Si elle-même a publié un roman en 1976, « L’involontaire » qui ressort ces temps-ci chez Phébus, c’est avant tout en tant qu’attachée de presse dans l’édition que Blandine de Caunes s’est fait un nom, voire même un prénom. Quand ses propres parents s’appellent Benoîte Groult et Georges de Caunes, il faut assurer, ce n’est jamais facile de pousser à l’ombre des grands arbres.
Sur son père, souvent absent et peu attaché aux contingences familiales, elle reste discrète. S’agissant de son beau-père, en...
La mère morte de Blandine de Caunes - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :
Bonjour Blandine De Caunes, merci d'avoir accepté notre invitation. « La mère morte », c'est votre actualité aux éditions Stock. Faisons un peu plus connaissance au préalable, même si on vous connaît bien. En tout cas, vous avez un nom qui parle, un nom qui claque, la famille de Caunes. Vous êtes la fille de Georges de Caunes, le journaliste. Vous êtes aussi la fille de Benoîte Groult, l'écrivaine. Et ça, vous le précisez très souvent ! Vous mettez bien le "e" puisque votre maman a beaucoup milité...
La mère morte de Blandine de Caunes - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :
Vous avez choisi, Blandine de Caunes, de vous adresser aux lecteurs de façon très directe. C'est un peu comme un journal ce que vous nous proposez avec « La mère morte ». Le titre est très parlant, le titre claque. On va bien sûr reparler de ce titre que vous avez choisi. Il y a aussi le bandeau sur la couverture où vous êtes avec votre maman et avec votre fille Violette. Vous nous racontez la maladie d'Alzheimer qui va s'emparer de cette femme que fut Benoîte Groult et qui fut surtout votre mère....
La mère morte de Blandine de Caunes - Livre - Suite
Blandine de Caunes
La mère morte
Présentation 00'02'43"Si elle-même a publié un roman en 1976, « L’involontaire » qui ressort ces temps-ci chez Phébus, c’est avant tout en tant qu’attachée de presse dans l’édition que Blandine de Caunes s’est fait un nom, voire même un prénom. Quand ses propres parents s’appellent Benoîte Groult et Georges de Caunes, il faut assurer, ce n’est jamais facile de pousser à l’ombre des grands arbres.
Sur son père, souvent absent et peu attaché aux contingences familiales, elle reste discrète. S’agissant de son beau-père, en revanche, 3ème époux de sa mère, Paul Guimard, elle ne tarit pas d’éloges. Et là encore, grandir auprès de celui qui a écrit des romans mémorables comme « Les choses de la vie » ou « L’âge de pierre », voilà qui forge une personnalité.
C’est avec un ouvrage très personnel que Blandine de Caunes est aujourd’hui dans l’actualité. « La mère morte » paru chez Stock.
C’est effectivement sa mère que Blandine de Caunes met au cœur de son livre. Si on garde en mémoire Benoîte Groult, la battante, la féministe, l’intransigeante, l’écrivaine, elle qui a tant milité pour la féminisation des noms de professions, on sait moins ce que furent ses dernières années, elle qui vécut jusqu’à 96 ans.
Dans ce beau récit, bouleversant, profondément humain, sa fille Blandine nous raconte la vieillesse, la déchéance, la souffrance des proches quand Alzheimer s’empare de ceux qui ont tant été la vie.
Mais le récit prend encore une autre dimension quand Blandine de Caunes révèle le drame qui, dans le même temps, bouleversa son existence. Sa fille unique, Violette, trouve la mort sur une route ensoleillée, à l’âge de 36 ans. Ainsi donc, en 2016, année de ses 70 ans, Blandine de Caunes perd son enfant unique et sa propre mère. Elle écrit « Maman est un mot qui a disparu de ma vie. Je ne le dirai plus, je ne l’entendrai plus ».
Avec pudeur, sensibilité, sans voyeurisme ni sans pathos, avec une belle écriture qui emporte le lecteur, entre sourire et larmes, Blandine de Caunes se dévoile, nous raconte, sans rien cacher de ses doutes, de sa tristesse, de sa révolte. Mais son récit est aussi et surtout un formidable témoignage de vie, de joie, d’enthousiasme où l’amour et l’amitié tiennent un rôle essentiel. Dans ce récit au jour le jour, quand les épreuves s’accumulent, chaque petit bonheur prend un sens inattendu, chaque mot tendre devient un baume réparateur. Les lieux se révèlent être des havres de paix où les souvenirs heureux affluent et par un mot, une photo, un objet, les chers disparus s’invitent pour aider à porter le fardeau et continuer l’histoire familiale. Hommage à sa fille, hommage à sa mère, le livre de Blandine de Caunes est une pépite triste mais lumineuse dont la lecture est indispensable.
« La mère morte » de Blandine de Caunes est publié aux éditions Stock.
Blandine de Caunes
La mère morte
Portrait 00'06'22"Philippe Chauveau :
Bonjour Blandine De Caunes, merci d'avoir accepté notre invitation. « La mère morte », c'est votre actualité aux éditions Stock. Faisons un peu plus connaissance au préalable, même si on vous connaît bien. En tout cas, vous avez un nom qui parle, un nom qui claque, la famille de Caunes. Vous êtes la fille de Georges de Caunes, le journaliste. Vous êtes aussi la fille de Benoîte Groult, l'écrivaine. Et ça, vous le précisez très souvent ! Vous mettez bien le "e" puisque votre maman a beaucoup milité pour cela. On a souvent tendance à dire qu'il est difficile de pousser à l'ombre des grands arbres. Avez-vous ressenti cela lorsque vous étiez enfant, adolescente ?
Blandine de Caunes :
Pas du tout. Je trouve que j'ai eu une chance folle d'avoir des parents aussi exceptionnels, talentueux, brillants, cultivés. Je trouve que c'est une grande chance et c'est beaucoup plus difficile de pousser à côté d'arbrisseaux, par exemple. Non, je pense que mon enfance a été un privilège.
Philippe Chauveau :
Je ne trahis aucun secret en disant que votre beau-père, Paul Guimard, a aussi été très présent, puisque votre père avait soif de liberté
Blandine de Caunes :
C'est lui qui m'a élevée. Mes parents ont divorcé quand j'avais environ deux ans et demi. Donc moi, je n'ai que le souvenir de Paul Guimard a la maison, qui m'a élevée.
Philippe Chauveau :
Un père journaliste et lui-même auteur, une mère essayiste et écrivaine, un beau-père lui-même romancier, "Les choses de la vie", par exemple, pour ne citer qu'un de ses titres. Ce qui veut dire que le livre, l'écriture, la littérature, vous êtes tombée dedans lorsque vous étiez petite ? C'était une évidence ?
Blandine de Caunes :
J'ai baigné dedans ! Les gens qu'on recevait à la maison étaient beaucoup d’écrivains. Il y eut aussi Léo Ferré qui écrivait des poèmes, un poète, des hommes politiques aussi à partir des années 1970. Paul était éditeur aussi, en plus d'être écrivain. Donc, j'ai vraiment baigné dans ce milieu-là.
Philippe Chauveau :
Avez-vous l'impression que, parfois, on vous a imposé le livre ? Est ce qu'on vous a forcée à lire ?
Blandine de Caunes :
Ah non, pas du tout ! Moi, j'avais cette passion dès l'enfance. C'est tout naturellement que je lisais. On était très libre chez nous.
J'ai commencé à lire vraiment jeune et je lisais tout, de la littérature contemporaine mais aussi les classiques. J'avais des livres de poche que j'ai toujours. J'ai lu Proust en livre de poche. J'en ai perdu un dans le train et j'en suis très malheureuse.
Philippe Chauveau :
Vous lancez un message ?
Blandine de Caunes :
Oui, je lance un message, mais sans grand espoir…
Philippe Chauveau :
Vous avez même écrit. Il y avait eu « L'involontaire » en 1976, qui est réédité chez Phébus dans l'actualité de ces mois-ci. Mais c'est surtout en tant qu’attachée de presse dans l'édition que vous vous êtes fait un prénom. Qu'avez-vous aimé dans ce contact entre les auteurs et leurs lecteurs ?
Blandine de Caunes :
D'abord, j'ai adoré rencontrer des écrivains. Cela ne me changeait pas beaucoup, mais j'étais très contente de mon sort. Je défendais les livres des écrivains. Évidemment, il y en a que l’on préfère plus ou moins, mais il y en avait beaucoup que j'aimais énormément. J'ai eu beaucoup de rencontres formidables. Je pense à Jorge Amado par exemple, dont j'ai été l'attachée de presse. Je pense à beaucoup d'autres encore. J'ai beaucoup aimé défendre les livres des autres.
Philippe Chauveau :
Aujourd'hui, quel regard portez-vous sur le monde littéraire ?
Blandine de Caunes :
Je crois que c'est de plus en plus difficile. Avant, il y a vingt ans par exemple, vous changiez de maison facilement. Vous en aviez marre, envie d’aller ailleurs, vous donniez votre démission et trois mois après maximum, vous étiez quelque part. Aujourd'hui, les gens hésitent à changer parce que les places sont chères, l'édition marche moins bien. Le tirage moyen des livres a baissé. Donc, c'est difficile. Mais il y a toujours de petites maisons d'édition qui se montent et ça, c’est formidable. Donc, il y a encore des gens qui investissent, non seulement du temps, mais de l'argent. Il faut en trouver, mettre beaucoup d'argent, ça coûte cher une maison d'édition, et je trouve ça formidable qu'il y ait toujours cette passion.
Philippe Chauveau :
Selon vous, qu'est-ce qu'un bon livre ?
Blandine de Caunes :
Il y a une phrase de Kafka que j'aime beaucoup : « Un livre doit fendre la mer gelée qui est en nous." Je trouve ça beau, parce que cela veut dire que ça nous emmène dans d'autres univers. Cela nous oblige à comprendre des choses auxquelles on n'avait pas pensé forcément, auxquelles on n’aurait pas été sensible. Je pense que la littérature nous ouvre l'esprit et le cœur.
Philippe Chauveau :
Est-ce que, parfois, les livres ont aussi été pour vous des remparts, des moyens pour vous, de vous abriter des épreuves que vous envoyait la vie. Est-ce que le livre sert aussi à cela ?
Blandine de Caunes :
Oui, oui, parce qu'on y retrouve un chagrin d'amour. Je pense à Goethe et à Werther, beaucoup de jeunes gens se sont suicidés après avoir lu ça, mais d'autres ont continué à vivre et ça, ça les a aidés. Moi, je pense que cela m'a aidée plusieurs fois dans ma vie ou dans des moments heureux ou dans des moments malheureux.
Philippe Chauveau :
Je le disais, là, il s'agit d'un récit dont nous allons reparler, vous avez également collaboré à certains ouvrages de votre maman, Benoîte Groult, il y avait eu une œuvre romanesque avec ce roman en 1976. Auriez-vous encore cette envie ? Est-ce que la plume romanesque vous démange ?
Blandine de Caunes :
Et bien oui, maintenant, voyez-vous, j'ai arrêté de travailler dans l'édition, je travaille pour moi. Oui, parce que je me suis occupé des « Journaux d'Irlande » de maman, ces « Carnets de pêche et d'amour » qui sont sortis en 2016. Donc, j'ai fait tout le travail que la maladie l'avait empêchée de faire. Je les ai mis en ordre, je les ai construits. Et puis il y a ce livre là, i y a eu la réédition, début janvier, de « L'involontaire ». Puis j'ai deux ou trois idées encore...
Philippe Chauveau :
On va vous suivre de près, Blandine De Caunes. Votre actualité en ce début d'année 2020, c’est « La mère morte ». Vous êtes publiée aux éditions Stock.
Blandine de Caunes
La mère morte
Livre 00'07'41"Philippe Chauveau :
Vous avez choisi, Blandine de Caunes, de vous adresser aux lecteurs de façon très directe. C'est un peu comme un journal ce que vous nous proposez avec « La mère morte ». Le titre est très parlant, le titre claque. On va bien sûr reparler de ce titre que vous avez choisi. Il y a aussi le bandeau sur la couverture où vous êtes avec votre maman et avec votre fille Violette. Vous nous racontez la maladie d'Alzheimer qui va s'emparer de cette femme que fut Benoîte Groult et qui fut surtout votre mère. Pourquoi avoir eu envie de nous parler de cette maladie ? Parce que le livre est né depuis déjà pas mal de temps.
Blandine de Caunes :
L'envie de ce livre est née depuis pas mal de temps, pour deux raisons.
Chez nous, tout passe par les mots, par le journal intime ou par le roman et l'autobiographie. Moi, je prenais des notes sur maman. Quand la maladie a commencé à s'installer, je savais qu’elle ne pourrait pas écrire elle-même le dernier chapitre de sa vie. Maman a écrit, a raconté toute sa vie sous la forme de fiction ou de l'autobiographie. Évidemment, elle ne pouvait pas écrire ce dernier chapitre. C'était un peu comme un devoir pour moi de le faire à sa place.
Philippe Chauveau :
Et alors, il y a cette maladie. C'est vrai qu'on en parle beaucoup de la maladie d'Alzheimer, mais on a souvent l'impression que cela ne se passe que chez les autres. Et puis, la maladie est entrée dans votre famille.
Blandine de Caunes :
La maladie était déjà entrée dans ma famille puisque ma grand-mère, la mère de maman, l'avait eue. Donc, je m'en souviens très bien. Et Flora, la sœur de maman, l'a eue assez jeune aussi. Elle est morte il y a déjà fort longtemps. Donc je savais que cela existait de près. Maman, elle, était persuadée qu'elle n'aurait jamais Alzheimer. Et nous, on voulait s'en persuader aussi. Au début, on n'a pas voulu voir les premiers petits signes.
Philippe Chauveau :
Vous le dites dans le livre, elle pensait pouvoir passer à travers.
Blandine de Caunes :
Elle pensait pouvoir passer à travers toutes les maladies ! Elle pensait plus ou moins qu'elle était immortelle à mon avis…
Philippe Chauveau :
Ce que vous faites remarquer également dans l'ouvrage c'est que, lorsque l'on vous parle de votre maman, on parle de Benoîte Groult, la battante, la féministe, la femme forte, celle à qui rien ne peut arriver. Vous, au contraire, c'est bien la femme fragile que vous avez envie de nous présenter. Parce que là, elle devient dépendante, c'est vous et votre sœur, notamment, qui allez beaucoup vous occuper d'elle. C'est une autre Benoîte Groult que vous cherchez à nous présenter.
Blandine de Caunes :
Oui, je veux la montrer dans son dernier avatar finalement, qui est une vieille femme malade. Parce que ça fait partie, comme disait Montaigne, de l'humaine condition. Et Montaigne, comme maman, comme Simone de Beauvoir, des écrivains qu'elle admirait beaucoup, estimait qu'il fallait tout raconter, tout dire. Ce n'est pas une honte d'être vieux, d'être malade et ça fait partie de la condition humaine. Je trouve que cela nous intéresse tous de savoir à quoi ça ressemble.
Philippe Chauveau :
Ce récit va s'étaler sur quelques années, sur un laps de temps finalement assez court. C'est aussi l'occasion pour vous de nous parler de votre famille, de parler de votre propre parcours. On sent que beaucoup de souvenirs ont afflué lors de l'écriture, que beaucoup de personnages, et même des personnages disparus, vous ont peut-être accompagnée, vous ont aidée à porter la plume pour raconter cette histoire.
Blandine de Caunes :
D'abord mon clan, ma tribu, parce qu'on est une famille recomposée. Une famille d'abord décomposée, puis recomposée, nombreuse avec 5 de Caunes de trois mères différentes, et puis, il y a une Guimard aussi, la dernière fille de Paul est maman. Tout ça a des enfants. Tout ça s'est remarié. C'est assez compliqué.
Philippe Chauveau :
Et "tout ça", entre guillemets, s'entend plutôt bien.
Blandine de Caunes :
Très bien, très, très bien. On est très proches les uns des autres. Vraiment, c'est formidable d'avoir une famille comme ça, je dois le dire.
Philippe Chauveau :
Et vous en parlez beaucoup dans l'ouvrage. Vous nous parlez donc de la maladie d'Alzheimer, qui avance inexorablement. Puis, il y a cette année 2016, avec le dernier Noël, avec ces moments que vous passez à Hyères. Et puis, au milieu du livre, il y a une page noire avec simplement quelques mots. Ce 1er avril 2016, c'est la mort de votre fille dans un accident de voiture. On a alors l'impression que c'est un peu la double peine parce qu'il y a la maladie de votre maman, il y a Alzheimer, et puis, ce drame que, bien évidemment, rien ne laissait prévoir. Que ressentez-vous à ce moment-là ? Il y a donc la révolte vis à vis de votre mère, parce que ce n'était pas normal de voir ses enfants partir avant sa propre mère.
Blandine de Caunes :
Mais même avant soi ! Nos enfants, ce sont eux qui doivent nous enterrer un jour. Ce n'est pas nous qui devons les enterrer, l'ordre du monde est totalement bouleversé. Ce n'est pas possible, c'est inimaginable d'enterrer son enfant.
Philippe Chauveau :
Ce qui veut dire aussi qu'à partir de ce moment-là, le livre que vous aviez entrepris d'écrire va complètement changer.
Blandine de Caunes :
Mais bien sûr, parce que je ne peux plus continuer ce livre comme s'il n'y avait pas la disparition de ma fille. Cela change tout pour moi, même dans mes rapports avec maman. Donc, évidemment, le projet devient un livre sur Violette et sur ma mère.
Philippe Chauveau :
Vous nous parlez donc de la maladie qui, petit à petit, progresse. Et vous nous faites partager votre révolte, votre tristesse, parce qu'il y a un moment où vous n'en pouvez plus, ou vous en arrivez même presque à détester votre mère pour ce qu'elle devient.
Blandine de Caunes :
Quand ma fille est morte, ma mère est encore là. Elle ne me reconnaît plus, elle est dans un état terrible et là, je me dis, quand je retourne la voir, que ce n'est pas possible. Elle, elle est toujours vivante et dans quel état, et ma fille de 36 ans est morte, là, c'est révoltant. Et la pauvre chérie, je parle de ma mère, ce n'est pas de sa faute, mais j'ai des moments où je me dis que c’est tellement injuste qu'elle soit là et plus ma fille.
Philippe Chauveau :
Vous écrivez : « J'ai perdu le 1er avril, ma fille unique et le 20 juin, ma mère unique. Maman est un mot qui a disparu de ma vie. Je ne le dirai plus. Je ne l'entendrai plus ». Plus de trois années ont passé. Pourquoi avoir eu envie de parler de ça maintenant ? Alors que le livre sort en ce début d'année 2020, dans quel état d'esprit êtes-vous ? Pourquoi ?
Blandine de Caunes :
Je suis dans l'état d'esprit que j'explique dans le dernier chapitre du livre. Dix-huit mois après le drame de la mort de ma fille, puis celui de la mort de ma mère, j'ai repris goût à la vie, grâce notamment, il faut le dire, de ma petite fille. J'ai une petite fille qui avait 9 ans et demi au moment de la mort de sa mère et qui m'a obligée à tenir parce que je n'allais pas disparaître moi aussi. Elle avait besoin de moi. Elle m'a aidée à rester en vie, on va dire, et on s'est beaucoup aidées mutuellement. Ma mère avait un goût de la vie forcenée. Elle le disait souvent. Et je me suis rendu compte que je reprenais goût, d'abord aux petites choses comme faire un dîner, la beauté de la nature, les livres, et pas seulement les livres qui parlent de deuil. Un moment, je ne lisais plus que ça. Bon, maintenant, je relis tout... Petit à petit, le goût de la vie est revenu. Et même si une partie de moi est morte avec la mort de ma fille, il y a une belle partie qui reste bien vivante. Et voilà. C'est un peu un hymne à la vie, finalement.
Philippe Chauveau :
Voilà un livre absolument magnifique, bouleversant mais lumineux. C'est bien le terme, me semble-t-il, le plus approprié. C'est aussi un livre qui donne envie de redécouvrir toute l'œuvre littéraire de votre mère Benoîte Groult. Blandine De Caunes, merci beaucoup de votre visite. « La mère morte », vous êtes publiée chez Stock.