Lorraine Fouchet

Lorraine Fouchet

A l'adresse du bonheur

Livre 00'06'35"

Philippe Chauveau

À l'adresse du bonheur. Quel joli titre ! Lorraine Fouchet pour ce nouveau roman, ce 23ᵉ titre. Depuis quelques années maintenant, il y a cette récurrence, vous aimez nous prendre par la main pour nous emmener sur cette île de Groix. Vous avez mis votre marinière. Il y a marqué les Groisillonnes sur votre poitrine.

Lorraine Fouchet

Absolument, c’est la première fois que la mets pour vous.

Philippe Chauveau

Vous êtes devenue une vraie Bretonne.

Lorraine Fouchet

Oh, j'adorerais ! Mais on ne peut pas tricher, on ne peut pas tricher. Je ne suis pas née à Groix et je n'ai pas quatre plaques au cimetière. Je suis née à Neuilly-sur-Seine. Ce n'est pas très breton.

Philippe Chauveau

Mais vous faites vos racines là-bas.

Lorraine Fouchet

Écoutez, mon cœur bat pour Groix et quand à Lorient, je mets le pied sur le bateau. Ah, je me sens non pas chez moi, mais au juste endroit de ma vie.

Philippe Chauveau

Depuis plusieurs titres, notamment Entre Ciel et loup en 2016, depuis, à chacun de vos nouveaux titres, il y a une partie du roman qui se passe sur l'île de Groix. Pourquoi ce choix ? Est-ce qu'à un moment, vous avez pu vous avoir peur que certains de vos lecteurs se détournent en disant « moi la Bretagne, ça ne m'intéresse pas ? » Ou est-ce que finalement, c'était pour marquer votre coup de cœur ?

Lorraine Fouchet

Alors ils auraient tort de penser que la Bretagne ne les intéresse pas. Mais on a chacun son île et sa Bretagne à soi. Mais je crois que pour écrire, il faut aimer le lieu sur lequel on écrit. Je ne suis pas maso. Donc quand je mets un an à écrire un livre, autant l'écrire sur un lieu important. Et puis l'année prochaine, je vais écrire sur la Laponie, donc je vais changer un peu. Ce n'est pas tout le temps, ça.

Philippe Chauveau

Alors Lorraine Fouchet il y a Groix, ça c'est le décor. C'est le cadre de votre roman. Et puis il y a la famille, avec ses secrets, avec ses coups de cœur et ses coups de gueule aussi, parfois.

On va fêter l'anniversaire d'Adeline. Adeline, elle a 80 ans. C'est une famille qui vit plutôt en région parisienne. Mais ils ont une maison sur l'île de Groix depuis plusieurs années maintenant. Et Adeline va aller fêter son anniversaire là-bas. Ça va être un anniversaire un peu surprise organisé par son fils Pierre. On est dans une famille de médecins Ça, c'est le point de départ. Mais c'est quand même aussi une famille qui a ses failles. Parce qu'il y a l'un des fils, Paul, qui a disparu un beau matin. On ne sait pas trop où il est, est-ce qu'il est mort ? C'est un secret dont on ne parle pas. Présentez-nous un petit peu cette famille où on s'aime sans très bien savoir se le dire.

Lorraine Fouchet

Alors cette famille, ce sont les Saint-Jarme. Vous savez, il y a les Sainte-Jalle, les Saint-James, je me suis amusée avec le nom. C'est en effet une famille de médecins qui, depuis plusieurs générations, font partie, quand ils sont à Groix, de l'équipage du canot. Donc il faut un médecin et quand ils sont là, ils montent sur le canot, ce qui veut dire qu'ils ne sont pas considérés par les insulaires comme des Parisiens en vacances. Mais ils font partie de la vie de Groix et la maison qui s'appelle KERJOUAN, a été vendue il y a dix ans, à la mort du patriarche. Donc ils sont interdits. Ils sont un peu comme des soldats vous savez qu'on a dégradés, ils n'ont plus le droit d'être bretons, ils n'ont plus le droit d'être Groisillons.

Philippe Chauveau

C'est-à-dire que depuis dix ans, ils se sont un peu interdit d’aller sur l’île de Groix.

Lorraine Fouchet

Plus de maisons donc ils n'ont plus rien

Philippe Chauveau

Jusqu'au jour où Pierre, un beau matin, en prenant son café, et en lisant Ouest-France, apprend que la maison est à nouveau en vente.

Lorraine Fouchet

Absolument. Donc il se précipite pour l'acheter. Trop tard. Quelqu'un l'a précédé. Mais entre la vente et l'achat, la maison est libre et il arrive à la louer pour quatre jours, le temps de l'anniversaire surprise des 80 ans de sa mère, Adeline, entourée des enfants et des petits enfants.

Philippe Chauveau

Ce qui veut dire que toute la famille va remettre les pieds sur l'île de Groix. Et forcément, les souvenirs vont ressurgir.

Lorraine Fouchet

Oui, mais Pierre n'est pas le seul à avoir lu le journal. Et un accident qui date de 37 ans s'invite à la fête, c'est-à-dire que des invités non attendus ont débarquer et changer la donne. Et il y a cette idée que m'a soufflée une amie l'année dernière, on n'avait pas le droit de se réunir pour les anniversaires, surtout les anniversaires d'une grand-mère. Et au lieu de lui offrir, cette grand-mère Adeline, un plaid ou des charentaises ou un cadeau de personne âgée, il lui offre un bocal à émotions. Alors pas un bocal à poisson rouge. Ils ont retiré le poisson, mais un bocal dans lequel chacun a écrit sur un petit papier le plus beau souvenir vécu avec elle. Et elle, elle va piocher dans le bocal pour lire ces souvenirs. Mais en piochant là-dedans, il va y avoir des surprises. Le bocal va devenir un peu une boîte de Pandore.

Philippe Chauveau

Il y a des pièges parce que forcément, les souvenirs, ils peuvent être bons. Et puis on va aussi remuer des souvenirs douloureux. Il y a beaucoup de jolies choses. Il y a les relations difficiles qu'on peut connaître dans les familles. Il y a les relations aussi intergénérationnelles, parce qu'il y a la jeune Noémie qui rentre dans la vie adulte, dont la maman est décédée et dont le père a donc disparu, le fameux Paul qui est parti un beau matin. Comme souvent dans vos romans, la médecine a sa place là. En l'occurrence, Philippe, qui était le patriarche, était médecin. Pierre son fils, est lui-même médecin. Arthur, le petit fils, pourrait éventuellement devenir aussi médecin. Et là, vous faites notamment de Pierre, un médecin qui s'est retrouvé confronté au COVID et qui a fait une sorte de burn out. C'est-à-dire que vous nous montrez la fragilité du médecin. Là où on croit avoir souvent la toute puissance et un roc. Là, vous nous rappelez que ce sont des êtres comme les autres. Pourquoi est-ce important, là encore dans ce roman, de donner cette vision de la médecine fragilisée ?

Lorraine Fouchet

Je crois qu'on s'est rendu compte, d'autant plus cette dernière année, que ce ne sont pas des surhommes. Il y a le savoir. Il y a le recul qui fait qu'on ne prend pas toutes les pathologies. On prend les naissances en plein cœur parce qu'on est ravi. Mais on ne prend pas tous les décès en plein cœur parce que sinon on s'arrêterait et on ne pourrait pas continuer à soigner. Mais tout d'un coup, le métier de soignant, les médecins, les infirmières, les aides-soignantes, toutes les personnes qui concourent aux soins ont été durement ébranlées et durement sollicitées cette année. Et j'avais envie justement de parler d'eux et de parler de médecine. Je crois que c'est de tous mes livres, c'est le 23ᵉ, celui où je parle plus de médecine.

Philippe Chauveau

Voilà un vrai beau roman populaire au sens noble du terme. Une famille qui se réunit dans une maison sur une île battue par les vents. C'est une vraie réussite. C'est votre actualité, Lorraine Fouchet. Ça s'appelle À l'adresse du bonheur. Et quel joli titre inspiré d'une chanson de Jean Ferrat, A l'adresse du bonheur. C'est aux éditions Héloïse d’Ormesson. Merci beaucoup.

Lorraine Fouchet

Merci !

A l'adresse du bonheur Ed. Héloïse d’Ormesson
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