Attention, jeune talent à suivre !Maruschka Le Moing fait partie de cette nouvelle génération d’écrivains qui secoue la littérature française par le sujet et les thèmes abordés mais aussi par la qualité et l’originalité de l’écriture. Surtout, ces nouveaux auteurs n’ont pas peur de dérouter, d’interpeller, de bousculer les lecteurs que nous sommes.Marushka Le Moing a en plus la particularité d’avoir plusieurs cordes à son arc. Déjà comédienne et artiste lyrique, c’est donc maintenant vers l’écriture...
Aimez-vous les uns les autres de Maruska Le Moing - Présentation - Suite
Philippe Chauveau
Bonjour Maruska. Merci d'avoir répondu à notre invitation pour venir présenter ce qui est votre premier livre, votre premier roman chez Gallimard, Aimez-vous les uns les autres. On va faire connaissance parce que vous avez un parcours assez atypique et vous êtes, non pas une touche à tout, disons que vous avez plusieurs cordes à votre arc. Effectivement, vous êtes dans le domaine culturel en tant que chanteuse lyrique et en tant que comédienne, aujourd'hui en tant que romancière. Et paradoxalement, c'est assez...
Aimez-vous les uns les autres de Maruska Le Moing - Portrait - Suite
Philippe Chauveau
Voilà un titre qui ne laisse pas indifférent. Aimez-vous les uns les autres, et puis il y a aussi ce bandeau choisi par votre éditeur, avec ce dessin-là sur la couverture. C'est votre premier roman. On va parler à la fois de l'intrigue et puis on va parler de votre écriture. Parce que ce sont bien ces deux éléments qui interpellent lorsque l'on se plonge dans ce roman, on va faire connaissance avec Anna. Anna, c'est une jeune fille d'aujourd'hui. Elle est interprète en indépendant. Elle travaille de temps en...
Aimez-vous les uns les autres de Maruska Le Moing - Livre - Suite
Maruska Le Moing
Aimez-vous les uns les autres
Présentation 00'02'54"Attention, jeune talent à suivre !
Maruschka Le Moing fait partie de cette nouvelle génération d’écrivains qui secoue la littérature française par le sujet et les thèmes abordés mais aussi par la qualité et l’originalité de l’écriture. Surtout, ces nouveaux auteurs n’ont pas peur de dérouter, d’interpeller, de bousculer les lecteurs que nous sommes.
Marushka Le Moing a en plus la particularité d’avoir plusieurs cordes à son arc. Déjà comédienne et artiste lyrique, c’est donc maintenant vers l’écriture qu’elle se tourne avec ce premier roman « Aimez-vous les uns les autres » publié chez Gallimard.
Pourtant, si la fibre artistique semble innée chez la jeune femme, elle se révèle tardivement, alors qu’elle suit ses études dans une grande école de commerce et s’aperçoit que ce monde ne lui correspond pas vraiment. Depuis, c’est donc dans la création artistique que Maruschka Le Moing trouve son épanouissement. Elle a même créé sa propre compagnie mêlant subtilement le texte théâtral et le chant lyrique.
Mais revenons à ce premier roman. Derrière ce titre évocateur et ce bandeau plein de douceur et de fragilité avec cet animal sauvage perdu dans les bois, le livre de Marushka Le Moing est un choc.
Nous y rencontrons Anna, une jeune femme d’aujourd’hui, interprète et traductrice, qui aime le confort douillet de son petit appartement rempli de livres, protection contre un monde dans lequel elle a du mal à trouver sa place. La vie d’Anna est rythmée par ses rendez-vous sensuels avec David, séduisant radiologue avec lequel elle entretient une relation amoureuse torride basée essentiellement sur le sexe. Et puis, il y a sa mère, qui a perdu toute autonomie et vit dans une institution. Anna s’est mise en tête de la ramener chez elle pour y finir ses jours. Mais derrière cette idée louable se cache une raison bien enfouie dans la mémoire d’Anna.
Avec des chapitres courts dans lesquels l’héroïne est la propre narratrice de son histoire, la romancière nous entraine dans les méandres d’une histoire familiale faite de non-dits, de violence enfouie, de secrets cachés, de rancunes et de rancœurs. Et en parallèle, ces scènes de sexe entre Anna et David, à l’écriture sèche, dénuée de sentiments, entre soumission et déraison, sont le pendant du plan méthodique et pervers d’Anna pour ramener sa mère chez elle. Et en filigrane, une folie qui s’installe sournoisement.
L’écriture est brillante et provocatrice, l’intrigue est troublante et dérangeante.
Marushka Le Moing n’a sans doute pas fini de faire parler d’elle.
« Aimez-vous les uns les autres » de Marushka Le Moing est publié chez Gallimard.
Maruska Le Moing
Aimez-vous les uns les autres
Portrait 00'06'47"Philippe Chauveau
Bonjour Maruska. Merci d'avoir répondu à notre invitation pour venir présenter ce qui est votre premier livre, votre premier roman chez Gallimard, Aimez-vous les uns les autres. On va faire connaissance parce que vous avez un parcours assez atypique et vous êtes, non pas une touche à tout, disons que vous avez plusieurs cordes à votre arc. Effectivement, vous êtes dans le domaine culturel en tant que chanteuse lyrique et en tant que comédienne, aujourd'hui en tant que romancière. Et paradoxalement, c'est assez tardivement que vous arrivez dans le milieu artistique puisque vous avez fait des études dans une grande école de commerce. Alors expliquez-nous, comment est-ce arrivé tout ça ?
Maruska Le Moing
La grande école de commerce est arrivée par académisme. J'étais dans un bon lycée, j'ai fait une bonne prépa et donc je suis rentrée dans une grande école de commerce.
Philippe Chauveau
On vous pousse un peu là-dedans ?
Maruska Le Moing
Pas réellement. Mes parents n'étaient pas très investis là-dedans et j’ai fait ce qu'on m'a dit et je me suis retrouvée dans une grande école de commerce à l'Essec et je crois que c'était pas fait pour moi. Et l'avantage de ces écoles, c'est que ça me laisse assez libre, en tout cas, celle-ci, donc j'étais assez libre de faire plein de choses que j'ai fait. J'en ai profité pour voyager, pour rencontrer des gens, pour faire du théâtre et puis de l'opérette et c'était très évident que c'était beaucoup plus ça que j'allais faire de ma vie.
Philippe Chauveau
Alors que curieusement, lorsque vous étiez adolescente, vous n'aviez pas eu l'opportunité de chanter, de monter sur scène ?
Maruska Le Moing
Non, non, ça ne s'était pas présenté vraiment. Alors je chantais dans une chorale quand j'étais petite. C'était une chorale anglicane pour garçons. Et je n'étais pas anglicane et pas un garçon, donc il y avait quelque chose qui n'était pas complètement intuitif. Et c'est venu beaucoup plus tard.
Philippe Chauveau
Et vous avez découvert le plaisir de transmettre l'art, en quelque sorte, en étant sur scène ?
Maruska Le Moing
Oui, alors dans un premier temps, je pense, c'était beaucoup plus nombriliste, plus personnel. Parce que, avant même de transmettre… Maintenant, c’est plus intéressant, l'idée de transmettre je trouve, mais dans la première démarche c’était la joie intense d'être sur scène, de vivre une vie qui est plus forte.
Philippe Chauveau
Alors je précise, parce que vous avez laissé entendre que cette grande école de commerce n'était pas faite pour vous. Néanmoins, vous en sortez quand même avec…
Maruska Le Moing
Diplômée !
Philippe Chauveau
Voilà, avec un vrai bagage. Excusez du peu. Mais aujourd'hui, c'est bel et bien dans cet univers artistique que vous avez envie de vous impliquer. Vous avez monté votre propre compagnie pour diffuser, là encore, l'art lyrique, vous faites vos premiers pas de comédienne. Et puis il y a l'écriture. Vous nous expliquez que vous avez découvert le plaisir de la scène. A contrario, lorsque l'on devient romancière, on est un peu seule devant cette page blanche.
Maruska Le Moing
C’est ça qui est fantastique aussi.
Philippe Chauveau
Alors pourquoi cette envie de l'écriture ?
Maruska Le Moing
Comment c'est venu ? C'est venu je pense d'abord par la lecture.
Philippe Chauveau
Vers quelle littérature alliez-vous ?
Maruska Le Moing
Justement, en fait, je pense qu'au départ, tous les classiques en fait, beaucoup la littérature russe aussi, qui m'a beaucoup plue. Ce qui a été un élément qui m'a donné envie d'écrire, c'est que, au bout d'un moment, j'ai touché du doigt la littérature contemporaine. Mon père m'a donné un ou deux romans à lire. Je me suis dit, « Oh, c'est vraiment bien ».
Philippe Chauveau
Et alors, quel lien faites-vous ? Puisqu’on l’a dit, vous êtes aussi comédienne, vous êtes aussi artiste lyrique. Quel lien faites-vous entre ces différentes prestations artistiques ? Y a-t-il des passerelles ou au contraire, est-ce qu’à chaque fois, c'est une Maruska Le Moing différente ?
Maruska Le Moing
Je pense qu'il y en a pas énormément pour être honnête. Après, je pense que le travail de chanteuse et de comédienne joue, enfin a joué pour moi, pour l'écriture, parce que je pense que j'avais une grosse réticence à l'égard de l'écrit, de la littérature qui me paraissait sérieuse et intellectuelle. Et moi, j'ai fait des études économiques et commerciales, donc je ne suis pas… Je n'ai pas grandi dans cette espèce d'admiration, de mythe de l'écrivain démiurge qui crée la beauté. Et j'avais une espèce de méfiance à l'égard de ça, ce qui me paraissait un peu intello, un peu prétentieux.
Philippe Chauveau
Le chant lyrique et le théâtre vous semblaient plus accessibles ?
Maruska Le Moing
Beaucoup plus directs ! Parce qu’on est sur scène. C’est physique en fait. C'est vraiment une pratique physique.
Philippe Chauveau
Vous aviez l'impression que la littérature était une sorte de tour d'ivoire à laquelle vous n’aviez pas accès.
Maruska Le Moing
Oui, un certain raffinement, un peu intellectuel. Et je pense que, c'est après y avoir réfléchi. Mais je pense que le fait de chanter les mots ou de les dire et d'y prêter attention, quand on chante un morceau lyrique, on répète le même mot une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, parfois cinq. Ça veut dire qu'il faut le charger ce mot, il faut y mettre une intention, une texture, une densité, une couleur. Et la musique aide à faire ça. Et pareil quand on joue. Les mots sont plus denses. Enfin, ça paraît un peu tarte. Mais il y a quelque chose de plus habité et je pense que ça m'a fait changer de regard sur les mots et sur l'écriture.
Philippe Chauveau
Qu'avez-vous ressenti lorsque vous avez vu pour la première fois votre nom dans la vitrine d'une librairie ? Sur la couverture de Gallimard, dans la Blanche. De l'appréhension, un enthousiasme, une jubilation ?
Maruska Le Moing
J'étais contente bien sûr. Après, moi, je ne suis pas très attachée à l'objet livre. Je le lis sur mon téléphone, donc je n’ai ce truc du livre.
Philippe Chauveau
Personne n'est parfait vous savez.
Maruska Le Moing
Je sais. Je ne devrais peut-être pas le dire. En revanche, ce qui a été vraiment un grand plaisir, c'est de rencontrer Maud Simonnot, qui est mon éditrice. Et j'avais l'impression d'avoir été comprise. Et ça, c'était une reconnaissance parce que c'est une femme que j'apprécie beaucoup, qui est intelligente, et le fait qu'elle puisse trouver de l'intérêt à ce manuscrit. Ça, ça a été un grand, grand bonheur. Peut-être plus ça à la limite que l'objet livre.
Philippe Chauveau
Demain, quels sont les projets ? L'écriture va-t-elle prendre une place prépondérante par rapport à l'art lyrique, par rapport au théâtre ? Vous voulez continuer à mettre sur un même pied d'égalité ces trois diffusions artistiques ? Quels sont vos projets ?
Maruska Le Moing
Qui sait ? Enfin, mes projets… Si j’en ai. J'ai envie de continuer à chanter et à jouer. Ça, c'est certain. De continuer à écrire, je travaille sur quelque chose. Après, je trouve que le grand bonheur que j'ai eu à écrire ça, c'est que ça répond à aucune demande et à aucune pression. Tout le monde se fiche que vous écriviez un premier roman, que vous êtes en train de l'écrire. Après, ça peut plaire à certaines personnes après, donc c’est bien. Mais au début, il y a une démarche qui est très libre. Et ça, j'ai trouvé ça génial. Et cette liberté est très, très précieuse.
Philippe Chauveau
Alors gardez précieusement cette liberté et continuez à nous la faire partager avec enthousiasme. C'est votre premier livre, Aimez-vous les uns les autres. Vous êtes publiée chez Gallimard.
Maruska Le Moing
Aimez-vous les uns les autres
Livre 00'07'53"Philippe Chauveau
Voilà un titre qui ne laisse pas indifférent. Aimez-vous les uns les autres, et puis il y a aussi ce bandeau choisi par votre éditeur, avec ce dessin-là sur la couverture. C'est votre premier roman. On va parler à la fois de l'intrigue et puis on va parler de votre écriture. Parce que ce sont bien ces deux éléments qui interpellent lorsque l'on se plonge dans ce roman, on va faire connaissance avec Anna. Anna, c'est une jeune fille d'aujourd'hui. Elle est interprète en indépendant. Elle travaille de temps en temps pour les Nations unies. Elle est un peu à la recherche de boulot. Elle ne se pose pas trop de questions sur son métier. Elle s'en pose peut-être plus que sur sa vie sentimentale puisqu'elle partage des jeux sexuels assez torrides avec un homme dont on va parler. Qui est-elle, cette fameuse Anna ? Comment naît-elle dans votre imagination ?
Maruska Le Moing
C’est une jeune femme qui effectivement vit de façon un peu solitaire parce qu'elle a ce métier de traductrice qui lui permet de ne pas trop fréquenter le monde, de rester chez elle dans son deux pièces parisien et d'être entourée de livres et donc de s'isoler un peu de la vie.
Philippe Chauveau
En tout cas s'isoler de la vie des autres.
Maruska Le Moing
La vie des autres, oui, oui. Et puis, on ne sait pas grand-chose de ce qu'elle fait dans le quotidien, de ses amis. Mais précisément, comme on n'en voit pas, on se dit qu'il n’y en a pas. En tout cas, c'est comme ça que je l’ai imaginé. Et elle rencontre, alors on n'a pas la rencontre. Mais en tout cas, elle a une relation avec un homme qui s'appelle David. Une relation assez violente, une relation sexuelle assez violente.
Philippe Chauveau
Il fait un métier qui n'est pas anodin.
Maruska Le Moing
Il est cardiologue.
Philippe Chauveau
Les histoires de cœur, il en est fortement question.
Maruska Le Moing
Oui, mais c'est des histoires de cœur qui ne sont pas des bleuettes. C'est pas des histoires de cœur romantique tel qu'on s'y attend. Effectivement, il est cardiologue, mais ce qu'elle vient chercher chez lui, ce n'est pas du tout des histoires de cœur, c'est uniquement des histoires… En fait, une dimension sexuelle très intense qui, à mon avis, dans la façon dont moi je l'ai imaginée, ce n'est pas sexuel, en fait, c'est autre chose qu'elle vient chercher. C'est une espèce d'intensité, une grande violence qui la réveille en un sens ou qui la chamboule et qui fait qu’en se plongeant dans cette violence qu'elle vit avec lui, elle va se réveiller, réagir et que beaucoup de souvenirs vont revenir à son esprit.
Philippe Chauveau
C'est un peu comme s'il y avait deux Anna, celle qui est dans les livres, celle qui est dans ses travaux de traduction et cette autre femme qui se donne à ce cardiologue. Elle se donne corps et âme parce qu'elle n'est quasiment plus la même lorsqu'elle est avec lui. Et puis, il y a aussi un troisième personnage qui ne parle pas beaucoup mais qui est bel et bien là, c'est la mère. La mère d'Anna.
Maruska Le Moing
Alors la mère d'Anna, on ne la fréquente que lorsqu'elle ne peut plus parler. Donc, en fait, on la connaît à travers le regard d'Anna et à travers la façon dont Anna se souvient d'elle par pleins de flashbacks de l'enfance. Sa mère est malade, elle est placée en institution. Et Anna, dans mon esprit, c'est par cette rencontre avec David, par cette relation très violente qu'elle a avec cet homme qu'elle décide de renouer avec la violence qu'elle a vécue, elle, dans son passé, et donc de renouer avec sa mère.
Philippe Chauveau
On va comprendre très vite qu'il y a beaucoup de non-dits entre Anna et sa mère, qu'il y a sans doute des secrets de famille inavoués, qu'il y a sans doute aussi une violence, une violence cachée et peut-être une sorte de vengeance qui ne dit pas son nom dans cette envie de récupérer sa mère chez elle, sa mère qui ne peut plus rien dire, qui ne peut plus s'opposer aux volontés de sa fille lorsqu'elle décide de la ramener chez elle.
Maruska Le Moing
Très certainement. Très certainement une vengeance et une espèce de jouissance aussi parce que sa mère est complètement impotente. Enfin, elle ne peut pas bouger, elle ne peut pas s'exprimer. Elle est dans un état de faiblesse intense.
Philippe Chauveau
Et d'ailleurs, on fait bien comprendre à Anna que c'est surréaliste de vouloir la reprendre chez elle.
Maruska Le Moing
Oui, mais elle le fait tout de même. C’est ça qui est bien avec la littérature. Et en même temps, alors oui, une violence, une vengeance dans le rapport avec sa mère qu'elle accueille chez elle dans cet espèce de huis clos. Et en parallèle, moi je trouve beaucoup d'amour aussi, mais un amour et une tendresse qui peuvent naître parce qu'elle peut imaginer tout ce qu'elle fait, parce que sa mère ne parle plus et à sa mère, si.
Philippe Chauveau
On ne va pas aller plus loin dans l'intrigue, parce qu’il y a un moment, on va comprendre pourquoi il y a tout cela. Le sujet est fort, l'intrigue est finement amenée. Et puis il y a aussi votre écriture qui ne laisse pas indifférent. Des chapitres courts, des chapitres parfois très violents, des scènes sexuelles qui ne cachent rien avec aucune censure, aucun tabou. Qu'aviez-vous envie de transmettre au lecteur ? Vous vouliez que le lecteur soit un peu dérangé justement, un peu un peu troublé ?
Maruska Le Moing
Oui, parce que moi, j'aime bien l'être quand je lis. Pas systématiquement. Et il n'y a pas que ça. Mais on parlait d'inspiration littéraire tout à l'heure. Oui, dans les livres qui me plaisent, il y a des livres qui sont un peu rudes, aussi parce que ça existe dans la vie. Et puis je trouve que par conséquent, les éclats de lumière dans la rudesse, sont d'autant plus lumineux.
Philippe Chauveau
Il y a plusieurs temps, il y a la narratrice. Il y a aussi certains passages qui sont en italique, il y a assez peu de dialogues. Finalement, il y en a, mais ce n'est pas ce qui occupe la majeure partie de votre écriture. Comment avez-vous travaillé justement cette écriture ? Est-ce que vous vous y êtes reprise à plusieurs fois ? Ou au contraire, est-ce que votre plume a coulé très facilement pour ce premier roman ?
Maruska Le Moing
Oh, je crois que j'ai une méthode déplorable. J'ai écrit beaucoup, j'ai tout jeté, j'ai récrit, j'ai rejeté. Cassez court. C'est un livre assez court, condensé.
Philippe Chauveau
Court mais intense.
Maruska Le Moing
Oui, oui, mais c'était très long au début. Et puis j'ai élagué parce qu’il y avait des choses qui n’étaient pas nécessaires.
Philippe Chauveau
C'était la volonté, justement, d'être très percutante. Anna est un personnage auquel à la fois on s'attache. Et en même temps, parfois, on ne va pas la détester, mais on se dit pourquoi agit-elle comme ça ? Elle est assez déroutante. Et ça, pour vous, c'est un peu l'image de la femme d'aujourd'hui ?
Maruska Le Moing
Ca, je ne saurais pas dire. Mais en tout cas, les gens ne sont pas gentils ou méchants. Ils sont un peu des deux, parce que parce que c'est souvent comme ça, je trouve. Parce que même dans la façon dont on se conduit avec les autres et dans la façon dont on souhaite donner ou non de l'amour, d’où la référence au titre, ce n'est pas si simple. Et donc, j'avais envie que ce ne soit pas juste une victime. Pourtant, par certains aspects, c'est une victime d'une enfance un peu rude. Et que ce ne soit pas juste une jeune femme innocente et attachante.
Philippe Chauveau
Cette relation mère-fille compliquée, vous la portiez en vous depuis longtemps ? Ou bien l'histoire naît-elle de façon assez inattendue ?
Maruska Le Moing
Non, je crois que c'est arrivé à un moment donné. Je pense que c'est structurant pour beaucoup de filles par rapport à leur mère, mais c'est arrivé à un moment donné. Et puis, en fait, j'ai relu aussi Le journal d'un fou de Gogol. Je l’avais lu au collège et je l'ai relu avant d'écrire ce livre et cette espèce de huis clos avec une dérive d'un personnage, ça m'a beaucoup parlé. J'avais envie d'écrire sur cette espèce de folie qui peut saisir une personne dans un endroit clos. Et donc là, ça saisit Anna. Mais sa mère aussi, en fait dans une forme de dérive, alors différente et plus liée à la maladie. Mais cette dérive là, ça me plaisait d'écrire là-dessus.
Philippe Chauveau
En tout cas, bravo pour ce premier roman qui est déroutant, certes, mais qui est très bien écrit avec une histoire assez incroyable aux portes de la folie, vous le disiez, ça s'appelle Aimez-vous les uns les autres ? C'est votre premier titre et on attend vivement la suite de vos aventures littéraires. Merci Maruska Le Moing, vous êtes publiée chez Gallimard.
Maruska Le Moing
Merci