Xavier Lapeyroux évolue depuis de nombreuses années dans le monde du livre et ce, des deux côtés du miroir puiqu’il travaille en médiathèque. Il cérit également depuis longtemps, des nouvelles, des poèmes ou des textes de chansons. Mais c’est avant tout le romancier qui nous intéresse ici. Après deux précédents titres dont « Marathon » paru en 2015, voici le nouvel opus de Xavier Lapeyroux « De l’autre côté du lac ».
Difficile de vous dire s’il s’agit d’un roman noir, d’un conte fantastique, d’un...
De l'autre côté du lac de Xavier Lapeyroux - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :
Bonjour Xavier Lapeyroux.
Xavier Lapeyroux :
Bonjour.
Philippe Chauveau :
Vous êtes dans l'actualité avec ce nouveau titre aux éditions Anne Carrière « De l'autre côté du lac ». On vous connait déjà puisque vous avez publié deux précédents romans, on vous connait aussi pour votre plume dans la poésie et un petit peu dans le journalisme également. Le livre fait partie de votre ADN, d'ailleurs vous travaillez en médiathèque. Si je vous demande de me dire ce que représente pour vous les livres et la...
De l'autre côté du lac de Xavier Lapeyroux - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :
Quelle drôle d'histoire Xavier Lapeyroux ! Il s’en passe des choses « De l'autre côté du lac », votre troisième et nouveau roman. C'est le début de l'été, c'est la fin des cours, nous sommes dans un quartier résidentiel qui s'appelle la Colline. C'est étouffant, ce début d'été est très orageux. Nous faisons connaissance avec Hermann, il a une petite quarantaine d'années, il vit avec Soma, son épouse et Sam, leur fille adolescente. Il y a une tension palpable avec cet orage, une tension peut-être...
De l'autre côté du lac de Xavier Lapeyroux - Livre - Suite
Xavier Lapeyroux
De l'autre côté du lac
Présentation 02'00"Xavier Lapeyroux évolue depuis de nombreuses années dans le monde du livre et ce, des deux côtés du miroir puiqu’il travaille en médiathèque. Il cérit également depuis longtemps, des nouvelles, des poèmes ou des textes de chansons. Mais c’est avant tout le romancier qui nous intéresse ici. Après deux précédents titres dont « Marathon » paru en 2015, voici le nouvel opus de Xavier Lapeyroux « De l’autre côté du lac ».
Difficile de vous dire s’il s’agit d’un roman noir, d’un conte fantastique, d’un journal intime flirtant avec la folie ou d’un récit psychologique. C’est sans doute un peu de tout ça mais c’est surtout bien au-delà. Voilà en tout cas un roman envoutant, dérangeant, étrange, qui ne vous laissera pas indifférent.
Nous sommes dans un quartier résidentiel, près d’un lac. C’est l’été, un été étouffant, orageux. Hermann vit avec sa femme Soma et leur fille Sam. Hermann travaille dans un centre pour jeunes en difficulté. La tension est palpable, au propre comme au figuré jusqu’à ce drame chez les voisins où l’un des jumeaux tue accidentellement son frère adolescent. Dès lors, tout va se dérégler et Hermann n’aura de cesse de protéger sa famille contre toutes les agressions extérieures, trouvant uniquement le réconfort dans ses baignades et ses promenades au bord du lac durant lesquelles il se rapproche chaque jour davantage de cette maison qui ressemble étrangement à la sienne. Hermann sortira-t-il indemne de cet été d’angoisse ? Saura-t-il déjouer les pièges qu’on semble vouloir lui tendre ? Saura-t-il préserver sa famille ? Fort d’une écriture addictive, nous entrainant sur des chemins abruptes avec parfois des sorties de route volontaire, nous tendant un miroir à travers le personnage d’Hermann, Xavier Lapeyroux joue brillamment avec nos nerfs et cette histoire vous hantera longtemps, bien après la dernière page.
« De l’autre côté du lac » de Xavier Lapeyroux est publié chez Anne Carrière.
Xavier Lapeyroux
De l'autre côté du lac
Portrait 06'23"Philippe Chauveau :
Bonjour Xavier Lapeyroux.
Xavier Lapeyroux :
Bonjour.
Philippe Chauveau :
Vous êtes dans l'actualité avec ce nouveau titre aux éditions Anne Carrière « De l'autre côté du lac ». On vous connait déjà puisque vous avez publié deux précédents romans, on vous connait aussi pour votre plume dans la poésie et un petit peu dans le journalisme également. Le livre fait partie de votre ADN, d'ailleurs vous travaillez en médiathèque. Si je vous demande de me dire ce que représente pour vous les livres et la littérature en général, que répondez-vous ?
Xavier Lapeyroux :
C'est une vaste question !
J'ai toujours baigné dans la littérature depuis assez jeune. Au début la bande dessinée comme beaucoup d'adolescents, ensuite je me suis mis à la littérature à dix-huit ans avec des auteurs français que j'aimais beaucoup comme Philippe Djian, ou Jean-Paul Dubois, qui m'ont amené vers la littérature américaine avec des auteurs comme John Fante, Raymond Carver, Henry Miller... Ce genre d'auteurs.
Philippe Chauveau :
Vous vous faites tout seul ou quelqu'un vous ouvre les portes de ce monde littéraire, qu'il soit français ou étranger ?
Xavier Lapeyroux :
J'ai suivi mon chemin un peu tout seul. Je ne sais pas d'où cela vient mais j'ai toujours beaucoup aimé les librairies d'abord. J'ai travaillé en librairie pendant quelques années, je faisais un peu de musique à mi-temps. Et je travaille en médiathèque depuis une quinzaine d'années, c'est un milieu qui me plait beaucoup.
Philippe Chauveau :
Qu'aimez-vous justement ? La médiathèque est un univers bien spécifique où il y a l'échange, le contact, qu'est-ce qui vous touche en médiathèque avec les gens que vous côtoyez ?
Xavier Lapeyroux :
Il y a la sélection des ouvrages, le conseil aux gens qui viennent nous demander conseil, le fait qu'il n'y ait pas d'aspect financier, commercial, comme dans la librairie. Le côté service public me plaît beaucoup, que ce soit un endroit ouvert à tous, ou chacun puisse venir librement.
Philippe Chauveau :
Lorsque vous dites que vers l'âge de dix-huit ans, la littérature prend de plus en plus de place dans votre vie de jeune adulte, pourquoi ? Cela correspond à un besoin ? Est-ce une nécessité de vous protéger, de découvrir d'autres univers ? Pourquoi le livre devient-il si important ?
Xavier Lapeyroux :
Je n'ai pas trop la réponse à cette question, je l'avoue. J'ai commencé à lire et à écrire au même moment. Je jouais dans un groupe de musique et j'ai commencé à écrire des textes de chansons, ce qui est un exercice très périlleux car il faut dire beaucoup de choses en peu de mots. C'est un bon exercice je trouve. Petit à petit, j'ai commencé à écrire des choses plus longues, des nouvelles, un peu de poésie... J'ai envoyé ma première nouvelle à une revue littéraire qui m'a corrigé et m'a dit : « Je fais avec vous ce que je ne fais jamais, je vous ai corrigé ». Il m'avait barré les trois quarts du texte mais cela a été un déclic. Je savais que j'avais envie de faire ça.
Philippe Chauveau :
Aujourd'hui, vous savez répondre à la question en tant qu'adulte ? Pourquoi le besoin de l'écriture ?
Xavier Lapeyroux :
Non plus. Je crois que l'idée de création, de créer un monde de A à Z, c'est assez impressionnant. On part de rien et il faut créer les personnages, les lieux, l'intrigue... On devient une sorte de dieu. On fabrique un monde.
Philippe Chauveau :
Vous mettez un peu plus de sept jours quand même ?
Xavier Lapeyroux :
Oui, oui, je suis très laborieux !
Philippe Chauveau :
Vous écrivez des textes de chansons, vous écrivez des poésies, des nouvelles, des romans… Est-ce le même Xavier Lapeyroux ou êtes-vous différent en fonction de l'écriture que vous produisez ?
Xavier Lapeyroux :
Je pense que c'est un peu toujours la même chose. J'essaie de creuser un sillon, quel que soit le genre que j'aborde. Je pense parler à peu près des mêmes thématiques, d'une façon un peu différente en fonction du genre mais c'est dans la même veine. Je m'écarte assez peu finalement des thèmes qui m'obsèdent.
Philippe Chauveau :
Si vous deviez définir votre univers littéraire, en parlant aussi bien de la poésie, des nouvelles, des chansons que du roman, si vous deviez définir votre travail d'auteur que diriez-vous ?
Xavier Lapeyroux :
La psychologie m'intéresse beaucoup. Je crois que j’écris des romans psychologique, des histoires qui traitent de la psychologie des personnages. Ce qui m'intéresse beaucoup, c'est qu'il y ait une dimension qui nous sorte un peu de la réalité, légèrement fantastique mais pas toujours, une dimension qui fait voir la réalité différemment.
Philippe Chauveau :
Lorsque vous écrivez, pensez-vous déjà au lecteur qui aura le livre en main ou écrivez-vous avant tout pour vous-même ?
Xavier Lapeyroux :
Je ne me pose pas la question. Je ne pense pas au lecteur en fait, c'est peut-être un peu égoïste mais je pense avant tout à ce que j'ai envie d'écrire et comment je dois l'écrire pour que ce soit le mieux, le plus fidèle à ma pensée.
Philippe Chauveau :
Si vous deviez définir ce que vous ressentez, ce que vous éprouvez lorsque vous êtes à votre table de travail, dans quel état d'esprit êtes-vous ?
Xavier Lapeyroux :
C'est très variable. Quand je commence un roman, c'est très paniquant, un peu effrayant. J'ai toujours l'impression que c'est un exercice trop important et trop énorme pour moi. Après, une fois que je commence à entrer dans l'histoire, cela devient un peu plus agréable mais c'est toujours assez douloureux. Je suis très laborieux et je peux n’écrire que dix lignes en deux heures donc c'est un mélange de plaisir et de douleur. Quand j'arrive à écrire dix lignes dont je suis satisfait, je suis enchanté, je n'ai pas raté ma journée ! Il y a des jours où je n'arrive à rien, il y a des jours où quand j'arrive à faire une page c'est « Alleluia » !
Philippe Chauveau :
Un mélange de douleur et de plaisir. Votre actualité Xavier Lapeyroux, ce nouveau titre publié chez Anne Carrière, « De l'autre côté du lac ».
Xavier Lapeyroux
De l'autre côté du lac
Livre 06'50"Philippe Chauveau :
Quelle drôle d'histoire Xavier Lapeyroux ! Il s’en passe des choses « De l'autre côté du lac », votre troisième et nouveau roman. C'est le début de l'été, c'est la fin des cours, nous sommes dans un quartier résidentiel qui s'appelle la Colline. C'est étouffant, ce début d'été est très orageux. Nous faisons connaissance avec Hermann, il a une petite quarantaine d'années, il vit avec Soma, son épouse et Sam, leur fille adolescente. Il y a une tension palpable avec cet orage, une tension peut-être aussi dans la famille, une tension là ou travaille Hermann, un centre pour jeunes en difficultés. Qu'est(ce qu'il va se passer dans cette histoire ? Pourquoi Hermann a-t-il pris vie sous votre plume ? Qui est-il ce drôle de personnage ?
Xavier Lapeyroux :
C'est un personnage qui a besoin de contrôler les choses de A à Z, il est dans le contrôle total, quotidien, il a besoin d'avoir une maîtrise à la fois de ce qu'il se passe, de sa vie...
Philippe Chauveau :
Il faut que ce soit très carré, il a besoin de savoir qui il est, ce que font les autres.
Xavier Lapeyroux :
Oui, c'est un véritable anxieux qui s'inquiète beaucoup.
Philippe Chauveau :
Il s'inquiète pour les gens qu'il aime, notamment Soma et Sam.
Xavier Lapeyroux :
Oui, tout à fait. Il y a une peur qui va apparaître. Chez le voisin, il y a deux jumeaux qui sont adolescents, il y en a un qui va tuer l'autre par accident et cela va créer, dès le démarrage, une anxiété chez ce personnage qui va transposer ce risque sur sa fille qui a le même âge.
Philippe Chauveau :
Je me permets d'évoquer la première scène qui est saisissante et dès ce moment-là, vous prenez le lecteur et vous ne le lâchez pas jusqu'à la dernière page. C'est le début de la soirée, une soirée d'été, ils sont en famille et puis il y a les lueurs des gyrophares qui commencent à apparaître dans ce quartier pavillonnaire. On va alors apprendre cet accident où l'un des jumeaux a tué son frère et dès lors, ça ne va plus jamais s'arrêter et il va y avoir cette envie pour Hermann de se préserver. Il y a l'importance aussi du décor, cette zone pavillonnaire avec de belles maisons et ce lac où il se baigne aussi parfois et cette forêt où Hermann va souvent se balader. Pourquoi avoir eu besoin de créer ce décor ?
Xavier Lapeyroux :
J'aime bien que dans mes romans que le décor et les lieux disent la psychologie des personnages. Ce lac est un peu l'endroit où Herman va se ressourcer, faire le point sur son existence, prendre des décisions. Il y a une transition qui va se faire au fil des pages et qui va l'emmener vers autre chose.
Philippe Chauveau :
Vous ne lâchez pas votre lecteur, de la première à la dernière page et on ne sait plus finalement ce qu'on est en train de lire. On ne sait plus si on lit un roman psychologique, un thriller, un roman noir ou si on flirte avec la folie. Et tout cela est savamment dosé avec une écriture très fluide et addictive. Il y a des situations dans lesquelles on sent que vous voulez nous emmener dans des chemins de traverse et de temps en temps, vous nous dites : « On a fait fausse route, il faut repartir dans une autre direction ». Vous aimez éparpiller votre lecteur pour le garder avec vous, c'est comme ça que vous avez conçu votre écriture ?
Xavier Lapeyroux :
Je brouille les pistes mais en fait je sais où je vais. Le roman parle de la peur de ce personnage, comment elle va naître en lui et comment cette peur va faire naître les démons qui vont le dévorer lui-même, c'est le sujet du livre. Il va devenir son propre ennemi.
Philippe Chauveau :
Il y a beaucoup de références artistiques, musicales ou cinématographiques, il y a même plusieurs pages consacrées à un film, un film qu'Hermann va vouloir montrer à sa propre fille Sam, « L'invasion des profanateurs ». Pourquoi cette importance de semer des petits cailloux pour le lecteur en donnant des références musicales ou cinématographiques et pourquoi l'importance de ce film dans votre histoire ?
Xavier Lapeyroux :
Les références en tant que telles apportent, selon moi, à chaque fois, quelque chose de plus à l'histoire. Vu que c'est un personnage très cartésien, très carré, cela dit des choses sur sa personnalité. Quand il parle musique ou photographie, il est très pointu. Il a des références précises, des goûts très précis, très arrêtés, au niveau cinématographique aussi. C'est vrai que ce film arrive au milieu du livre, c'est le point où tout va basculer dans le livre et ce film donner à Hermann, de façon plus ou moins consciente, une idée pour aborder la suite des évènements et protéger sa famille. Philippe Chauveau :
Hermann est un homme angoissé, un homme anxieux, un homme qui a peur, notamment pour ses proches. Hermann dit de lui-même : « Je suis une sentinelle à laquelle rien n'échappe ». Y-a-t-il beaucoup de vous dans le personnage d'Hermann ?
Xavier Lapeyroux :
Pas uniquement dans le personnage d'Hermann ! Je pense qu'on met beaucoup de soi. Sans parler d'autofiction, le romancier parle de lui-même, même s'il brouille les pistes, même s'il parle de choses qu'il n'a pas vécues. On va mettre des éléments de ce qu'on connait, on en parlera mieux si on connait les choses. Il y a sûrement de moi dans le personnage principal, de façon exacerbée pour Hermann. J'espère ne pas être à son niveau d'inquiétude !
Philippe Chauveau :
J'espère pour vous ! Vous qui travaillez en médiathèque mais c'est aussi une question que l'on peut se poser si on est libraire. Où doit-on classer le livre ? Le met-on au rayon des polars, des romans noirs, des thrillers, au rayon psychologique ? Le met-on dans les essais sur la folie ? Il est inclassable !
Xavier Lapeyroux :
Oui, c'est quelque chose qui me plaît d'être inclassable. Cela se fait peut-être plus dans la littérature étrangère qu'en littérature française. Je pense que mon roman est surtout psychologique, sans genre particulier.
Philippe Chauveau :
Voilà un roman qui se dévore de la première à la dernière page, un roman parfois dérangeant, envoutant, fascinant avec ce personnage d'Hermann que l'on suit et qui semble perdre pied à chaque page. C'est un gros coup de cœur ! Xavier Lapeyroux, vous êtes publié chez Anne Carrière, « De l'autre côté du lac ». Merci !