Sophie Fontanel

Sophie Fontanel

Nobelle

Livre 00'07'14"

Philippe Chauveau :
Dans ce nouveau titre, nous faisons connaissance avec une jeune femme elle s'appelle Annette Comte. Tout va bien pour elle puisque nous sommes en décembre 2019 à Stockholm et elle reçoit le Prix Nobel de littérature. Pour remercier ceux qui lui ont attribué ce prix, elle va raconter comment l'écriture est entrée dans sa vie. Nous revenons alors à l'été 1972. Le grand père d’Annette vient de mourir, son père est imprimeur et ils vont partir en vacances à Saint-Paul-de-Vence. Pour son anniversaire, la petite fille va recevoir un stylo plume. Elle en rêvait ! Son frère Yoyo n’hésite pas à dire :
« C'est pour ma soeur Annette qui est écrivain ! ».
Qui est cette petite Annette que nous allons suivre pendant cet été 1972 dans cette maison de vacances, en Provence ?

Sophie Fontanel :
Evidemment, il y a une part de ce que j'ai pu ressentir dans l'enfance quand j'ai commencé à écrire mais ce n'est pas mon histoire. Pour moi, Annette est l'incarnation de la créativité qu'on a tous en chacun de nous mais il y a une injustice. C’est pourquoi il y a Annette et son copain Magnus qui a dix ans. Elle, sait écrire et Magnus, lui, ne sait pas écrire. Elle est là l’injustice. Il y a ceux qui y arrivent et il y a ceux qui n'y arrivent pas. Annette incarne celle qui y arrive.

Philippe Chauveau :
Cette petite Annette a très vite conscience que l'écriture va faire partie de sa vie. Elle a envie d'écrire, parfois même elle invente des mots. Et puis, il y a l'amour qui fait irruption dans son été 1972 avec le jeune Magnus qui est l'enfant d'un couple d'amis de ses parents. Le père d'Annette est imprimeur et les parents de Magnus sont éditeurs. On va faire également connaissance avec un écrivain qui est installé à Saint-Paul-de-Vence. Tout ce petit monde se côtoie, ce qui veut dire qu’Annette va vivre son été au milieu des gens qui vivent dans la littérature.

Sophie Fontanel :
Je l'ai fait exprès. Je voulais que cette petite fille, dont le talent est évident, ne soit pas reconnue, à part par le grand écrivain qui décèle quelque chose. Mais son talent n’est pas reconnu alors qu'elle est au coeur de l'endroit où tout le monde rêverait d'aller pour se faire reconnaître. Mais personne ne la voit !

Philippe Chauveau :
Avec le personnage d'Annett,e vous évoquez le talent précoce et on ne peut pas s'empêcher de penser à Minou Drouet qui a défrayé la chronique dans les années 60. D'ailleurs, vous lui dédiez ce livre. On peut rappeler qui était Minou Drouet dont on a douté du talent.

Sophie Fontanel :
Minou Drouet a 8 ans quand elle envoie, par sa mère, un manuscrit à René Julliard qui venait d'éditer Françoise Sagan. Donc, on s'est dit qu’il aimait bien les jeunes. Elle a 8 ans et Julliard va trouver les poésies dingues et va les éditer. Et ça va avoir un succès dingue ! Mais des gens aussi connus qu’André Breton ou Jean Cocteau vont partir en guerre contre cette petite fille. Jean Cocteau dira que tous les enfants sont poètes sauf Minou Drouet ! Ils vont la pulvériser, un peu comme on fait maintenant avec cette jeune Greta Thunberg qui milite pour l'écologie.
Je lui ai dédié mon livre et j’ai su, il n'y a pas longtemps, en allant à Rennes, qu’elle a été absolument bouleversée que quelqu'un pense encore elle. Les adultes ont fichu sa vie en l'air. Tout ça parce que c'était une petite fille ! Il aurait s’agit d’un petit garçon, je pense que Jean Cocteau aurait été beaucoup plus indulgent…

Philippe Chauveau :
Ce qui fait le charme de ce roman, c'est bien sûr le personnage d'Annette qui découvre la littérature et qui a ce talent précoce. Mais c'est aussi l'ambiance que vous avez su restituer. Nous sommes donc à Saint-Paul-de-Vence au début des années 70 et tout y est ! Il y a les cigales, il y a le bruit de la piscine, les adultes qui se réunissent très tard autour d'une table avec un bon verre de rosé… Ce sont les vacances. Vous avez su créer une vraie atmosphère. Quels sont les outils que vous avez utilisés pour créer ce décor ?

Sophie Fontanel :
L'outil principal, c'est cette chère petite Annette. C'est elle qui raconte quand elle reçoit le prix Nobel. Elle est écrivaine depuis qu'elle a 10 ans. Et quand elle a commencé à écrire à 10 ans, elle lisait le monde d'une manière extraordinaire. Proust disait à Cabourg :
« Cet homme n'est pas un écrivain car il ne pense pas comme moi que les assiettes sont des planètes ».
Et bien, voilà ! A 10 ans, Annette voit le monde d'une manière absolument merveilleuse…

Philippe Chauveau :
Il y a beaucoup de choses dans l'histoire d'Annette. Cet été-là, il y cette chronique dans cette maison de Provence. Il y a les chagrins d'amour avec Magnus qui va peut-être trahir la confiance qu’Annette lui a témoignée. Il y a la découverte de la littérature et le talent précoce d’Annette. Et puis, il y a aussi cette histoire qui finalement est imbriquée dans ce discours officiel à l'Académie puisqu'on l'a dit en préambule, nous retrouvons Annette en 2019, lorsqu'elle reçoit le Prix Nobel de littérature.

Vous auriez très bien pu raconter cette histoire d'enfance. Alors pourquoi avoir voulu qu'il y ait au début et à la fin, ce retour à notre époque, ce moment où nous sommes à l'Académie Nobel ?

Sophie Fontanel :
Cela me permettait d'abord de donner le prix Nobel à quelqu'un, enfin à quelqu'une parce qu'il n'y a que huit ou neuf femmes à ma connaissance qui l’ont reçu. Cela ne fait pas beaucoup de femmes à avoir eu le prix Nobel donc déjà ça m'amusait. C'est comme une farce.
Et puis, Annette va vivre un chagrin d'amour cet été-là, il va se passer quelque chose. Et je le dis à la fin du livre. Ce que comprend Annette, c’est qu’un écrivain ne peut pas se plaindre de ses chagrins d'amour car tout ce que vit celui qui sait écrire va aboutir à de l'écriture.

Philippe Chauveau :
Vous avez choisi de titrer ce livre « Nobelle » avec deux « l ». Clin d'œil ou militantisme ? Pourquoi ce choix ?

Sophie Fontanel :
Je me disais que tout le monde allait comprendre quelque chose si je mettais « Nobelle ». Je vous jure que je n'ai pas pensé plus loin ! je me suis dit que si je mettais le titre au féminin, tout le monde comprendrait que ça parle de quelque chose de féminin. Et il faut que je vous dise une chose : quand j'étais enfant, je pensais que le prix Nobel était accordé aux gens nobles, à celui qui a démontré qu'il avait une attitude noble. Tout ça parce qu’un jour, mon père
m'a dit qu’un noble est celui qui se comporte de manière noble. Il m'avait menti car ce n'est pas du tout ça un noble ! Mais pour moi, le prix Nobel était vraiment l’anoblissement à partir de qualités qu'on avait. Donc j'ai anobli cette petite fille puisque je me disais que je serais peut-être la seule à le faire…

Philippe Chauveau :
Cette petite fille, Annette, qui est un personnage que l'on garde longtemps en mémoire. Il y a des livres qui sont de jolies rencontres. Il y a dans ce roman la douceur et l'humour mais aussi la violence de l'enfance, la découverte du talent, l'importance de la littérature dans nos vies. Tout cela dans ce bel univers de la Provence des années 70. Merci beaucoup Sophie Fontanel, « Nobelle » publié chez Robert Laffont.

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  • Pétillante, c’est l’un des termes qui pourrait définir Sophie Fontanel, passionnée aussi.Journaliste à l’Obs, elle fut longtemps chroniqueuse de mode pour le magazine Elle. Elle continue d’ailleurs à prodiguer des conseils sur les réseaux sociaux. Mais à côté de cette écriture journalistique, Sophie Fontanel est aussi romancière et sa propre vie a souvent été le prétexte de ses livres. « Grandir » sur la dépendance de sa mère, « L’amour dans la vie des gens » sur la désillusion sentimentale, « La...Nobelle de Sophie Fontanel - Présentation - Suite
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