Vous la connaissez bien sûr ! Son visage apparait régulièrement sur les écrans de télévison quand il s’agit de politique. Nathalie St Cricq est une figure médiatique incontournable dont l’analyse est à la fois crainte par les hommes et femmes politiques et plébiscitée par les téléspectateurs.
Nathalie Saint Cricq est aujourd’hui en librairie pour ce qui est son premier livre. Et contre toute attente, elle fait le choix de ne pas nous parler de notre époque contemporaine, et de notre politique nationale qui comporte...
Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir de Nathalie Saint Cricq - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :
Bonjour Nathalie Saint-Cricq.
Nathalie Saint-Cricq :
Bonjour.
Philippe Chauveau :
Merci d'avoir accepté notre invitation. Vous êtes en librairie pour la première fois avec un titre aux Éditions de L'Observatoire, « Je vous aiderai à vivre, vous m’aiderez à mourir ». Nous allons parler de Clémenceau dans un instant, mais au préalable, j'aimerais qu'on parle un peu de vous. Vous êtes un visage que l'on connaît bien, un visage de la télévision. Vous êtes éditorialiste sur France...
Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir de Nathalie Saint Cricq - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :
Voici donc, Nathalie Saint-Cricq, ce qui est votre premier livre en librairie, « Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir ». Quel joli titre, quelle jolie phrase ! Vous allez nous expliquer comment est né ce livre. On vous connaît, on l'a dit, en tant que journaliste politique. Là, justement, c'est à un monstre politique que vous vous attaquez, mais appartenant à notre histoire déjà ancienne, il y a un peu plus de 100 ans. Pourquoi ce clin d’œil ? Vous gardez un pied dans la politique mais vous...
Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir de Nathalie Saint Cricq - Livre - Suite
Nathalie Saint Cricq
Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir
Présentation 00'02'07"Vous la connaissez bien sûr ! Son visage apparait régulièrement sur les écrans de télévison quand il s’agit de politique. Nathalie St Cricq est une figure médiatique incontournable dont l’analyse est à la fois crainte par les hommes et femmes politiques et plébiscitée par les téléspectateurs.
Nathalie Saint Cricq est aujourd’hui en librairie pour ce qui est son premier livre. Et contre toute attente, elle fait le choix de ne pas nous parler de notre époque contemporaine, et de notre politique nationale qui comporte pourtant autant de rebondissements que le meilleur des best-seller.
Non, elle nous emmène dans les années 1920 et si elle nous parle d’une figure de notre histoire nationale, c’est moins pour évoquer son parcours politique que pour écouter battre son cœur.
Voici Georges Clémenceau. En 1922, il a 82 ans. Le père La Victoire est mis à mal à l’assemblée par ceux qui l’encensaient auparavant mais le vieux renard a encore des cartes en main. Oui mais voilà que fait irruption dans sa vie Madeleine Baldensperger. Elle a 40 ans de moins que lui.
Au-delà des convenances, du qu’en dira t-on, ils vont éprouver l’un pour l’autre des sentiments d’une grande sincérité qui leur permettront, à l’un comme à l’autre, de surmonter des épreuves personnelles.
Se basant sur une correspondance assidue de huit années et imaginant le journal intime du Tigre, Nathalie St Cricq nous plonge avec jubilation dans cette époque complexe de l’après-guerre, nous proposant un essai qui se lit comme un roman.
Une plume enlevée, réjouissante et ironique qui fait revivre la grande figure de Georges Clemenceau, son terrible caractère, ses mots d'esprit dévastateurs, et, avant tout, son coeur ardent pour la belle Marguerite.
« Je vous aiderai à vivre, vous m’aiderez à mourir » de Nathalie St Cricq est publié aux éditions de l’Observatoire.
Nathalie Saint Cricq
Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir
Portrait 00'07'43"Philippe Chauveau :
Bonjour Nathalie Saint-Cricq.
Nathalie Saint-Cricq :
Bonjour.
Philippe Chauveau :
Merci d'avoir accepté notre invitation. Vous êtes en librairie pour la première fois avec un titre aux Éditions de L'Observatoire, « Je vous aiderai à vivre, vous m’aiderez à mourir ». Nous allons parler de Clémenceau dans un instant, mais au préalable, j'aimerais qu'on parle un peu de vous. Vous êtes un visage que l'on connaît bien, un visage de la télévision. Vous êtes éditorialiste sur France Télévision, sur France 2, spécialiste de la politique, notamment. Le journalisme, vous êtes tombée dedans lorsque vous étiez petite, un peu comme Obélix pour la potion magique ! La famille, c'est le journalisme ?
Nathalie Saint-Cricq :
Oui un peu, il y a mon grand-père, mon père, mon frère. Ma mère aurait pu, mais elle a plutôt choisi la sociologie. Mais c'est vrai que j'ai été élevée dans le journalisme et la politique. Presque plus la politique que le journalisme d’ailleurs. Parce que chez moi, on ne parlait que de ça, matin, midi et soir. Je trouvais ça épuisant quand j'étais petite. Et puis, malgré tout, ce que j'ai entendu a pu me resservir plus tard. C'était quand même une nourriture nécessaire et cela m'a grandement aidée. Malheureusement, la tradition se perpétue puisque mon fils est également journaliste, et mon mari aussi !
Philippe Chauveau :
Je ne trahis aucun secret en disant que votre famille est associée au titre de presse quotidienne régionale de la Nouvelle République, basé à Tours. Mais curieusement, ce n'est pas dans la presse écrite que vous avez préféré œuvrer, c’est plus en télévision maintenant et en radio que l'on vous connaît.
Nathalie Saint-Cricq :
Je vais vous dire la vérité ! Au début, je suis allée là où cherchait des gens. C’est quand même un métier dans lequel il y a beaucoup de gens qui travaillent dans des secteurs différents. J'ai commencé en presse écrite, dans un hebdo qui parle de pub, qui s'appelait « Stratégies ». J'ai failli être engagée à « L'Express », mais ça n'a pas marché. En fait, je suis allée là où on voulait bien de moi ! Je n'aimais pas spécialement la télé. Je n'aime pas du tout passer à la télé. Je n'avais pas une passion pour cet espace d'exposition, même pas du tout. Pourtant, j'ai des collègues qui sont de vrais malades mentaux et qui pour une minute d'antenne tueraient leur famille entière. Je ne crois pas en faire partie.
Philippe Chauveau :
Néanmoins, on sait que pour faire de la radio ou de la télévision, il y a quand même une écriture derrière, c'est évident. Mais il n'empêche, la presse écrite pourrait être quelque chose qui, à terme, pourrait vous tenter ?
Nathalie Saint-Cricq :
Moi, j'aime bien écrire, mais je ne savais pas si j'en étais capable. Et je me suis dit que j'avais fait de la radio, que j'avais fait de la télé et que j'aimerais bien faire un livre tout en sachant que c'est quelque chose de plus dur. Parce qu’il faut y passer des heures et des heures. Il faut essayer d'être clair sans être basique dans la façon d'écrire. Je ne savais pas si j'allais être lourde. Je ne savais pas si j'allais écrire comme à la télé, de façon hachée. C'est une écriture totalement différente, mais en tout cas, je n'ai pas commencé en me disant que j'allais rentrer là-dedans, que ce serait une promenade de santé et que ça allait être tout de suite bien.
Philippe Chauveau :
On va reparler de ce livre. Mais auparavant, je reviens forcément sur Nathalie Saint-Cricq estampillée journaliste politique. Vous le disiez, la politique aussi fait partie de votre éducation. Cela fait partie de votre famille, de votre héritage familial. Qu'éprouvez-vous lorsque vous parlez de politique en télévision ? Y-a-t’il toujours une certaine jouissance, une impatience à observer ce grand théâtre permanent ?
Nathalie Saint-Cricq :
Je pense que c'est quelque chose d'assez irrationnel quand on aime la politique. Quand j'avais 25 ans, je suivais le Parti socialiste et je passais des nuits entières au comité directeur à attendre les résultats. Je restais la nuit pour savoir ce qui allait se passer. Je trouve rétrospectivement que c'est assez étrange, mais je pense que, pour les gens mordus de politique, c'est une forme de passion. C'est quelque chose, quand on aime ça, c'est plus fort que tout, et chez moi c'est pareil puisqu'avec mon mari on en parle tout le temps.
Philippe Chauveau :
Lui-même étant aussi journaliste politique. Lorsque l'on anime un débat entre deux candidats à la présidentielle, comme ce fut le cas en 2017 entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, que ressent-on ? Avez-vous eu l'impression, à ce moment-là, d'être au sommet de votre parcours de journaliste ? Ou, finalement, était-ce un épiphénomène parmi d’autres ?
Nathalie Saint-Cricq :
D'abord, j'étais morte de peur, une peur viscérale. C'est déjà le sentiment prédominant dans la semaine qui a précédé. Après, une fois qu'on s'est dit que, de toutes façons, on ne peut plus reculer, parce quand on vous le propose, on ne va pas dire non, j'ai peur, on est payé pour ça a priori. On se dit que c'est quand même la chose la plus, pas amusante, c'est quand même un moment assez intense, mais là, c'est un des souvenirs les plus puissants que je garderai.
Philippe Chauveau :
Lorsque l'on parle de politique aux téléspectateurs, qu'on essaie de décrire, de décrypter les rouages de la politique, se sent-on investi d'une sorte de mission en tant que journaliste ?
Nathalie Saint-Cricq :
C'est fort « mission ». On sent un devoir plutôt qu'une mission qui est de ne pas laisser transparaître ce que l'on peut penser. Donc, le devoir, c'est un devoir d'objectivité et le deuxième devoir, ce n'est pas faire du jargon, en gros, de ne pas considérer qu'on est des espèces de sachants, et dire juste "moi, je vais vous donner les clés ». Non, il faut explique : « Il se passe des choses derrière. Il vous raconte des choses, vous voyez des choses. J'ai l'impression que c'est ça qui est derrière." Et ce, en parlant comme tout le monde. Parler comme tout le monde, ça ne veut pas dire être vulgaire ou ça ne veut pas dire faire une espèce de populisme journalistique en simplifiant les choses, ça veut dire parler en expliquant sans se prendre pour une espèce d'expert.
Philippe Chauveau :
Ça, c'était Nathalie Saint-Cricq, la journaliste. Et puis, il y a aussi la femme qui rentre chez elle après avoir été en plateau, qui pose les journaux et qui, peut-être, de temps en temps, a envie de prendre un livre pour penser à autre chose. Quelle lectrice êtes-vous, Nathalie Saint-Cricq? Que trouve t-on sur votre table de chevet?
Nathalie Saint-Cricq :
Je lis beaucoup de biographies, je lis très peu d'essais politiques et je lis pas mal de romans.
Philippe Chauveau :
Plutôt des contemporains, des classiques, de la littérature française, anglophone ?
Nathalie Saint-Cricq :
Je lis souvent les choses qui se vendent beaucoup pour me rendre compte, parce que je trouve que, si on veut être connecté à la société, il faut aller voir les films que tout le monde va voir, lire les livres que tout le monde lit. Je ne me contente pas de ceux-là, mais je me dis que si c'est un phénomène, ça dit sûrement quelque chose sur la société ? Donc là, c'est plus par curiosité. Puis, j'écoute aussi beaucoup ce que me dit mon entourage. Mais récemment, je n'ai pas eu beaucoup de chance parce qu'il y a eu beaucoup de livres que j'ai eu du mal à finir. Je ne sais pas pourquoi.
Philippe Chauveau :
Dites-moi, puisqu'il s'agit là de votre premier livre en librairie, qu'avez-vous ressenti lorsque vous avez ouvert les premiers cartons, lorsque vous avez vu la couverture du livre dans la librairie ?
Nathalie Saint-Cricq :
Je vais vous avouer que je n'ai pas trop regardé parce que j'ai eu un premier mouvement de recul en me disant j’allais me faire assassiner. Le truc que je redoutais, c'était la critique au vitriol, je pense que c'est le cas pour un certain nombre de livres. Je redoutais le côté "ces gens de la télé qui écrivent des livres" parce que bon, en général, ce n'est pas très bien vu. Mais je ne me suis pas faite assassiner. A côté de ça, quand on me dit écrivaine, c'est ridicule !
Philippe Chauveau :
Mais il y a néanmoins le plaisir de montrer une autre facette de votre personnalité à travers le livre ?
Nathalie Saint-Cricq :
Oui, oui, et notamment vis à vis des politiques. Parce qu'à partir du moment où ce n'est pas un livre d'actualité, mais que c'est un livre un peu plus d'histoire sur un autre personnage, cela donne l'impression qu'on a un peu plus d'épaisseur que quand on fait cinquante secondes ou une minute trente à la télé. Alors oui, je ne vais pas bouder ce plaisir-là. On est regardé différemment.
Philippe Chauveau :
Votre actualité Nathalie Saint-Cricq, aux éditions L’Observatoire, « Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir ».
Nathalie Saint Cricq
Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir
Livre 00'07'59"Philippe Chauveau :
Voici donc, Nathalie Saint-Cricq, ce qui est votre premier livre en librairie, « Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir ». Quel joli titre, quelle jolie phrase ! Vous allez nous expliquer comment est né ce livre. On vous connaît, on l'a dit, en tant que journaliste politique. Là, justement, c'est à un monstre politique que vous vous attaquez, mais appartenant à notre histoire déjà ancienne, il y a un peu plus de 100 ans. Pourquoi ce clin d’œil ? Vous gardez un pied dans la politique mais vous faites aussi un pas de côté en allant dans la politique d'il y a cent ans.
Nathalie Saint-Cricq :
Exactement. Je choisis quelqu'un qui a une épaisseur historique et une épaisseur politique qui fait parfois défaut à certains de nos contemporains pour des raisons que je ne vais pas détailler. Donc, je garde la politique en tête et on en parle beaucoup dans le livre. Mais je la prends par un biais qui a peu été exploré avant parce que tout a été dit ou presque sur Clémenceau. Donc là, j'ai trouvé cette histoire en lisant des biographies. C'est bizarre, personne n'en a parlé auparavant. Je ne comprends pas que cela n'ait pas intéressé les biographes de raconter cette histoire. Qu'il ait été amoureux, très bien, à 82 ans, c'est déjà plus étonnant, qu'il ait écrit 668 lettres à une femme, c'est encore plus surprenant et je me suis dit :" Elle, quelle a été sa réaction ?". C'est quelque chose qu'il fallait creuser. J'ai trouvé que cela rendait Clémenceau, non pas sympathique parce que ce n'était pas mon intention spécifique, mais je trouve que c'est bien de raconter l'histoire autrement, toujours avec cette obsession que ce soit grand public, pas rebutant.
Philippe Chauveau :
On plante le décor. Nous sommes au printemps 1923. Clémenceau a 82 ans. Vous le dites, c'est le Père la victoire, c'est le Tigre, on l'aime ou on ne l’aime pas, mais en tout cas, il fait partie déjà partie de l’histoire nationale avec un grand parcours derrière lui. Là, il est dans son dans son bureau parisien et il y a cette jeune femme qui a 40 ans de moins que lui, qui vient parce qu'elle travaille dans le monde de l'édition. Elle veut lui proposer de faire un livre. Elle s'appelle Marguerite Baldensperger. Ils vont faire connaissance et va naître une histoire d’amour entre eux. Vous allez nous expliquer quelle est vraiment la teneur de cette histoire. En tout cas, il y a ces lettres qui ont été conservées et que vous avez pu utiliser pour écrire ce livre. Ce n'est pas un travail de commande, c'est bien vous qui vous êtes intéressée à cette relation.
Nathalie Saint-Cricq :
Ah oui, je trouvais que c'était absolument incroyable cette vie d'une telle richesse ! On peut se dire qu'à 82 ans Clémenceau était fatigué ou qu'il aurait eu les activités d'un homme de son âge à cette époque, c'est à dire écrire quelques lettres, lire quelques livres et puis, le reste du temps, aller se promener. Et là, pas du tout. Il est toujours très actif, agité, il considère qu'il a des livres à écrire. Donc il s'occupe et se passionne. Il voit cette dame qui arrive. Il a toujours aimé les femmes et n'a toujours pas compris qu'à son âge, il doit les regarder éventuellement différemment, comme un grand-père peut le faire. Marguerite a dix ans de moins qu'une de ses filles. Mais il est frappé d'abord parce qu'elle correspond à ses critères physiques. Elle est plutôt fine, plutôt élancée, plutôt discrète, un peu effacée, mais c'est une vraie femme pour lui. Il n'aime pas les femmes trop féministes, agitées. Il est flatté aussi parce qu'elle le regarde et le flatte, lui parle beaucoup et lui propose d’écrire un livre. Et il se dit qu'il n'y a pas de raison de considérer que parce qu'il a 82 ans, ça ne pourrait pas continuer comme avant. Il dira : "Toute ma vie, j'ai été amoureux. Pourquoi arrêter à cet âge ? ».
Philippe Chauveau :
Ce qui aurait pu n'être qu'une simple historiette va être vraiment une belle relation, une belle histoire. Il en reste plus de plus de 650 correspondances qui sont encore lisibles aujourd'hui. Et va naître un vrai respect de part et d'autre entre ces deux êtres qui ont des failles.
Nathalie Saint-Cricq :
Chacun se satisfait car cette histoire tombe au bon moment. Lui est un peu esseulé et un peu triste d'avoir été renvoyé de ses fonctions politiques. Il faut quand même rappeler qu’il a réussi à faire gagner la France en 1918, à récupérer l'Alsace et la Lorraine. Il est vénéré dans toute la France mais ses collègues ne veulent plus de lui. Marguerite, elle, a perdu une fille dans des circonstances tragiques ; elle s'est suicidée à l’âge de 17 ans. Marguerite a probablement une part de responsabilité, ou du moins, elle s'accuse d'avoir une part de responsabilité.
Philippe Chauveau :
Et un mariage qui ne fonctionne pas très bien…
Nathalie Saint-Cricq :
Un mariage qui, à partir de ce drame, commencera à se déliter un peu. En gros, elle n'a plus goût à la vie. Aujourd'hui, on dirait qu'elle est en dépression. Clémenceau va la secouer. Il va lui donner envie de vivre, de se battre, quelquefois très gentiment, en l'aimant sincèrement. Et être aimée par le Père la victoire, quand même, ce n'est pas rien, ce n’est pas le voisin de palier... Quelquefois, il sera extrêmement désagréable, mais ça la réveille. Et les parents de Marguerite qui fréquenteront Clémenceau aussi, lui diront : "Vous nous avez rendu notre fille".
Philippe Chauveau :
Le sujet était éminemment romanesque. En revanche, vous n'avez pas choisi de faire un roman. Vous en avez fait un récit. Vous avez utilisé cette correspondance phénoménale qui existe toujours, en tout cas pour l'un des protagonistes. Et vous avez fait le choix d'imaginer le journal intime de Clémenceau. Finalement, comment avez-vous travaillé ce matériau ? Dès le départ, saviez-vous la forme que vous vouliez lui donner ? Sont-ce Marguerite et Georges qui vous ont tapé sur l'épaule en vous disant : "Voilà, c'est comme ça qu'il faut raconter notre histoire" ? Comment s’est passé l'écriture de ce livre ?
Nathalie Saint-Cricq :
D'abord, j'ai demandé conseil autour de moi à des gens qui savaient écrire ou qui avaient une sorte de vision. Je ne voulais pas faire : "ce jour-là il est rentré ; ce jour-là, elle est arrivée etc...". Je trouvais que ça n'allait pas. Le problème, c'est que Marguerite a demandé à Clémenceau de brûler ses lettres. Donc, on n’a presque plus rien. Il restait quatre ou cinq lettres qu'on a pu retrouver, mais on n'a plus ce qui venait d'elle. Donc, au début, j'ai essayé d'avoir d'abord des informations. Et je me suis dit, la façon la plus distrayante d'écrire, c'est d'imaginer. Cela me permettait d'avoir un contrepoint, en lui faisant dire : "Il a encore été désagréable aujourd'hui, mais finalement, il me donne envie de me lever le matin » ou encore : « Il ronchonne tout le temps". Cela me permettait aussi de le raconter à la première personne, dans les déjeuners de famille par exemple, avec plus de liberté de ton, quelque chose de plus réaliste et quelquefois de plus intime.
Philippe Chauveau :
Au-delà de leur relation, vous avez voulu aussi dépeindre cette époque de l'entre-deux guerres, mettre en en toile de fond la vie politique de l'époque et, à différents moments du récit, faire apparaitre les personnalités que Clémenceau côtoyait. Il y avait aussi cette envie de votre part ?
Nathalie Saint-Cricq :
Mais oui parce qu’honnêtement, parler de Clémenceau simplement sous le prisme d'une relation avec Marguerite c'était un peu court.
Philippe Chauveau :
Et il reste un homme politique.
Nathalie Saint-Cricq :
Clémenceau est un homme politique, certes mais en plus, là où il est le plus drôle, c’est qu’il est connu pour ses mots d'esprit, son humour et un certain nombre d'anecdotes où il était absolument impayable. Je trouve que cela méritau vraiment d'être raconté.
Philippe Chauveau :
Si d'un mot, après avoir écrit et raconté cette histoire, vous deviez définir Georges Clemenceau, que diriez-vous ?
Nathalie Saint-Cricq :
Libre, drôle, infernal. Trois mots.
Philippe Chauveau :
C'est une bonne définition. C'est votre actualité, Nathalie Saint-Cricq, ce premier livre que vous publiez donc aux éditions de L'Observatoire, « Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir ». Merci beaucoup.