.
Antoine Rault
Oui, oui, parce que puisque on est beaucoup dans les histoires de famille, c'est toujours très compliqué. Et on s'aperçoit que toute la violence qu'il peut y avoir dans la famille, parfois, elle se nourrit de petits riens, mais pas que.
Philippe Chauveau
Alors donc, ça, c'est au scalpel qui aura sûrement le même succès que le Diable Rouge ou le Caïman pour lequel vous avez été nommé, notamment aux Molières et primés lorsque vous entamez l'écriture d'un roman. Y a t il aussi une écriture de pièce en parallèle ? Pouvez vous écrire sur deux registres différents ou au contraire. Il y a d'abord Antoine Rault, romancier, et Antoine Rault, le dramaturge.
Antoine Rault
Je peux avoir, je peux avoir des idées qui me viennent, qui peuvent devenir des idées de romans ou pièces de théâtre. Mais je suis mono tâche. Et donc, une fois que je me lance sur un sujet, il faut vraiment que je m'y consacre entièrement. Donc parfois, je creuse un sujet, puis un autre, puis je reviens à celui là, etc.
Antoine Rault
Mais quand j'ai décidé vraiment que j'écrivais, je vais au bout. Et donc c'est une pièce ou un roman.
Philippe Chauveau
Deux questions en une. Antoine, vous nous avez confié avoir eu envie d'être comédien, d'être monté sur scène il y a quelques années. Puis finalement, vous êtes devenu le dramaturge. Est ce que c'est quelque chose qui pourrait encore vous tenter que vous faites encore parfois ? Ou est ce que, finalement, c'est à travers l'écriture de romans que vous endossez des personnages ?
Philippe Chauveau
Devenez aussi un comédien par le roman.
Antoine Rault
Ah oui, c'est vraiment ça. Non, non, je n'ai pas envie d'être comédien. C'est un métier fantastique, j'ai. Mais j'ai eu la chance que mes pièces soient jouées par des très grands comédiens, comme Claude Rich par exemple. C'est un métier d'être comédien. Ça, ça se travaille, ça se mûrit. On devient meilleur quand on tourne, plus on le fait plus, plus si on a le talent au départ.
Antoine Rault
Mais il faut, il faut beaucoup de travail aussi. Donc non, non, non, c'est un métier et ce n'est pas mon métier. Mon métier, c'est de composer, c'est d'écrire, c'est d'inventer, d'offrir un texte, d'offrir. Et moi, j'aime me projeter dans les personnages. Et j'ai ma voix intérieure quand je vais. Quand j'écris même un roman, je l'entends. C'est une musique aussi, c'est à dire que j'entends les personnages qui me parlent, je visualise, je vis avec eux.
Antoine Rault
Ça me suffit largement. Non, non, je n'ai qu'un seul métier écrire double actualité.
Philippe Chauveau
Antoine Rault, pour cette rentrée 2022, au théâtre, au théâtre des Variétés, au scalpel. Une pièce que nous avons évoqué et puis donc en librairie, ce nouveau titre Monsieur Sénégal. Ça, c'est aux éditions Plon.
Antoine Rault
Monsieur Sénégal
Livre 00'08'08"Philippe Chauveau
Antoine Rault, votre actualité aux éditions Plon. Ce nouveau titre Monsieur Sénégal, avec cette cette belle couverture. Nous sommes en 1919, à quelques semaines du grand défilé du 14 juillet, le défilé de la Victoire et nous allons faire connaissance avec Amadou Lo, Amadou, Louis, les Guinéens. Il est venu en France avec beaucoup d'autres de ses comparses tirailleurs sénégalais.
Antoine Rault
On les appelait tous comme ça. Tirailleurs sénégalais. Alors qu'en fait ils ? Quel que soit, ce qui montre à quel point d'ailleurs ?
Philippe Chauveau
D'emblée, justement, on va en parler, on va en parler. Mais surtout, ce qui est intéressant, c'est que la guerre est passée et Amadou Lô s'est fait des amitiés. Et puis, il a rencontré ce médecin, Robert Desvaux, qui lui a plus ou moins sauvé la vie. Et puis une amitié, une amitié s'est créée. Donc effectivement, vous avez eu envie de nous parler à travers l'écriture romanesque de ces tirailleurs sénégalais, de tous ces et de tous ces jeunes hommes qui sont venus à l'armée française, notamment au premier conflit mondial.
Philippe Chauveau
Pourquoi ce sujet ? Est ce un sujet que vous portiez depuis longtemps ? Comment l'avez vous découvert et pourquoi en faire un outil romanesque ?
Antoine Rault
En fait, ce n'est pas tellement les tirailleurs sénégalais, au fond, qui m'intéressaient. C'est la question de l'identité, de la façon dont on construit son identité et celle de l'autre, et la question du regard qu'on porte sur l'autre. Alors, un des points de départ de l'idée de ce livre m'est venu en lisant. Il y a plus de 20 ans, un ouvrage, un récit de l'époque de Lucien Couturier qui s'appelait Des Inconnus chez moi.
Philippe Chauveau
À qui l'on doit la couverture.
Antoine Rault
À qui l'on doit la couverture de ce livre. C'était une artiste peintre, élève de Signac, une femme de la grande bourgeoisie. Elle avait une villa à Saint-Raphaël, sur la Côte d'Azur ou elle était pendant la guerre avec son mari, son fils et son père. Et voilà que juste au dessus de sa villa, on installe l'armée française, installe un énorme camp de tirailleurs sénégalais et donc on les mettait en hivernage.
Antoine Rault
On a l'impression que c'est un mot comme pour des animaux. Enfin, on les mettait en hivernage dans le Sud pour qui ? C'est pour qu'ils se refassent un peu une santé douce.
Philippe Chauveau
Les appréhensions des populations.
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Intervenant 2
Et donc les gens et les appréhensions des populations locales. Les préjugés étaient très forts. Donc de racisme évidemment, puisque toute la société de l'époque est nature et raciste. Raciste, c'est une chose. Ce n'est pas un jugement, c'est un fait. C'est à dire qu'on a construit. Comment est ce qu'on a légitimé la colonisation, le partage du monde en 1880 à Berlin, etc.
Antoine Rault
C'est simplement on passait notre temps à faire faire des recherches. Les scientifiques qui eux mêmes y croyaient et pouvaient y croire, cherchaient à prouver que l'intelligence d'un Blanc était largement supérieure à l'intelligence d'un Noir et d'une personne de couleur.
Philippe Chauveau
Dans le contexte de cette époque. C'est ça ? Et donc lui, c'est le couturier au début. A cette appréhension, ce courrier.
Antoine Rault
Elle, elle a les mêmes préjugés puisqu'elle a lu ces livres là.
Philippe Chauveau
Et elle les côtoyait. Finalement, elle va se rendre compte que ce sont des hommes comme les autres.
Antoine Rault
Exactement, c'est ça.
Philippe Chauveau
Donc on a compris. Le point de départ, c'est cette lecture de Lucie Couturier qui vous sert de trame pour construire ce personnage d'Amadou qui s'est fait des amis dans les tranchées. Mais la guerre est terminée et cette fraternité explose, explose un peu. Néanmoins, il a été blessé. Il a été soigné par le Robert des Mots qui s'est fortement attaché à Badou qui a fait la guerre terminée, essaye de le faire venir et le fait venir d'ailleurs dans sa bourgade de Miré en France, en Franche-Comté, qui est une bourgade fictive mais qui ressemble à bien des bourgades de cette époque là.
Philippe Chauveau
Ou Ahmadou lui aurait sans doute préféré.
Antoine Rault
Rentrer chez lui. Ça commence comme ça, voilà. Amadou raccompagne le docteur dévot au train parce qu'il était son ordonnance. En fait, Amadou a été blessé au front. Le docteur dévot était un médecin au front qui lui a donné les premiers soins et qui lui a donc sauvé la vie. Puis il l'a retrouvé. Après, il en a fait son ordonnance.
Antoine Rault
Le docteur dévot est un homosexuel refoulé en fait, qui, comme un refoulé, un homosexuel de l'époque, c'est à dire il est marié et c'est impossible d'être accepté comme homosexuel dans la société de l'époque. Par contre, il considère que ce jeune Noir, dont il dit qu'il désire en fait physiquement, lui doit tout puisqu'il lui a sauvé la vie. Et ça n'est jamais qu'un Noir.
Antoine Rault
Donc il décide, sans lui demander son avis, de l'envoyer de le faire venir chez lui, à Miré, en Franche-Comté, ou il retourne reprendre sa vie civile comme il le prendra comme chauffeur. En fait, ce qu'il veut, c'est l'avoir sous la main.
Philippe Chauveau
Il veut, il veut lui offrir une belle vie, mais sans se poser.
Antoine Rault
Sans ses actions.
Philippe Chauveau
Ça va faire très exactement. Ce qui veut dire que la plupart du. La grande partie du roman se déroulera dans cette petite bourgade de Franche-Comté, dans cette petite ville qui ressemble à bien des villes de cette époque ou Ahmadou sera le seul Noir et ou forcément, les regards des habitants seront assez assez perplexes. Il va dire qu'il va être confronté à un racisme latent.
Philippe Chauveau
Il va être confronté aussi à des gens qui lui ouvrent leurs portes. Il y a ce personnage très attachant, c'est la petite Hélène, cette gamine qui vit dans une belle propriété, qui est un peu seule. Peu à peu solitaire et qui va lui apprendre à lire et à écrire.
Antoine Rault
Oui, exactement. C'était alors elle et elle est abandonnée. Elle vit, elle vit dans son coin parce que sa mère, qui est une une jeune veuve, probablement elle n'est pas du tout maternelle. Elle s'occupe pas du tout de cet enfant et donc elle a le stade dans un château, une immense propriété, et elle court tout le temps et vit sa petite vie sauvageonne et elle s'ennuie terriblement pendant les vacances d'été.
Antoine Rault
Un jour, ils se rencontrent avec cette petite fille et elle lui propose effectivement. Au début, elle se méfie de lui. Elle a moins de préjugés. C'est un des deux personnages qui a le moins de préjugés sur lui, parce qu'en fait, elle n'est encore qu'une enfant. Et puis, elle dit qu'il a envie d'apprendre à parler et à s'exprimer correctement.
Antoine Rault
Et elle lui propose et lui dit alors Si tu veux, moi je sais déjà lire et écrire. Voilà mes cahiers, voilà mes livres. On va s'y mettre. Ce qui fait des scènes, ce qui fait des scènes.
Philippe Chauveau
Assez.
Antoine Rault
Touchantes. Mais c'est vrai que c'est un des rares personnages qui finalement se met à le considérer comme un être humain.
Philippe Chauveau
Le roman, on l'aura compris, traite de plusieurs sujets. Il y a donc ce contexte historique, cette époque des années 1919 1920, que que vous que vous dépeignez, il y a la place de ces soldats qu'on a fait venir d'Afrique, qu'on a utilisé pendant la guerre. Et puis après qu'on a un laissé à leur sort, il y a la place de la femme dans la société, il y a la place de l'homosexualité aussi dans cette société des années 1920, la place de l'enfance avec le personnage de la petite Hélène.
Philippe Chauveau
Il y avait eu, on s'en souvient, la gloire des vivants et la traversée, la danse des vivants, la danse des vivants et la traversée du paradis.
Antoine Rault
Qui est exactement la même période. Voilà 919 920.
Philippe Chauveau
Est ce qu'il y avait cette volonté de poursuivre l'histoire, sachant qu'entre temps il y a eu de belles ambitions ? Là, nous étions dans de grandes périodes, des années, les années 80. Est ce que celui ci prend place dans une chronologie ou finalement est ce le hasard ?
Antoine Rault
En fait, c'est le hasard. Je crois fondamentalement, parce que ce sujet, qui était beaucoup plus la question de l'identité, du racisme, de la. De la façon de penser le regard de l'autre. Je crois que quand on se place du point de vue d'un personnage, c'est ça qui est intéressant. J'ai essayé de me placer du point de vue de différents personnages, puisque je donne aussi le regard des autres sur lui.
Antoine Rault
Mais j'ai essentiellement raconté l'histoire. L'histoire avance de son à son point de vue. C'est son regard à lui qui évolue. Sa place ne sera plus non plus le roman. On va évoquer ça à la fin là bas, c'est à dire en Afrique ou les autres ont vécu une autre histoire que la sienne. Lui, il est un. Il se retrouve finalement par cette histoire là, déraciné mais ouvert, comme toute personne qui a pu justement changer de regard sur les choses.
Antoine Rault
Le destin qui a conduit, ce n'est pas son choix nécessairement. Mais cet homme va devoir se reconstruire, se réinventer d'une autre façon. Ni dans le schéma initial, qui est celui d'un Africain dans les colonies à l'époque, ni en tant que Français qu'il n'est pas ou qui ne peut pas être encore en tout cas.
Philippe Chauveau
Voilà un livre formidable, une belle réussite qui nous raconte plusieurs histoires. Plusieurs histoires ont une portée par une belle écriture très romanesque. C'est votre actualité ? Antoine Rault Monsieur Sénégalais, vous êtes publié aux éditions Plon.
Antoine Rault
Merci beaucoup, merci à vous.