Avec une trentaine d’ouvrages à son actif, Maud Tabachnik a fait ses preuves. Depuis son premier titre, « La vie à fleur de terre », elle s’est imposée dans la grande famille du polar, étant même l’une des pionnières de ces femmes auteurs ayant pris possession du roman noir. C’est pourtant tardivement que Maud Tabachnik prit la plume, à la faveur d’un souci de santé l’empêchant de poursuivre son activité de kinésithérapeute. Tant pis pour ses patients mais tant mieux pour ses lecteurs car elle n’a pas son...
Rediffusion des escales littéraires en partenariat avec le Crédit Mutuel Océan de Maud Tabachnik - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :
Bonjour Maud Tabachnik
Maud Tabachnik :
Bonjour.
Philippe Chauveau :
Quel plaisir de vous retrouver en librairie avec un Jeu de dupes qui sort aux éditions City. On va parler de ce drôle de personnage d'Abbot qui gravite dans le milieu littéraire. Le milieu littéraire, vous le connaissez bien. Vous avez une trentaine d'ouvrages à votre actif. Un peu plus même et curieusement, pourtant, l'écriture arrive un peu par hasard dans votre vie?
Maud Tabachnik :
Tout a fait, en jardinant. J'avais acheté une...
Rediffusion des escales littéraires en partenariat avec le Crédit Mutuel Océan de Maud Tabachnik - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :
Une couverture qui claque avec ces deux visages qui s'entrelacent dans des couleurs rouge et bleu. Votre actualité, Maud Tabachnik, Jeu de dupes, vous allez nous entraîner à la fin des années 70, début des années 80. On va faire connaissance avec un homme assez terne, gris. Il s'appelle Abbot. Il a une petite vie un peu tristoune. Sa femme et sa fille se moquent un peu de lui. C'est un couple classique, mais sa femme est assez revêche. Il trouve néanmoins un peu de fantaisie dans l'écriture. Je me permets...
Rediffusion des escales littéraires en partenariat avec le Crédit Mutuel Océan de Maud Tabachnik - Livre - Suite
Maud Tabachnik
Jeux de dupes
Présentation 00'02'47"Avec une trentaine d’ouvrages à son actif, Maud Tabachnik a fait ses preuves. Depuis son premier titre, « La vie à fleur de terre », elle s’est imposée dans la grande famille du polar, étant même l’une des pionnières de ces femmes auteurs ayant pris possession du roman noir. C’est pourtant tardivement que Maud Tabachnik prit la plume, à la faveur d’un souci de santé l’empêchant de poursuivre son activité de kinésithérapeute. Tant pis pour ses patients mais tant mieux pour ses lecteurs car elle n’a pas son pareille pour créer une ambiance, inventer une intrigue diabolique et nous faire frissonner. Au plaisir de lecture s’ajoute souvent aussi une réflexion sur un sujet politique ou d’actualité et l’Amérique exerce sur elle une fascination qu’elle met en scène dans plusieurs de ses ouvrages.
Si elle a créé un duo récurrent, le lieutenant de police Sam Goodman et la journaliste Sandra Khan que l’on retrouve dans plusieurs de ses titres, elle n’hésite pas à les mettre parfois de côté pour aborder d’autres thèmes ou entrainer son lecteur vers d’autres contrées ou d’autres sujets.
C’est ainsi qu’arrive le personnage d’Abbot. Homme transparent, méprisé par sa femme et sa fille, mal à l’aise en société, il ne sait pas où est sa place et ne trouve du réconfort que dans l’écriture sous le regard narquois de ses proches. Il parvient néanmoins à mettre le point final à un roman et à obtenir un rendez-vous chez un éditeur renommé. Dommage pour lui, la poisse colle à ses talons. Quand l’éditeur l’accueille, Abott a oublié son manuscrit dans le taxi qui l’a amené jusque-là. Et le désespoir d’Abott d’atteindre son paroxysme quand, quelques temps plus tard, le texte est publié sous un autre nom d’auteur et devient un best-seller. Qui est ce Ruelov qui connait le succès à sa place ? Abott va tout plaquer pour démasquer l’imposteur et lui tendre un piège machiavélique mais Ruelov a d’autres atouts dans sa manche ! Entre haine et fascination, qui des deux l’emportera ?
Dans une reconstitution réussie des années 70/80, de la Côte d’Azur à Hollywood, avec une belle galerie de personnages tous plus salauds les uns que les autres, Maud Tabachnik fait mouche. Sans artifice, sans scène sanglante mais avec une écriture simple à l’image de son anti-héros qu’est Abott, Maud Tabachnik fabrique une intrigue aux petits oignons qui ne trouvera son dénouement que dans les dernières pages. Dans les univers flamboyants du monde littéraire et du cinéma, l’histoire se déroule en scènes tendues et oppressantes où les dialogues font des étincelles.
« Jeux de dupes », de Maud Tabachnik est publié chez City Editions.
Maud Tabachnik
Jeux de dupes
Portrait 00'06'43"Philippe Chauveau :
Bonjour Maud Tabachnik
Maud Tabachnik :
Bonjour.
Philippe Chauveau :
Quel plaisir de vous retrouver en librairie avec un Jeu de dupes qui sort aux éditions City. On va parler de ce drôle de personnage d'Abbot qui gravite dans le milieu littéraire. Le milieu littéraire, vous le connaissez bien. Vous avez une trentaine d'ouvrages à votre actif. Un peu plus même et curieusement, pourtant, l'écriture arrive un peu par hasard dans votre vie?
Maud Tabachnik :
Tout a fait, en jardinant. J'avais acheté une maison en Touraine et j'ai découvert les joies du jardinage, de la campagne et de la maison individuelle. J'ai été éblouie par la campagne que je ne connaissais pas. J'allais en week-end, mais pas à la campagne, au bord de la mer comme tous les Parisiens, on disait pas bobo à l'époque, mais c'était ça aussi. Et ensuite, ça m'a tellement plu qu'on a acheté une maison entre Richelieu et Chinon.
Philippe Chauveau :
Et alors, le jardinage ?
Maud Tabachnik :
Le jardinage c'est des grands moments et je les regrette encore. Faire pousser quelque chose n'importe comment, par ce que je ne savais pas du tout au début. C'était un miracle pour moi de manger ce que l'on a semé.
Philippe Chauveau :
Alors, le lien entre le jardinage et l'écriture ?
Maud Tabachnik :
Alors le lien entre le jardinage et l'écriture ? C'est l'hiver. L'hiver, on ne jardine pas. Je suis quelqu'un d'actif et je ne peux pas rester sans rien faire. J'ai donc commencé à écrire.
Philippe Chauveau :
Vous avez choisi d'écrire dans l'univers du polar du roman noir?
Maud Tabachnik :
Pas les premiers. J'en ai écrit un que je n'ai jamais donné, qui n'était pas du tout dans le polar, qui était plutôt politico historique. Et ensuite, j'ai remarqué que j'aime beaucoup les romans noirs. C'est là où je prends le plus de plaisir dans un bon thriller politique. Plus même que dans le policier. Parce que ça, c'est mouvant dans le monde entier. On touche des sujets sensibles, comme on dit. Et ça, ça me plaît d'écrire là dessus.
Philippe Chauveau :
Je ne trahis aucun secret en disant qu'avant l'écriture, vous aviez aussi une autre vie puisque vous avez été d'ostéopathe, avec votre cabinet à Paris. Est-ce qu'il y a un lien entre triturer les corps des patients, et triturer des personnages?
Maud Tabachnik :
Non, il n'y en a pas. Il y a vraiment une coupure entre les deux activités. Ça n'a vraiment rien à voir. L'ostéopathie c'est autre chose. D'abord, ce n'est pas trituer, c'est une autre responsabilité. C'est quelque chose d'assez pénible parce que moi, je ne suis pas très transparente. Et quand j'avais des cas difficiles, même mon cabinet fermé ça me travaillait. En revanche, j'ai trouvé dans l'écriture une véritable bouffée d'oxygène et de gaieté, d'amusement, d'excitation. Ça m'a beaucoup plu et ça me plaît toujours.
Philippe Chauveau :
Vous êtes devenu au fil des ans, l'une des références du polar à la française, même si souvent, vos intrigues se passent aux Etats-Unis. On en reparlera. On vous connaît aussi pour le duo que vous avez créé en tant qu'auteur avec ce lieutenant de police et cette femme journaliste. Ces deux personnages que l'on a retrouvés dans plusieurs titres. Pourquoi était-ce important d'avoir ces deux personnages récurrents?
Maud Tabachnik :
Aucune idée, je ne sais pas si ça a de l'importance. Vous savez, quand on écrit, on ne fait pas de prévision, des personnages s'imposent. J'avais besoin d'une femme et d'un homme à ce moment là, qui n'auraient pas les habituelles affinités que l'on trouve dans les romans de tout genre. Une journaliste est un policier, mais le premier qui a très bien marché aux éditions Viviane Hamy. C'est un été pourri où Sandra Kane tue. Elle est meurtrière. Elle rencontre Sam Gunman. Et au bout d'un moment, il a compris qu'elle est meurtrière, mais il comprend aussi que le type qu'elle a tué était une vraie pourriture qui avait tué et violé la compagne de Sandra Kane. Et voilà, c'est comme ça que ça a commencé. Il y a un problème de conscience du policier qui ne veut pas l'arrêter parce qu'il comprend que ça se justifiait presque. C'était ça un petit peu qui a interloqué les critiques, que je trouve une raison au meurtre.
Philippe Chauveau :
Avez vous l'impression que Sandra Kane et Sam Gutmann, à un certain moment, sont peut être devenus un peu des amis de papier pour vous ? D'ou cette envie de les faire revenir régulièrement.
Maud Tabachnik :
Oui, tous les personnages gentils sont mes amis. Quand je les retrouve le matin à mon bureau, je vais rencontrer des amis, les gentils. Je n'ai qu'une aucune indulgence pour les méchants. Parce j'en ai quand même de sacrés des méchants, cela je ne les supporte pas. Et justement, je me sers de mes personnages pour dire ce que je pense d'eux.
Philippe Chauveau :
Alors justement, le matin lorsque vous vous mettez à votre table de travail. Quel est le sentiment que vous éprouvez lorsque vous retrouvez ses amis de papier?
Maud Tabachnik :
D'abord, je reviens sur les journées précédentes de travail parce qu'on ne peut pas replonger en quittant sa douche dans un univers imaginaire. Donc, vous êtes obligé de vous re familiariser avec les faits antérieurs et ce qu'ont fait vos personnages et les actions. Et là, vous commencez à vous nourrir et c'est de là que ça part, parce que moi, je n'ai pas de plan quand j'écris. Je ne sais pas ce qui va se passer la page d'après, c'est eux qui me guident.
Philippe Chauveau :
Ils vous surprennent comme vous surprenez vos lecteurs et je reprends cette citation du magazine ELLE qui est sur la couverture de votre nouveau livre : "lorsqu'on plonge dans un Tabachnik, mieux vaut avoir le coeur bien accroché". Votre actualité, Maud Tabachnik chez City Éditions, ça s'appelle Jeu de dupes.
Maud Tabachnik
Jeux de dupes
Livre 00'07'02"Philippe Chauveau :
Une couverture qui claque avec ces deux visages qui s'entrelacent dans des couleurs rouge et bleu. Votre actualité, Maud Tabachnik, Jeu de dupes, vous allez nous entraîner à la fin des années 70, début des années 80. On va faire connaissance avec un homme assez terne, gris. Il s'appelle Abbot. Il a une petite vie un peu tristoune. Sa femme et sa fille se moquent un peu de lui. C'est un couple classique, mais sa femme est assez revêche. Il trouve néanmoins un peu de fantaisie dans l'écriture. Je me permets simplement de planter le décor. Il prend la plume sous le regard narquois d'ailleurs de son épouse et de tout le monde. Il va quand même mettre le point final à ce fameux roman où il va réussir à obtenir un rendez vous chez un éditeur. Oui, mais là, patatras. Il faut dire que la poisse lui colle au talon. Il va oublier le manuscrit dans le taxi. C'est le point de départ de votre roman parce que quelqu'un de bien mal intentionné va s'emparer du manuscrit. Qui est-il Abbot? Comment est née cette histoire de manuscrit oublié dans un taxi? Est-ce que ça a pu vous arriver ça?
Maud Tabachnik :
Ça a failli m'arriver. C'est ce qui m'a fait écrire ce livre. Je pars de chez moi en taxi. Je devais déjeuner chez une amie. J'étais embarrassée, comme Abbot l'est quand il va chez son éditeur. Il pleut, il a sa serviette et son parapluie. Il est énervé et il arrive chez l'éditeur mais il n'a pas son manuscrit. Et moi, c'est ce qui m'est arrivé, mais heureusement pas jusqu'au bout. J'arrive chez mon amie, embarrassée. Et tout d'un coup, je me dit : "ma serviette avec le manuscrit?". Un coup de poing dans l'estomac, le souffle coupé. C'est même extraordinaire à quel point un incident pareil peut de secouer un auteur qui vient de terminer son manuscrit. C'est vrai que c'est des mois, des mois et des mois de travail.
Philippe Chauveau :
Pour Abbot ça prend des proportions phénoménales, il ne vit que pour ça.
Maud Tabachnik :
Oui, quand ça m'est arrivé, j'avais déjà une carrière derrière moi, si je puis dire. Mais lui, c'est l'œuvre de sa vie. C'est sa raison d'exister. Il n'a pas de couple. Sa femme et sa fille sont impossibles. Ses collègues se moquent de lui. Il a un métier effrayant de monotonie, sans intérêt. Il n'est rien, il se sent rien.
Philippe Chauveau :
Et lui, il a pensé trouver une autre vie dans l'écriture. C'est pour ça que je me suis permis de préciser que nous étions à la fin des années 70, début 80, parce qu'il n'y a pas d'ordinateur. Donc il n'a pas fait de copie. Alors je ne vais bien sûr pas dévoiler l'intrigue, rassurez-vous. Je vais juste avancer un petit peu dans le roman. Ce manuscrit disparaît. C'est l'apocalypse pour Abbot. Et d'autant plus que quelque temps plus tard, il se rend compte que le texte va être bel et bien publié par un autre, par un autre auteur.
Maud Tabachnik :
Pas par un auteur mais par un inconnu, par un représentant de commerce.
Philippe Chauveau :
Un inconnu, mais qui va devenir un auteur célèbre. Le livre est un best seller, et dès lors Abbot cherche à savoir qui est cet homme et surtout chercher à se venger. L'ambiance est très impressionnante dans votre roman. Quand on connaît votre parcours, parfois il y a eu des scènes assez violente, il y a souvent eu du sang dans vos intrigues, là pas du tout. C'est très sobre. Le texte est très simple. L'intrigue est fluide. Mais en revanche, c'est oppressant à toutes les pages. Alors justement, comment avez vous travaillé cette écriture?
Maud Tabachnik :
Je ne sais pas, c'est ce que m'a dit mon attachée d'édition : "il est impressionnant ton livre, il est très bien". Il n'y a rien à voir avec les autres. En plus, ça se passe à Paris, ça se passe dans le midi après aux États-Unis, qui ne sont pas des endroits dangereux. Il se passe rien de spécial. Et elle me dit il est très oppressant.
Philippe Chauveau :
Il y a une tension permanente. Il y a des dialogues qui font mouche parce que ces deux personnages vont finir par se rencontrer. Et il va y avoir une haine, mais aussi une fascination réciproque entre ces deux hommes.
Maud Tabachnik :
Oui, comme d'habitude. À force de haire quelqu'un, il y a une fascination dans la haine. Je ne sais pas si Abbot envie de ce type qui a réussi. Je ne sais pas trop comment il réagit. Au départ c'est la haine de quelqu'un qui a été spolié, de ce succès surtout. Le livre n'aurait rien fait, il aurait été déçu. Mais il a eu le Grand Prix littéraire et son voleur, même si ce n’est pas vraiment son voleur car il l'a trouvé, mais il a autant de succès. Pour un être aussi terne Abbot, c'est si terrible, c'est le vol de sa vie.
Philippe Chauveau :
Mais ce qui est intéressant, c'est que finalement par cet évènement Abbot va se révéler à lui même. Il va se découvrir machiavélique.
Maud Tabachnik :
Oui et aussi audacieux, meurtrier. Ce qui n'aurait jamais pensé être.
Philippe Chauveau :
Vous faites le choix, de démarrer votre roman sur Paris, puis ensuite vous nous emmener dans le sud de la France. Il y a un salon du livre. Il y a aussi tous les beaux endroits sur la French Riviera. Et puis, nous allons également passer toute une partie du roman à Hollywood dans l'univers du cinéma, puisque ce fameux livre fait l'objet d'une adaptation. Ça vous titillait de nous ramener en Amérique? Il faut toujours qu'il y a un moment, on se retrouve aux Etats-Unis dans vos esprits?
Maud Tabachnik :
Si vous voulez Hollywood, c'est le faste, c'est le luxe. Et j'ai voulu les confronter, ces deux médiocres à, un luxe inimaginable pour eux qui font encore plus mal Abbot.
Philippe Chauveau :
Et justement, vous faites évoluer ces deux médiocres comme vous le dite, dans la lumière.
Maud Tabachnik :
Oui, dans la lumière, dans le luxe, qu'ils n'imaginaient même pas.
Philippe Chauveau :
Vous disiez tout à l'heure que les personnages que vous créez deviennent des amis pour la plupart. Or là, vous le dites vous même vos deux anti-héros sont des médiocres. Ils vont rester dans la galerie des amis ou des salauds, ces deux là.
Maud Tabachnik :
Alors j'en avais assez le matin, de me retrouver face à eux, matin après matin. Je me suis dit il faut que je modifie parce que je ne les supporte pas. Il y a des défauts que je ne supporte pas. Par exemple, les gens qui s'en prennent aux autres de leur médiocrité. Il en veut un peu à tout le monde et ça, je n'aime pas les gens comme ça. Donc le fréquenter m'insupportait. J'ai essayé de lui donner quelques vertus. J'ai modifié le personnage pour pouvoir travailler avec lui. Vous voyez à quel point on est proche des personnages que l'on crée.
Philippe Chauveau :
En tous cas, vous avez su créer une intrigue machiavélique qui va vous tenir en haleine jusqu'à la jusqu'à la dernière page. C'est votre actualité, Maud Tabachnik. Ça s'appelle Jeu de dupes et vous êtes publié chez City Éditions. Merci beaucoup.