Si elle est aujourd’hui une experte reconnue dans le monde de la mode et du luxe, Marie-France Pochna a d’abord suivi des études de droit dont elle a gardé le goût de l’enquête. Par les hasards de la vie, elle s’intéresse au début des années 80 à Marcel Boussac, dont la maison de textile fut l’un des fleurons de l’industrie textile avant de connaitre une faillite retentissante.
De cet homme de panache qui aimait autant la culture, les arts décoratifs que le monde des courses et qui mourut ruiné après avoir été...
Christian Dior, un destin de Marie-France Pochna - Présentation - Suite
Philippe ChauveauBonjour Marie-France Pochna.
Marie-France PochnaBonjour.
Philippe ChauveauJ'ai grand plaisir à vous accueillir. On va parler du luxe, on va parler de la haute couture, on va parler de la mode, on va parler de Christian Dior, qui est au cœur de votre actualité avec ce livre que vous publiez aux éditions Flammarion. Christian Dior, un destin. C'est une sorte de, non pas une réédition, puisqu'il y avait déjà eu une biographie de Christian Dior en 1993, mais disons que c'est une une édition enrichie,...
Christian Dior, un destin de Marie-France Pochna - Portrait - Suite
Philippe ChauveauQuelle date ce 12 février 1947. Après avoir lu le livre, on se rend compte qu'il y a eu un avant et un après. Parce que finalement, le 12 février 1947, c'est la naissance du Newlook. C'est peut-être la naissance de Christian Dior, d'ailleurs. Pourquoi cette date est elle importante ?
Marie-France PochnaCette date est importante parce que c'est vraiment une date historique. C'est un fait d'histoire. Ça a véritablement changé la face du monde. Oui, si on peut le dire, ce n'est pas une exagération dans la mesure...
Christian Dior, un destin de Marie-France Pochna - Livre - Suite
Marie-France Pochna
Christian Dior, un destin
Présentation 00'02'27"Si elle est aujourd’hui une experte reconnue dans le monde de la mode et du luxe, Marie-France Pochna a d’abord suivi des études de droit dont elle a gardé le goût de l’enquête. Par les hasards de la vie, elle s’intéresse au début des années 80 à Marcel Boussac, dont la maison de textile fut l’un des fleurons de l’industrie textile avant de connaitre une faillite retentissante.
De cet homme de panache qui aimait autant la culture, les arts décoratifs que le monde des courses et qui mourut ruiné après avoir été l’une des plus grosses fortunes d’Europe, elle tira une biographie publiée chez Robert Laffont. « Bonjour M. Boussac » fut un vrai succès de librairie. Suivent alors des ouvrages sur Gianni Agnelli, le charismatique patron de Fiat, sur l’entrepreneur Paul Ricard qui oeuvra dans le domaine artistique avec sa fondation ou encore sur la créatrice Nina Ricci, grand nom de la mode. Au fil des années, Marie-France Pochna partage sa passion et ses connaissances des métiers du luxe et de la haute couture en donnant des cours pour une célèbre école de management ou en participant à des conférences.
S’il est bien un créateur de mode pour lequel Marie-France Pochna garde une réelle affection, c’est bien Christian Dior. Après une première biographie publiée en 1993, elle revient en librairie avec une nouvelle version enrichie, augmentée qui raconte le couturier de A à Z.
Né dans un milieu bourgeois aisé, soumis à une misère noire après la crise de 1929, le jeune Christian Dior se construit seul tout en sachant s’entourer de personnalités artistiques qui deviendront essentielles. Après la guerre, en 1947, son talent explose avec son style unique, le New Look, qui le propulse sur la scène internationale.
Une carrière courte, menée tambour battant, jusqu’à sa mort en 1952 mais un nom qui aujourd’hui encore fait rayonner l’élégance à la française dans le monde entier.
Avec érudition, s’appuyant sur des archives privées et des rencontres inédites, Marie-France Pochna nous offre la biographie de référence du grand couturier. Par une écriture fluide et agréable, elle raconte le créateur et l’homme privé, celui qui révolutionna la mode et la haute couture.
« Marie France Pochna, un destin » de Marie-France Pochna est publié chez Flammarion.
Marie-France Pochna
Christian Dior, un destin
Portrait 00'05'52"Philippe Chauveau
Bonjour Marie-France Pochna.
Marie-France Pochna
Bonjour.
Philippe Chauveau
J'ai grand plaisir à vous accueillir. On va parler du luxe, on va parler de la haute couture, on va parler de la mode, on va parler de Christian Dior, qui est au cœur de votre actualité avec ce livre que vous publiez aux éditions Flammarion. Christian Dior, un destin. C'est une sorte de, non pas une réédition, puisqu'il y avait déjà eu une biographie de Christian Dior en 1993, mais disons que c'est une une édition enrichie, complétée, sur laquelle nous allons revenir dans un instant. Aujourd'hui, lorsque l'on parle de vous, Marie-France Pochna, on vous présente comme une référente du monde du luxe, de la haute couture. Vous allez nous expliquer pourquoi, mais j'ai envie de dire quel roman que votre vie, parce qu'il y a eu pas mal de voyages à l'étranger pour accompagner notamment votre famille. Il y a eu du droit, des études de droit. Et puis, un jour, l'envie de vous intéresser aux grandes entreprises, notamment à Boussac, qui fut votre premier livre. Si vous deviez définir votre parcours, que diriez vous ?
Marie-France Pochna
Le hasard. Comme Christian Dior. En tête de ses mémoires, il dit qu'en fait dans sa vie rien n'était prévu et que c'était dû au hasard. Il ajoute aussi, ce qui n'est pas du tout mon cas, qu'il a toujours été féru d'astrologie et qu'il a toujours confié sa bonne étoile à des cartomanciennes. Dans sa première expérience, c'était quand il était tout petit, très jeune, en 1912, donc, ça ce n'est absolument pas mon cas. Je n'ai jamais utilisé l'astrologie, mais c'est vrai que les voyages étaient une chose passionnante. Vers la fin de mes études, je me suis lancée à parcourir le monde à la suite de mon mari qui faisait des affaires à droite et à gauche. Et c'est vrai qu'à un moment donné, la France m'a manqué et que je suis tombé à ce moment là sur le sujet de Marcel Boussac qui m'a intéressée parce que comme j'avais fait des études d'avocat, je me suis dit que c'était peut être dans mon domaine de pouvoir écrire sur Marcel Boussac, étant donné qu'il a représenté, et peut être même encore jusqu'à ce jour, la plus grosse faillite intervenue en France.
Philippe Chauveau
Même si le nom reste associé à ce que la France fait de mieux dans le domaine de tout ce qui est beau, du luxe et du raffinement.
Marie-France Pochna
Ce qui surnage, c'est les bons souvenirs.
Philippe Chauveau
Donc, vous travaillez sur Marcel Boussac et vous publiez un premier livre en 1980. Et puis, très vite, vous allez enchaîner avec d'autres sujets, que ce soit Agnelli, que ce soit Nina Ricci, que ce soit Paul Ricard. Vous vous intéressez à ces grands noms qui sont surtout de grands destins.
Marie-France Pochna
C'est de grands destins. Et puis, ils ont comme caractéristique d'avoir créé des affaires, des affaires qui perdurent et qui ont à leur tête des entrepreneurs qui n'étaient pas pour moi simplement des entrepreneurs qui ont fait des affaires, mais des entrepreneurs qui avaient tous un sens créatif et une grande intuition. Et aussi, dans le cas de Christian Dior, comme on pourrait le dire aussi de Bernard Arnault, une intelligence des affaires qui est vraiment fulgurante.
Philippe Chauveau
Vous vous intéressez donc à ces destins qui représentent des réussites économiques, financières, appelons ça comme l'on veut, mais surtout aussi des gens qui savent toucher le beau, qui savent s'intéresser à ce qui embellit la vie.
Marie-France Pochna
C'est tout à fait ça, des entreprises, qui consistent à, au fond, exploiter, labourer, rester dans le terrain de ce qui est notre culture à nous. Christian Dior a voulu faire de Dior, si vous voulez, une marque qui plonge ses racines dans notre culture et qui continue de célébrer, de manifester et de développer tout ce que l'étranger nous envie et qui est précisément notre art de vivre.
Philippe Chauveau
Vous qui connaissez bien ce monde du luxe et de la haute couture, qui l'avez vu évoluer. Que représente-t-il aujourd'hui ? Comment le voyez-vous avec votre œil de connaisseur ? Et puis, de façon plus intime, que représente la mode aujourd'hui ?
Marie-France Pochna
La mode, c'est quelque chose qui change puisque c'est, comme le disait Saint Laurent : "notre rôle à nous, en tant que couturier, c'est faire désirer aux gens, faire désirer à nos clientes ce dont elles ne rêvent même pas pouvoir porter". Donc aujourd'hui, on est dans une phase qui est un tout petit peu touchée par tous les mouvements, par l'internationalisation, par tous les mouvements identitaires qui viennent transformer nos réflexions qu'on a à propos de notre société. Je trouve par exemple, sur le plan personnel, que la rue qui était un enchantement quand on était à Paris dans les années 80-90 et encore il n'y a pas si longtemps, est maintenant un tout petit peu moins significatif, si vous voulez de cette beauté, de cette joie, de cette variété, de ce côté un peu dansant qu'avait la rue autrefois. Les hommes sont beaux, les hommes arrivent à être élégants, les femmes un tout petit peu moins que les hommes aujourd'hui. Mais ça, c'est un avis très personnel et je pense que plein de gens ne partagent pas.
Philippe Chauveau
Mais vous le dites avec une sorte de désappointement ou au contraire en disant que c'est une évolution ?
Marie-France Pochna
Non, c'est une évolution, la mode change, c'est tout. Les gens ont d'autres attentes.
Philippe Chauveau
Faut-il faire une distinction entre ce qu'est la mode et ce qu'est la haute couture ?
Marie-France Pochna
Oui, on peut faire une distinction, bien sûr, mais je pense qu'elles se nourrissent l'une et l'autre parce que la mode, c'est une inspiration. Et la haute couture c'est l'atelier, si je peux dire, de recherche et d'exécution. De ce côté totalement exceptionnel, on peut se le permettre puisque là, il s'agit plus d'une question de coût. Il s'agit d'une question d'arriver à quelque chose d'absolu.
Philippe Chauveau
En tout cas, s'il est un nom qui reste bien associé à la mode et à la haute couture et qui représente bien la France, c'est Christian Dior. Votre actualité, Marie-France Pochna chez Flammarion, "Christian Dior, un destin".
Marie-France Pochna
Christian Dior, un destin
Livre 00'06'54"Philippe Chauveau
Quelle date ce 12 février 1947. Après avoir lu le livre, on se rend compte qu'il y a eu un avant et un après. Parce que finalement, le 12 février 1947, c'est la naissance du Newlook. C'est peut-être la naissance de Christian Dior, d'ailleurs. Pourquoi cette date est elle importante ?
Marie-France Pochna
Cette date est importante parce que c'est vraiment une date historique. C'est un fait d'histoire. Ça a véritablement changé la face du monde. Oui, si on peut le dire, ce n'est pas une exagération dans la mesure où, en 45 minutes et avec 75 mannequins, le monde d'avant a disparu et le monde nouveau est apparu. Ce monde là, c'est Christian Dior, Christian Dior inconnu, inconnu parce que c'était la première fois qu'il défilait. Il faisait partie du monde de la couture. Il avait travaillé chez Lucien Lelong et il s'était fait remarquer. Mais il était connu d'un tout petit cercle très fermé. Et tandis que la nouvelle du 12 février 1947 a eu un retentissement considérable et Christian Dior en fait, est probablement l'homme dont la célébrité, c'est un phénomène unique, à mon avis, ne se soit pas très bien... Oui, bien entendu, quand on a créé le mur du son, quand on est monté à l'Annapurna, on est devenu connu dans le monde entier. C'est un peu le même genre de choses. Christian Dior est aussi un escaladeur extraordinaire.
Philippe Chauveau
Il monte au sommet de la haute couture
Marie-France Pochna
Au sommet de la haute couture, en l'espace de très peu de temps et auquel il a dû faire face dès le lendemain avec la création d'une maison qui est devenue la maison la plus importante de la couture française et qui est devenue un vecteur de développement économique. Parce qu'on était sorti de la guerre mais on n'était pas encore vraiment dans la reconstruction.
Philippe Chauveau
Excusez-moi de vous interrompre. Si je vous entends. Christian Dior nous fait sortir de la guerre, il fait oublier les restrictions, les noirceurs de la guerre. Il invente un monde nouveau ?
Marie-France Pochna
Tout à fait. En tout cas, le public y a adhéré tout de suite.
Philippe Chauveau
Si vous deviez donner une définition du new look, c'est quoi le new look ?
Marie-France Pochna
Le new look, c'est de ressusciter si vous voulez, une image enfouie dans l'inconscient de chacun dans le monde entier. C'est que la France est quand même un pays qui est particulièrement connu pour créer du beau et du raffinement, de la civilisation, de la culture, de mélanger art, culture et je dirais peut être amour aussi, les trois choses me semblent aller d'une certaine manière ensemble, et je peux citer, si vous voulez, Françoise Giroud, qui disait que Christian Dior est le fils de 500 ans de culture souriante. C'est joli comme formule.
Philippe Chauveau
Christian Dior, c'est le sujet de votre actualité, alors il y avait déjà eu une précédente biographie que vous aviez écrite en 1993. Mais c'est une version corrigée, enrichie, augmentée, que vous nous proposez cette fois-ci. Plus de 500 pages. J'ai envie de dire que c'est la référence pour tous ceux qui s'intéressent à Christian Dior. Et par rapport à la date que nous avons citée tout à l'heure, le 12 février 1947, dans votre livre, vous racontez Christian Dior, le couturier, l'homme, le businessman aussi. Et puis vous nous racontez l'autre Christian Dior. La facette peut être plus fragile, plus sombre. Cet homme qui a dû se battre puisqu'avec sa famille, il a connu la misère de l'entre deux guerres. Qui était-il au-delà de l'homme de la couture ?
Marie-France Pochna
C'est justement ça, le livre en vérité, je trouvais qu'il fallait lui rendre sa place dans la mesure où aujourd'hui, la marque est très puissante et qu'au fond, l'homme est un tout petit peu méconnu. La grande chose qu'il avait dans sa vie, c'est une bonne éducation et aussi beaucoup d'amis qui l'ont évidemment soutenu.
Philippe Chauveau
Il y a dans ce livre, et c'est ce qui fait le charme aussi de votre écriture, c'est que vous racontez Christian Dior. Vous parlez de la mode, mais vous nous retracez aussi une époque, une époque révolue. On retrace toute cette période de 1920 jusqu'à 1947. Comment avez-vous travaillé ces recherches ? Il y a eu beaucoup de rencontres, beaucoup d'échanges, beaucoup d'interviews, des archives aussi que vous avez consultées ?
Marie-France Pochna
Des archives, et j'avais donné mes propres archives à la maison Christian Dior quand j'avais terminé le livre, je ne pensais vraiment pas y revenir.
Philippe Chauveau
La première édition donc.
Marie-France Pochna
Et j'ai pu trouver un appui, véritablement, par ce qu'on appelle le service du patrimoine chez Dior qui, depuis, avait véritablement fait une énorme recherche, collecté beaucoup de documents, retrouvé des meubles, retrouvé des photos, retrouvé des personnages. J'ai trouvé aussi, moi-même, j'ai pu collaborer et apporter à la maison Dior des recherches que j'avais faites et que dans certains cas, comme des lettres qui avaient disparu et qui sont réapparues, elles ont pu acheter et qui font maintenant partie du patrimoine. En vérité, il y a une véritable, je dirais science historique de Christian Dior qui existe aujourd'hui.
Philippe Chauveau
Dans votre ouvrage, vous parlez de l'homme public, vous parlez de l'homme privé. Vous parlez du couturier, du créateur. Vous parlez du business man. L'éditeur a choisi de mettre sur la couverture, ce bandeau avec cette jolie photo, Christian Dior a un air assez mutin. Qui était-il réellement ? Est-ce qu'il était un peu tyrannique comme on pu l'être Karl Lagerfeld ou Coco Chanel ? Ou à l'inverse était il très bonhomme ?
Marie-France Pochna
L'inverse, l'inverse, l'inverse. Dans sa jeunesse, avant que son père ne fasse faillite, il avait eu ce qu'on appelle pendant la période des années folles justement, il avait vécu avec une bande d'amis dont les deux inspirateurs, les deux maîtres à penser étaient Jean Cocteau, Max Jacob, Picasso aussi, enfin, toute une bande d'amis avec lesquels ils faisaient la fête. Ils faisaient la fête tous les soirs.
Philippe Chauveau
Et il a gardé cet esprit là ?
Marie-France Pochna
Complètement, Christian Dior était un grand plaisantin. Il ne peut pas finir une phrase sans faire une plaisanterie. Un peu pince sans rire aussi, aimant bien taquiner les gens, aimant bien les surprendre, il est un mélange Christian Dior, parce qu'il était à la fois soi disant timide. Il n'était pas timide. Il était très observateur et il avait aussi beaucoup de discernement, un esprit très fin. Il était très intuitif, très imaginatif. Et donc, on peut dire aussi que son côté timide qu'on a évoqué, c'était qu'il était peut être plus observateur et plus être plus contemplatif et avec beaucoup de discernement, plus que les autres.
Philippe Chauveau
Vous avez mis en exergue de votre livre cette phrase de Christian Dior "J'ai considéré l'exercice de mon métier comme une sorte de lutte contre tout ce que notre temps peut avoir de médiocre et de démoralisant." Est-ce qu'il nous manque un Christian Dior aujourd'hui ?
Marie-France Pochna
Vous avez la réponse. Votre question était une réponse.
Philippe Chauveau
Votre actualité, Marie-France Pochna, Christian Dior, un destin. Vous êtes publiée aux éditions Flammarion. Merci beaucoup.
Marie-France Pochna
Merci.