Né en 1974 en Nouvelle Calédonie, Enguerrand Guépy a publié son premier titre en 2006, « L'effervescence de la pitié », récit autobiographique sur les déboires de l'adolescence qui peuvent mener à la délinquance. Deux romans vont suivre, « L'éclipse » inspiré des trois jours entre la mort et la résurrection du Christ et « Marie-Madeleine », cette femme énigmatique, que les Ecritures présentent à la fois sainte et prostituée.Evoluant aussi dans l'écriture théâtrale, Enguerrand Guépy est assurément un auteur à...
Un fauve d'Enguerrand Guépy - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :
Bonjour Enguerrand Guepy. Vous publiez aux éditions du Rocher ce nouveau titre, « Un Fauve ». C'est à la fois votre 4ème livre mais votre 3ème roman puisque finalement votre premier ouvrage publié en 2006 était un récit autobiographique. Pourquoi avoir envie de démarrer dans la littérature avec un récit dans lequel il est question de vous ?
Enguerrand Guepy :
Je suis tombée dans le cliché réservé à tous les auteurs, raconter sa vie dès le 1er livre. J'ai un parcours un peu différent car j'ai...
Un fauve d'Enguerrand Guépy - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :
Nous sommes le 16 juillet 1982, une information arrive à la radio un peu partout en France, la mort de Patrick Dewaere, cet acteur qui a 35 ans et qui se suicide alors qu'il est en pleine gloire, en tournage d'un film de Claude Lelouche, « Edith et Marcel ». C'est la toute dernière journée de Patrick Dewaere que vous avez souhaité nous raconter Enguerrand Guepy à travers ce titre, « Un Fauve ». Pourquoi vous êtes vous focalisé sur cette dernière journée ? Vous auriez pu nous faire une biographie de...
Un fauve d'Enguerrand Guépy - Livre - Suite
Enguerrand Guépy
Un fauve
Présentation 1'58Né en 1974 en Nouvelle Calédonie, Enguerrand Guépy a publié son premier titre en 2006, « L'effervescence de la pitié », récit autobiographique sur les déboires de l'adolescence qui peuvent mener à la délinquance. Deux romans vont suivre, « L'éclipse » inspiré des trois jours entre la mort et la résurrection du Christ et « Marie-Madeleine », cette femme énigmatique, que les Ecritures présentent à la fois sainte et prostituée.
Evoluant aussi dans l'écriture théâtrale, Enguerrand Guépy est assurément un auteur à suivre, une vraie plume.
Changement de registre avec ce nouveau titre, « Un fauve », par lequel l'auteur nous ramène au début des années 1980. Et plus précisément, le 16 juillet 1982. Ce jour-là, en fin d'après-midi, l'acteur Patrick Dewaere se donne la mort, à l'âge de 35 ans. Geste incompréhensible pour ses proches, alors qu'il était en plein projet cinématographique et semblait avoir chassé ses démons. Que s'est-il passé ce vendredi d'été? Que lui a-t-on dit dans ce fameux coup de fil qui semble l'avoir fait basculer ? Quelles étaient les vraies fêlures de ce comédien surdoué que les journalistes avaient pris en grippe ? Qui était-il ce fauve indompté qui avait triomphé dans des films devenus cultes « Les valseuses », « Beau-père » ou « Préparez vos mouchoirs »?
Pour son quatrième livre, le romancier Enguerrand Guépy s'est emparé de l'histoire de Patrick Dewaere et nous raconte la dernière journée de l'acteur, les dernières heures avant le drame.
Mais surtout, en nous racontant Patrick Dewaere, il nous parle d'un homme seul, désespéré, que plus rien ne peut éloigner de l'abîme, un homme qui pourrait être monsieur tout le monde. C'est fort, puissant, écrit avec beaucoup de sensibilité, de finesse, d'émotion. Ce livre est une petite pépite.
« Un fauve » d'Enguerrand Guépy est publié aux éditions du Rocher.
Enguerrand Guépy
Un fauve
Portrait 6'13Philippe Chauveau :
Bonjour Enguerrand Guepy. Vous publiez aux éditions du Rocher ce nouveau titre, « Un Fauve ». C'est à la fois votre 4ème livre mais votre 3ème roman puisque finalement votre premier ouvrage publié en 2006 était un récit autobiographique. Pourquoi avoir envie de démarrer dans la littérature avec un récit dans lequel il est question de vous ?
Enguerrand Guepy :
Je suis tombée dans le cliché réservé à tous les auteurs, raconter sa vie dès le 1er livre. J'ai un parcours un peu différent car j'ai commencé par le théâtre. J'ai eu une compagnie pendant une dizaine d'années. « L'effervescence de la pitié » n'est pas mon premier texte mais c'est le premier à avoir été publié. Ce texte était une nécessité quand je l'ai écris.
Philippe Chauveau :
Un texte fort, difficile. Si je résume, vous êtes né en Nouvelle Calédonie dans une famille où tout se passait bien, vous avez eu une enfance classique. Mais vous avez eu envie de témoigner de certaines fêlures, certaines faiblesses que vous avez pu ressentir.
Enguerrand Guepy :
J'ai eu une jeunesse classique jusqu'au départ de mon père. A partir de ce moment là ma vie a basculé dans autre chose. Tout à coup les choses dures sont réapparues.
Philippe Chauveau :
Si j'évoque « L'effervescence de la pitié », c'est parce qu'il me semble qu'il y a un lien avec la suite de votre parcours littéraire. Dans cet ouvrage vous racontez aussi ce qui vous a aidé à vous construire, c'est la découverte d'un auteur du 19ème, Léon Bloy qui fût un polémiste, qui a écrit pas mal de choses et que l'on connait aussi car il a été chrétien mais aussi anti-clérical. Cela a été pour vous une découverte, et on ne s'étonnera pas que les deux romans que vous publiez ensuite aient une connotation religieuse, « L'Eclipse » et « Marie-Madeleine ». Pourquoi ce besoin, en tant que romancier, de vous intéresser à la thématique religieuse ?
Enguerrand Guepy :
Bloy a été un choc littéraire quand je l'ai lu, je suis tombée par hasard sur « Le Mendiant ingrat », son journal intime, extrêmement violent, et cela m'a parlé. Je me suis forcément intéressé à la religion et j'ai été amené à lire des grands textes, j'ai découvert St Augustin, St Thomas d'Aquin. « Eclipse » est le livre qui m'a donné ma plus belle joie d'écriture.
Philippe Chauveau :
Aujourd'hui vous revenez avec un sujet beaucoup plus contemporain, vous venez nous parler de Patrick Dewaere. Sans entrer dans le vif du sujet avec le livre, quel est le lien avec tous ces titres ? Je vois peut être un lien avec votre premier récit autobiographique inspiré de Léon Bloy. Pourquoi Patrick Dewaere après ces précédents ouvrages dont nous avons parlé ?
Enguerrand Guepy :
Parce que pour moi, c'est presque la couverture du cercle. C'est à dire qu'avec Dewaere j'ai l'impression d'avoir terminé un cycle qui comprend aussi « L'Eclipse » et « Marie Madeleine ». Quand Dewaere se suicide j'ai 8 ans, c'est un moment qui m'a autant troublé que la découverte de Léon Bloy. Ce texte vient clore tout un processus familial et religieux. Il m'a été plus facile d'écrire sur le Christ que sur Dewaere.
Philippe Chauveau :
On va suivre votre travail avec attention. Romancier et dramaturge, Enguerrand Guepy votre actualité aux éditions du Rocher, « Un Fauve ».
Enguerrand Guépy
Un fauve
Livre 7'08Philippe Chauveau :
Nous sommes le 16 juillet 1982, une information arrive à la radio un peu partout en France, la mort de Patrick Dewaere, cet acteur qui a 35 ans et qui se suicide alors qu'il est en pleine gloire, en tournage d'un film de Claude Lelouche, « Edith et Marcel ». C'est la toute dernière journée de Patrick Dewaere que vous avez souhaité nous raconter Enguerrand Guepy à travers ce titre, « Un Fauve ». Pourquoi vous êtes vous focalisé sur cette dernière journée ? Vous auriez pu nous faire une biographie de Patrick Dewaere. Vous avez vraiment voulu nous raconter du matin, jusqu'à la mort de Patrick Dewaere.
Enguerrand Guepy :
Je n'ai pas trop eu le choix, parce qu'à chaque fois que j'ai voulu faire différemment je n'y arrivais pas. Ce livre n'a pu avancer qu'à partir du moment où j'ai accepté de ne parler de Dewaere que sur son dernier jour. J'ai plusieurs fois essayé de rebâtir le projet, de reprendre le texte différemment, mais je n'y arrivais pas, très vite j'ai abandonné. Les seuls moments où le boulot avançaient, c'était quand j'acceptais d'affronter Patrick Dewaere le jour de sa mort, comme dans un match de boxe.
Philippe Chauveau :
Vous aviez 8 ans lorsque Patrick Dewaere est décédé et curieusement cet événement vous a marqué, et Patrick Dewaere a fait partie de votre vie au fil des ans au point que vous écrivez aujourd'hui sur lui. Pourquoi vous a t-il autant fasciné ce personnage ?
Enguerrand Guepy :
Je crois qu'il ressemblait à un de mes oncles. Maintenant plus ça va et plus je me dis qu'à la maison il y avait un côté un peu bohème, et je crois que quand Dewaere s'est suicidé en 82, j'ai eu un choc car j'avais le sentiment que quand cet acteur qui ressemblait à quelqu'un de ma famille est mort, c' était quelqu'un de ma famille qui était mort.
Philippe Chauveau :
On l'a dit, vous faites le choix de raconter Dewaere sur une journée, sur sa dernière journée, mais plusieurs temps forts de sa vie sont évoqués au fil des pages et plusieurs des personnages qu'il côtoie, que ce soit sa mère Mado Robin, Coluche, Claude Lelouche qui travaille sur ce dernier film qu'ils devaient faire ensemble. Comment vous même avez-vous pu préparer votre écriture, avez-vous pu rencontrer des proches de Dewaere ? Comment vous êtes vous documenté, d'où tenez-vous vos sources pour que le romancier puisse ensuite avoir son terreau ?
Enguerrand Guepy :
J'ai eu la chance de travailler avec un de ses frères quand j'avais ma compagnie de théâtre, j'ai eu un projet où je travaillais avec Yves-Marie Morin qui est décédé maintenant. J'ai pu rencontrer la mère de Patrick Dewaere à cette occasion, les autres frères de Dewaere aussi, donc j'ai vécu un peu dans l'univers Morin. Il y quelque chose qui m'a imprégné, j'ai vu un Dewaere qu'on ne voit pas.
Philippe Chauveau :
Je vais me permettre si vous le voulez bien, de lire juste quelques lignes. C'est le début du 5ème chapitre, « La voiture fait le chemin en sens inverse. Les mêmes rues que tout à l'heure, l'indolence qui gagne du terrain, un soleil presque triomphant bientôt voilé par quelques nuages rebelles. Le fauve observe tout cela d'un oeil conciliant. Il est sur le point de s'abandonner au pittoresque de circonstance, mais son esprit ne peut oublier ce chien fou et sa maîtresse accablée. Il n'arrive plus à ramener cette scène à sa juste proportion. Pourquoi faut-il toujours qu'il se raccroche à la fêlure des gens, à leur faiblesse, à ce qui ne tourne pas rond dans leur petite cervelle ? Pourquoi ne s'attachent-ils pas à des gens normaux, sans soucis, fades, pire que des navets, qui n'espèrent pas de revanche dans la vie, qui n'ont pas souffert, et qui surtout, ne veulent pas souffrir ? ». Vous racontez Patrick Dewaere, mais finalement vous racontez un type un peu paumé de 35 ans au milieu des années 80, un type trahi qui a connu la gloire mais qui n'arrive pas à gérer cette gloire. Patrick Dewaere cela pourrait être Mr tout le monde. La force du livre est là, au delà de Patrick Dewaere c'est un homme seul et accablé que vous racontez.
Enguerrand Guepy :
C'est un homme cerné par les soucis. C'est quelqu'un qui n'a pas, à ce moment de sa vie, de moyen de se raccrocher. C'était un acteur qui avait des problèmes avec la drogue, avec le fisc, des problèmes de coeur et c'est un comédien, et le comédien doute tout le temps. La pire des choses, c'est quelqu'un qui est tout le temps dans le désir des autres. Patrick Dewaere s'interrogeait énormément sur l'avenir de sa carrière.
Philippe Chauveau :
Le dernier jour de Patrick Dewaere mais c'est surtout le dernier jour d'un homme désespéré que vous nous racontez avec beaucoup de sensibilité et d'émotion dans ce livre publié aux éditions du Rocher, ça s'appelle « Un Fauve ».
Enguerrand Guépy
Un fauve
L'avis du libraire 2'24