Retenez bien son nom. Miguel Bonnefoy n'a sans doute pas fini de faire parler de lui. En 2013, il reçut le prix du jeune écrivain de langue française pour sa nouvelle « Icare ». Mais c'est avec ce premier roman qu'il se fait réellement connaître « Le voyage d'Octavio », sélectionné pour le Goncourt des lycéens, le prix Emmanuel Roblès ou le prix de la Vocation qu'il vient de remporter.
Fils d'un écrivain chilien et d'une mère diplomate vénézuélienne, Miguel Bonnefoy connait le pouvoir des mots et de la littérature....
Le rêve du jaguar de Miguel Bonnefoy - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :
Bonjour Miguel Bonnefoy. J'ai l'impression que vous vivez une belle aventure avec « Le voyage d'Octavio ». C'est votre premier roman mais ce n'est pas votre premier livre. On aura l'occasion de revenir dessus et vous êtes publié chez Rivages. Finalement, vous êtes tombé dans la littérature quand vous étiez petit ! Votre mère est diplomate vénézuélienne et votre père est un écrivain chilien, cela veut-il dire que les livres ont toujours fait partie de votre univers ?
Miguel Bonnefoy :
Ma mère, en...
Le rêve du jaguar de Miguel Bonnefoy - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :
Quelle drôle d'histoire que celle d'Octavio ! C'est une sorte de roman picaresque puisque Octavio est un jeune garçon analphabète qui va voir le monde s'ouvrir à lui. Lorsqu'il rencontre cette belle Venezuela, il rencontre la magie des mots, de l'écriture et de la lecture et sa vie va s'en trouver bouleversée. Je dis roman picaresque, parce que Octavio va rencontrer tout un tas de personnages. Alors il y a les personnages et il y a Le personnage. Une question Miguel Bonnefoy, le héros c'est Octavio ou c'est...
Le rêve du jaguar de Miguel Bonnefoy - Livre - Suite
J'ai beaucoup aimé le roman de Miguel Bonnefoy, par l'histoire du Venezuela qu'on connait moins et par cette écriture poétique qu'ont les gens d'Amérique du Sud. Il l'a écrit en français certes, mais il a cette poésie dans son écriture qui fait qu'on part dans un voyage initiatique, comme un Candide de Voltaire, sur les traces d'un pays qu'on connait peu et qui est comme un jardin d'Eden à découvrir. Les points forts de ce roman sont une écriture à la fois courte et foisonnante, très poétique, très dense. Il a une...
Le rêve du jaguar de Miguel Bonnefoy - L'avis du libraire - Suite
Miguel Bonnefoy
Le voyage d'Octavio
Présentation 1'42Retenez bien son nom. Miguel Bonnefoy n'a sans doute pas fini de faire parler de lui. En 2013, il reçut le prix du jeune écrivain de langue française pour sa nouvelle « Icare ». Mais c'est avec ce premier roman qu'il se fait réellement connaître « Le voyage d'Octavio », sélectionné pour le Goncourt des lycéens, le prix Emmanuel Roblès ou le prix de la Vocation qu'il vient de remporter.
Fils d'un écrivain chilien et d'une mère diplomate vénézuélienne, Miguel Bonnefoy connait le pouvoir des mots et de la littérature. Sillonnant le monde, installé aujourd'hui à Paris, il reste néanmoins fondamentalement attaché à sa terre d'origine, le Venezuela. On ne s'étonnera donc pas que l'auteur ait créé ce personnage d'Octavio, analphabète, qui, grâce à une femme, va à son tour découvrir l'alphabet et voir s'ouvrir devant lui un nouveau monde insoupçonné.
Quant au Venezuela, fantasmé, avec ses ombres et ses lumières, il n'est pas une simple toile de fond mais bien un personnage à part entière, voire même le héros de ce roman plein de poésie, d'amour et de violence.
Roman picaresque au cours duquel Octavio croisera une multitude d'êtres surprenants, le livre de Miguel Bonnefoy séduit aussi par le style, l'écriture, la richesse du vocabulaire, le travail de la syntaxe, tout un univers littéraire qui fait tellement défaut aujourd'hui à bon nombre de jeunes auteurs.
Je laisse la conclusion au romancier Alain Mabanckou qui écrit à propos de Miguel Bonnefoy,
« Le Voyage d'Octavio » devient, de page en page, un hymne à la condition humaine, une réécriture du monde qui redonne à la littérature tout son pouvoir.
« Le voyage d'Octavio » de Miguel Bonnefoy est publié chez Rivages.
Miguel Bonnefoy
Le voyage d'Octavio
Portrait 5'47Philippe Chauveau :
Bonjour Miguel Bonnefoy. J'ai l'impression que vous vivez une belle aventure avec « Le voyage d'Octavio ». C'est votre premier roman mais ce n'est pas votre premier livre. On aura l'occasion de revenir dessus et vous êtes publié chez Rivages. Finalement, vous êtes tombé dans la littérature quand vous étiez petit ! Votre mère est diplomate vénézuélienne et votre père est un écrivain chilien, cela veut-il dire que les livres ont toujours fait partie de votre univers ?
Miguel Bonnefoy :
Ma mère, en plus d'être diplomate est attachée culturelle, elle avait pour mission de représenter la culture vénézuélienne à l'étranger. On avait souvent à la maison, non seulement des ministres de la culture mais également des auteurs et des poètes. Mon père, lui, écrivait en effet des livres et du coup, il était ce bel homme qui racontait des histoires à table. Donc quelque part, oui, la littérature a toujours fait partie de mon enfance.
Philippe Chauveau :
Mais cela aurait pu vous effrayer. Au contraire, vous avez eu envie d'en faire votre métier.
Miguel Bonnefoy :
Oui, peut-être d'abord par mimétisme, la transmission du savoir commence d'abord par l'imitation et j'ai sans doute voulu imiter mon père. Après, je pense que l'on écrit parce qu'on ne sait rien faire d'autre ! Quand je n'écris pas je n'arrive pas à respirer…
Philippe Chauveau :
Vous êtes installé en France depuis un peu moins de trois ans, mais vous avez pas mal voyagé, en Amérique du sud et un peu partout dans le monde. Quel regard portiez-vous sur la France et la culture littéraire française avant d'arriver ? Et quel regard portez-vous aujourd'hui ?
Miguel Bonnefoy :
Comme j'étais fils de diplomate, j'ai dû étudier dans des lycées français à l'étranger, ces lycées tentent, comme ils peuvent, de faire perdurer le rayonnement de la langue française à l'étranger. Il y a donc cette langue d'art qui est conservé par les professeurs et qui n'est pas souillée par la rue française ou les béquilles contemporaines qui peuvent apparaître. Ils essayent aussi de donner une nouvelle vision de la France. Par exemple, au Venezuela, au lieu d'étudier l'histoire de la Libération, on étudie le Versailles de Louis XIV. Donc la France est restée dans l'imaginaire comme le pays à atteindre. Puis, en arrivant ici, comme Ulysse arrive à Ithaque, je me suis rendu compte que la France n'est pas si grande et c'est surement parce que l'on grandit soi-même en chemin.
Philippe Chauveau :
Quels sont les auteurs qui, peut-être, vous ont donné envie d'écrire, auteurs français mais aussi sud-américains peut-être ?
Miguel Bonnefoy :
Je dois avouer qu'après avoir fini « Cent ans de solitude » de Garcia Márquez, j'ai ressenti cette sensation confuse, que je n'ai plus jamais ressentie, qui était de la jalousie envers un auteur. Je me disais « comment est-ce possible d'écrire une chose aussi belle ? »… De la même manière, Márquez a 20 ans lorsqu'il lit «La métamorphose » de Kafka, ce roman où l'homme se transforme en insecte ; il s'était dit «il triche, il ne peut pas faire ça en littérature ». Eh si, tout est permis en littérature ! De la même manière en lisant « Cent ans de solitudes », je me suis dit que tout était permis, que si des personnages peuvaient s'envoler ou disparaître, alors oui je pouvaix transformer un personnage en statue de bois.
Philippe Chauveau :
Que ressentez-vous lorsque vous écrivez ? Est-ce le même Miguel Bonnefoy qui est devant moi, ou est-ce un autre personnage ?
Miguel Bonnefoy :
Eh bien, peut-être que je suis un peu moins bavard… Et j'ai senti la nécessité biologique de rendre hommage au Venezuela. Quand je suis arrivé en France, je me suis senti presque coupable d'être ici, de ne pas être là-bas, dans la Révolution à lutter pour le combat social. En écrivant « Octavio » et d'autres textes, j'ai senti comme si j'avais une dette envers le Venezuela.
Philippe Chauveau :
« Le voyage d'Octavio » séduit les critiques littéraires, les libraires, les lecteurs. Vous avez reçu le prix de la Vocation il y a quelques semaines, comment vivez-vous tout cela ?
Miguel Bonnefoy :
Je le vis avec humilité et modestie, ceci est un pied à l'étrier. J'ai encore dans mon cœur beaucoup de choses à dire ! Je dois trouver le silence et la solitude pour dire ces choses, et si je remercie les personnes qui m'ont aidé, je sais que je ne suis qu'à l'aube de ma plume et que je dois rester concentré.
Philippe Chauveau :
Comment vous imaginez-vous dans cinq ans, dans dix ans, dans vingt ans ?
Miguel Bonnefoy :
Je m'imagine en écrivant des livres meilleurs, je dis sincèrement que pour l'instant j'écris des livres, et je fais de la littérature. J'espère un jour pouvoir effleurer l'écriture, mais ça c'est une autre histoire !
Philippe Chauveau :
« Je fais de la littérature »… Miguel Bonnefoy, votre actualité aux éditions Rivages « Le voyage d'Octavio ».
Miguel Bonnefoy
Le voyage d'Octavio
Livre 5'42Philippe Chauveau :
Quelle drôle d'histoire que celle d'Octavio ! C'est une sorte de roman picaresque puisque Octavio est un jeune garçon analphabète qui va voir le monde s'ouvrir à lui. Lorsqu'il rencontre cette belle Venezuela, il rencontre la magie des mots, de l'écriture et de la lecture et sa vie va s'en trouver bouleversée. Je dis roman picaresque, parce que Octavio va rencontrer tout un tas de personnages. Alors il y a les personnages et il y a Le personnage. Une question Miguel Bonnefoy, le héros c'est Octavio ou c'est le Venezuela ?
Miguel Bonnefoy :
Je pense que le héros principal est le Venezuela, le pays. Encore une fois, à mon retour du Venezuela, il m'a semblé important de décrire les métiers que j'avais vu là-bas, et je voulais donner une autre image du Venezuela, que l'on décrit comme un pays de délinquance, de plage ou de pétrole. Il s'y passe des belles choses, on a notre identité, on a des traditions et il me semblait important de les dire ici, en Français.
Philippe Chauveau :
Faire de ce personnage d’Octavio, quelqu'un de pauvre, d'analphabète qui n'a jamais rencontré l'écriture, c'est un petit peu tout l'inverse de vous. C'est justement parce que vous parliez de culpabilité par rapport au Venezuela que vous avez choisi ce personnage ?
Miguel Bonnefoy :
En effet, je ne l'avais pas vu de cette façon inverse, j'aime bien cette idée, je la trouve assez belle ! Moi, je voulais faire pour mon premier livre, une ode à l'écriture. En écrivant sur un analphabète, il s'agissait qu'il aille écrire un livre, pas un livre matériel, mais une sorte de ré-écriture du territoire et de l'histoire du pays. Et que lui, Octavio, représente par sa force et son courage, l'écriture de tout un peuple.
Philippe Chauveau :
Octavio va rencontrer beaucoup de personnages, et être confronté à plusieurs thématiques, l'amour avec cette belle Venezuela, la religion avec cette bande de brigands qui s'abritent dans une église désaffectée, mais il y a aussi le théâtre, la nature. Vous aviez envie d’emmener votre lecteur dans un Venezuela un peu fantasmé ?
Miguel Bonnefoy :
C'est exactement ça ! L'idée de prendre le lecteur par la main, un lecteur français, et puis l'emmener non seulement dans la découverte naturelle du pays mais également dans celle de la ville. Par exemple, le théâtre dont je parle est le théâtre principal de Caracas, les forêts dont je parle sont des forêts peu connues au Venezuela, mais donc c'était encore une manière de rendre hommage.
Philippe Chauveau :
Vous nous dites que vous avez voulu rendre hommage au Venezuela, qu'il y a aussi une sorte de dette et vous nous dites aussi que ce livre est à destination d'un public français. Comment serait-il accueilli, si le livre était traduit au Venezuela ?
Miguel Bonnefoy :
Je me pose sincèrement la question… Je veux croire que le Venezuela est un pays intelligent et qu'il comprendra que je me suis permis parfois des libertés pour ne pas copier la réalité, puisque je ne faisais pas un guide touristique, mais exprimer la réalité. Et quand on exprime la réalité, on passe par des filtres de fiction.
Philippe Chauveau :
Vous le savez Miguel Bonnefoy, votre roman a séduit par l'intrigue, par les personnages mais ce que l'on aime aussi c'est votre écriture, votre style, le choix des mots, le vocabulaire. Vous écrivez comme on n’écrit plus aujourd'hui, vous êtes conscient de cela ?
Miguel Bonnefoy :
Je le prends comme un compliment !
Philippe Chauveau :
Vous pouvez, c'est dit dans ce sens en tout cas ! Il y a une poésie dans votre écriture, et un choix dans la syntaxe qu'on ne retrouve pas ailleurs.
Miguel Bonnefoy :
Ce n'est que du travail. Par exemple, en gardant toutes les proportions, pour écrire « Bouvard et Pécuchet », Flaubert a lu presque 1700 livres. De la même manière pour « Octavio », chaque page renferme toute une bibliothèque derrière elle. Donc, si il y a de la précision, si il y a de la poésie, c'est parce que j'ai beaucoup lu derrière et je me suis permis de jouer avec les mots pour pouvoir me démarquer.
Philippe Chauveau :
Je me permets juste de lire une phrase que j'ai trouvée très belle, parmi d'autres, c'est le premier baiser d'Octavio et de Venezuela : « Elle éprouva aussitôt le désir de faire naufrage avec lui. Tout les opposait. Et pourtant, sans le comprendre, elle déchiffrait peut-être à ses côtés un alphabet qu'elle ignorait, une promesse primordiale, comme sur la pierre, là où rien ne précède et où, cependant, tout semble commencer. »
Vous avez voulu rendre hommage au Venezuela dans votre premier roman. Demain, allez-vous changer complètement d'univers ou, au contraire, voulez-vous continuer à emmener le lecteur à la découverte de cette région du monde que l'on connait si mal ?
Miguel Bonnefoy :
Je pense que pour trouver du pétrole, il faut toujours creuser le même trou, alors oui, je pense que pour l'instant ; je vais écrire sur le Venezuela.
Philippe Chauveau :
« Le voyage d'Octavio », voilà un voyage dont on ne sort pas indemne, un voyage plein de fureur, de poésie et d'amour. C'est un très beau roman que je vous recommande vivement. Miguel Bonnefoy, vous êtes publié aux éditions Rivages, merci beaucoup !
Miguel Bonnefoy
Le voyage d'Octavio
L'avis du libraire 1'34J'ai beaucoup aimé le roman de Miguel Bonnefoy, par l'histoire du Venezuela qu'on connait moins et par cette écriture poétique qu'ont les gens d'Amérique du Sud. Il l'a écrit en français certes, mais il a cette poésie dans son écriture qui fait qu'on part dans un voyage initiatique, comme un Candide de Voltaire, sur les traces d'un pays qu'on connait peu et qui est comme un jardin d'Eden à découvrir. Les points forts de ce roman sont une écriture à la fois courte et foisonnante, très poétique, très dense. Il a une glorification de la nature qui est intéressante et qui apporte à la littérature.
Je recommande ce livre avec plaisir à mes clients, pour des gens qui aiment la littérature, qui aiment voyager, qui aiment lire autre chose que de la littérature française classique. C'est vraiment un roman contemporain mais comme c'est une fable, on retrouve des sources de littérature que l'on a plus l'habitude de lire et c'est très agréable.