Fabrice Humbert

Fabrice Humbert

Comment vivre en héros ?

Livre 8'09

Philipe :

Dans ce nouveau titre, Fabrice Humbert, votre septième roman, nous allons faire connaissance avec Tristan. Nous allons le suivre sur plusieurs décénie. On va le découvrir lorsqu'il est encore adoléscent jusqu'à la cinquantaine, avec cette question, le point d'interrogation est important. « Comment vivre en héros ? », c'est finalement la question qui va tarrauder Tristant toute sa vie. Avec un point de départ : il est apprenti boxeur, et un soir dans une rame de métro son entraîneur et ami se fait sauvagement abordé par une bande de loubards, et lui va prendre la poudre d'escampette au lieu d'aider son entraîneur et ami. Et il va, pendant très longtemps, vivre avec cette culpabilité. Qu'avez vous eu envie de nous raconter avec cette question, ce titre qui claque « Comment vivre en Héros ? »

Fabrice :
Tout simplement l'histoire d'un héros, ou de quelqu'un qui aimerait bien vivre en héros alors qu'il n'en n'est pas un. Tristan a été éduqué par son père pour être un héros, il ne fait de la boxe que parce que son père lui a intimé l'ordre de faire de la boxe. Et ensuite lorsque son entraîneur Bouli est attaqué dans le métro, théoriquement il devrait se comporter en héros puisqu'il a été élevé pour ça. Même son nom, Tristan, le nom du chevalier de la table ronde est celui du héros qu'il doit être. Et puis finalement cet échec, cette lâcheté où prudence.

Philippe :
La frontière est souvent mince entre héroisme et lâcheté.

Fabrice :
Exactement. Ca le précipite dans un abîme puisque, dans la mesure où pour son père et donc pour lui puisqu'il a été éduqué ainsi, être un homme c'est être un héros, il perd toute sa substance en n'ayant pas réagit comme il le fallait. Donc pendant dix ans errer en ayant l'impression qu'il est un misérable, qu'il n'est pas à la hauteur, qu'il est lâche...

Philippe :
Et puis il y a aussi une figure paternelle qui est omniprésente et qui est lourde à porter. Son père est un communiste convaincu, qui lui même se targue d'avoir oeuvré dans la résistance pendant la guerre. Et Tristan essaie de se comparer à cette figure du père.

Fabrice :
Oui, tout à fait, la figure du père est écrasante. Et finalement l'admiration qu'il a envers son père, le résistant où pseudo résistant qu'il a été, pose une statue qui est celle de son père et celle du héros en même temps. Tout l'itinéraire de Tristan c'est de défaire la statue de la paternité, la statue du héros.

Philippe :
Vous écrivez : « Il existe une illusion tenace selon laquelle les pères sont des héros d'une force surhumaine, de la taille d'un grand chêne, dont la présence est un gage de protection et de sécurité. Entre les bras de cet homme, il ne peut rien vous arriver et cela durerea pour toujours, depuis l'aube de la vie jusqu'à la fin des temps, car les héros sont immortels. Cataclysmes, agressions, haines, ouragans se brisent contre le buste du père ». C'est ce que l'on ressent quand on est enfant, et c'est parfois ce que l'on a envie que votre propre enfant ressente lorsque l'on en vient soit-même père. C'est ce qui va arriver à Tristan.

Fabrice :

Oui tout à fait, cet espèce de cheminement des déterminismes où Tristan est considéré par beaucoup de gens dans sa ville comme un héros, ce qu'il n'est pas mais ce qu'il est en même temps un peu, en tout cas ce que tout le monde veut croire. Ça fait que le fils de Tristan lui même est obsédé par l'héroisme. En fait la malédiction de cette famille c'est que chacun veut être un héros.

Philippe :

Tristan est un personnage à la dois enthousiasmant, attachant et exaspérant parce qu'on a parfois l'impression qu'il est le spéctateur de sa propre vie, et qu'il ne prend pas toujours sont destin en main. Il va plutôt avoir une vie d'homme réussie, mais on a l'impression qu'il est toujours un peu en retrait, comme s'il était observateur de sa propre vie.

Fabrice :
Oui tout à fait, il est observateur de sa propre vie. C'est un espèce de mélange ou il est capable de se projeter brutalement dans certaines actions dites héroiques, mais qui sont bien plus modestes que certains se le représentent. Et en même temps il est toujours à observer ce personnage qui a fait cela mais qui aurait très bien pu ne pas le faire. De sorte qu'à un moment, trois shémas de vie sont présentés (que je détaille), et lui même est observateur de ces différents possibles.

Philippe :
Ce qui est interessant, et ca c'est une constante dans vos romans, c'est qu'on suit l'histoire de Tristan mais il y a toujours la toile de fond de la société. Dans Eden Utopie on était plutôt dans les années 70. Là ce sont les années 80-90 qui sont la toile de fond de votre roman, la situation en France, l'évolution des cités, l'univers politique. C'est important pour vous que l'univers social soit toujours présent dans vos histoires ?

Fabrice :
Pour Eden Utopie c'était absolument essentiel puisque c'était le fondement même de l'intrigue, c'était la question de l'utopie. Ici c'est plus en toile de fond mais j'ai un interet particulier pour ces années 80-90 qui sont elles mêmes celles de mon développement. Je considère que la société est un terrain d'étude sans fin, absolument extraordinaire, c'est totalement passionant puisque l'humain individiuel s'y mêle à des constantes, à des catégories politiques et sociologiques, et qui elles dépassent le niveau de l'individu. Donc ce croisement entre le destin de l'individu, qui est le fait de la littérature (s'interesser aux individus) et puis de cette espèce de société dans laquelle on est, qui en même temps nous porte mais aussi nous empêche. Je dois dire que c'est une interrogation permanante, qu'elle soit philosophique, littéraire ou historique, c'est absolument sans fin ce rapport entre l'individu et la société dans laquelle nous baignons tous.

Philippe :
Dans le choix de votre écriture, vous avez voulu une histoire très rythmée, même si elle se déroule sur plusieurs décénie. 400 Pages mais ça passe très vite car vous avez réprarti en cinq grandes parties elles-mêmes composées de courts chapitres, il y a un esprit un peu thriller parce qu'on a vraiment envie de savoir ce qu'il va se passer dans le destin de Tristan. À la différence de vos précédents titres, comment avez vous travaillé votre écriture ? Est ce qu'il y a, selon vous, une continuité ? Ou est ce que avec « Comment vivre en héros? » vous changez un peu de style d'écriture ?

Fabrice :
Il y a une particularité, à comment vivre en héros qui est l'ironie, c'est clairement le plus ironique de mes livres, à certains moments même comique. Dans une première version, je chargeais la barque en matière de comique et c'était un comique qui tournait parfois vers l'absurde et le grotesque, des tonalités que j'aime beaucoup. Et j'ai atténué au re-travail. La particularité de « comment vivre en héros ? » c'est cette espece d'allégresse et la distance que je peux avoir avec Tristan, cette légère ironie qui est tout le temps portée sur ses actions, ses problèmes et ses réussites.

Philippe :
Voilà en tout cas une question que vous allez peut être et sans doutes vous poser à la lecture de ce nouveau roman de Fabrice Humbert, une question aussi « comment avoir une âme pure ? » C'est l'interrogation à la fin de ce nouveau titre. Comment vivre en héros? C'est votre actualité Fabrice Humbert, vous êtes publié chez Gallimard. Merci beaucoup.

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  • LIVRE
  • Depuis 2009, avec son livre « L'origine de la violence », Fabrice Humbert fait partie des auteurs qui comptent, de cette nouvelle génération d'écrivains français qui, sans rien sacrifier au travail de l'écriture, s'emparent de sujets d'actualité, observent les évolutions sociales ou rappellent comment la grande histoire vient parfois se télescoper à nos vies quotidiennes.« Eden utopia », « La fortune de Sila », « Avant la chute » sont quelques-uns des succès de librairie de Fabrice Humbert avec à chaque fois, une...Le monde n'existe pas de Fabrice Humbert - Présentation - Suite
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