Un premier roman est toujours l’occasion de faire connaissance avec un nouvel auteur, avec son écriture, avec son univers. C’est surtout l’occasion de comprendre pourquoi et comment l’écriture arrive dans une existence.
Concernant Philippe B. Grimbert, c’est la médecine qui occupe son temps professionnel. Professeur en milieu hospitalier, il est spécialisé en transplantation rénale. On est alors bien loin de la littérature. Et pourtant…
Vivant depuis l’enfance au milieu des livres, au point d’en faire un rejet par...
Panne de secteur de Philippe B. Grimbert - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :
Bonjour Philippe B. Grimbert. Je prononce le B. forcément, puisqu'il apparaît sur la couverture de votre premier roman mais aussi parce qu'il y a, dans le milieu littéraire français, un homonyme célèbre aussi. C'est donc votre premier livre. Mais avant de parler de votre entrée en littérature avec « Panne de secteur », faisons un peu plus connaissance. Aujourd'hui, vous êtes professeur en médecine. Mais les livres, m'avez-vous laissé entendre, ont toujours fait partie de votre décor familial....
Panne de secteur de Philippe B. Grimbert - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :
Quelle drôle d'histoire, Philippe B. Grimbert ! J'ai déjà eu un coup de cœur pour la couverture. Je trouve que la création graphique au Dilettante a fait un très joli travail avec ce jeu de l'oie qui nous explique que rien ne va être simple dans la vie de ces trois personnages que vous nous présentez. Il y a un couple, c'est un couple d'aujourd'hui. Ils s'appellent Paul et Sylvie. Ils vivent à Paris. Et puis, il la petite Bérénice qui va venir couronner cet amour, s’il s’agit bien d’amour dans ce...
Panne de secteur de Philippe B. Grimbert - Livre - Suite
Philippe B. Grimbert
Panne de secteur
Présentation 00'02'23"Un premier roman est toujours l’occasion de faire connaissance avec un nouvel auteur, avec son écriture, avec son univers. C’est surtout l’occasion de comprendre pourquoi et comment l’écriture arrive dans une existence.
Concernant Philippe B. Grimbert, c’est la médecine qui occupe son temps professionnel. Professeur en milieu hospitalier, il est spécialisé en transplantation rénale. On est alors bien loin de la littérature. Et pourtant…
Vivant depuis l’enfance au milieu des livres, au point d’en faire un rejet par rébellion adolescente, Philippe B. Grimbert retrouvera le plaisir de la lecture à l’âge adulte, devenant même un lecteur forcené et éclectique, marqué par la figure tutélaire des plus grands, Marcel Proust en tête.
Et voilà qu’un jour, sans qu’il puisse réellement expliquer pourquoi, l’envie d’écrire s’impose à lui. Voilà donc ce premier roman « Panne de secteur ».
Un couple d’aujourd’hui, Paul et Sylvie, socialement positionnés dans ce qu’on appelle la classe moyenne. Ils habitent à Paris, mais pas forcément dans les quartiers les plus recherchés. Et quand nait Bérénice, ils vont vouloir le meilleur pour elle. Paul surtout, son père, qui en dépit des évidences, va tenter de faire vivre à sa propre fille ses rêves inabouties. Les meilleures écoles, les meilleures amies, toujours plus pour sortir de ce quotidien dans lequel Paul ne se plait pas. Mais peut-on imposer à son enfant ses propres frustrations. Partant de là, Philippe B. Grimbert nous entraine dans une aventure folle où, prêt à tout, Paul va commettre la petite faute qui va tout compromettre pour l’avenir de sa fille. Le livre est très drôle, plein d’humour, dans le style et dans les thème abordés. Mais attention, ici l’humour est grinçant et l’auteur a gentiment sorti les griffes. Chacun en prend pour son grade. Tous les travers de notre société consumériste, envieuse, tapageuse et égocentrée sont ici décortiquée. Rire de peur d’avoir à en pleurer peut-être car, finalement, Paul, est un homme pathétique qui court sans cesse vers ce qu’il pense être une forme de bonheur, au risque de voir tout s’écrouler sous ses pieds. Et Paul nous ressemble sans doute un peu.
Voilà le premier roman de Philippe B. Grimbert, « Panne de secteur » est publié au Dilettante.
Philippe B. Grimbert
Panne de secteur
Portrait 00'05'27"Philippe Chauveau :
Bonjour Philippe B. Grimbert. Je prononce le B. forcément, puisqu'il apparaît sur la couverture de votre premier roman mais aussi parce qu'il y a, dans le milieu littéraire français, un homonyme célèbre aussi. C'est donc votre premier livre. Mais avant de parler de votre entrée en littérature avec « Panne de secteur », faisons un peu plus connaissance. Aujourd'hui, vous êtes professeur en médecine. Mais les livres, m'avez-vous laissé entendre, ont toujours fait partie de votre décor familial. Expliquez-nous ?
Philippe B. Grimbert :
Oui, absolument. J'ai été élevé dans une famille où les livres avaient une place centrale et, en particulier, un père qui était un lecteur permanent et insomniaque. Je pense qu'il passait ses nuits à lire et quand il ne travaillait pas, j'ai l'impression de l'avoir toujours vu lisant et me pourchassant avec ses passages de livres, avec ces extraits. Alors, évidemment, comme toutes les relations parents-enfants, il m'a fallu un peu de temps pour réapprendre à approcher cet objet comme ça, sans craindre les livres. Ils étaient tellement investis, tellement sacralisé que pour moi, ce n'était pas un objet évident. Et puis, c'était intégré dans une relation conflictuelle avec mon père. Donc, évidemment, prendre mes distances avec lui, c'était aussi prendre mes distances avec la littérature. Il m'a fallu du temps pour y revenir de manière un peu plus singulière. Et puis réemprunter comme ça, ces passages que je n'avais pas toujours fidèlement suivis dans l'enfance. Evidemment, ça a été pour moi une chose très importante dans la seconde partie de ma vie.
Philippe Chauveau :
Finalement, comment s'est faite cette nouvelle rencontre avec le livre, avec la littérature ? Puisqu'il y a eu, on l'a compris, ce désamour. Vous vous réappropriez le livre en avançant dans votre vie personnelle. Pourquoi ? Comment ? Une rencontre ou des rencontres ?
Philippe B. Grimbert :
Des livres, j'en avais tout le temps sous la main. Et puis, c'est vrai qu'il y a eu des rencontres à la fin de l'adolescence avec les grands novellistes allemands, en particulier de la fin du XIXème ou du début du XXe siècle. La littérature allemande était très importante dans la famille. Mon père lisait en allemand et vraiment, il avait une vénération pour les grands auteurs allemands. Donc, évidemment, Goethe, Hofmannsthal, etc… Moi, j'y suis entré plus sobrement avec Szweig et Schnitzler. Cette grande littérature de l'introspection du début du siècle m'a tout de suite beaucoup touché. Puis ensuite, on procède par élargissement progressif. Je me suis mis à lire tardivement les classiques, bien après l'adolescence, à partir de 20 ans. Il y a aussi, comme sûrement beaucoup de gens de ma génération, des rencontres qui sont extrêmement importantes. « La recherche du temps perdu », c'est la grande rencontre avec l'écriture, de ce que peut être l'écriture, de ce qu'elle peut provoquer, de ce qu'elle peut bouleverser. J'ai le souvenir de ces premières nuits d'insomnie durant lesquelles je ne pouvais pas quitter un volume de « La recherche ». Ça, c'est quelque chose qui est apparu, mais finalement, beaucoup plus tard après vingt ans.
Philippe Chauveau :
Faisons juste une petite une petite parenthèse. On l'aura compris, le livre fait maintenant partie de votre vie, ais il y a la médecine aussi. Je l'ai dit en préambule, vous êtes professeur en médecine. Expliquez-nous, en quelques mots, quelle est votre travail, votre rôle ?
Philippe B. Grimbert :
Effectivement, je suis médecin et universitaire, fonctions que l’exerce dans les centres hospitaliers universitaires où l’on fait à la fois de soin, de l’enseignement et de la recherche. Pour ma part, j’ai la chance de diriger un service qui fait de la transplantation rénale. On est assez loin de la littérature ! C’est un service consacré à la greffe de rein, ce qui consiste à proposer des traitements à des patients insuffisants rénaux. A côté de cela, il y a donc une partie d’enseignement de ma spécialité puis de la recherche dans les domaines de l’immunologie de la greffe. Rendre les corps tolérants à des greffes, voilà le sujet qui me préoccupe !
Philippe Chauveau :
Alors, l'écriture dans tout cela, pourquoi ? On l'a compris, vous avez une profession qui vous plaît, qui vous prend beaucoup de temps. Il y a cette émission à la radio. Vous êtes aussi un gros lecteur. Et puis, l'envie de l'écriture, pourquoi ?
Philippe B. Grimbert :
L'envie de l'écriture est beaucoup plus récente. L'envie de l'écriture, c'est, je crois, ce qui traverse tout lecteur. C'est à dire que la prégnance des mots, des phrases dans ce qu'on lit donne l'envie, je crois, à un moment donné, du passage à l'acte. L'idée de s'essayer à cela, à une narration, à une introspection, à un récit. Quant à savoir pourquoi les choses arrivent… Alors là, je ne sais pas. Cela reste une partie des mystères, heureusement. La manière dont surgissent les mots ou dont se lèvent des barricades, je ne sais pas comment ni pourquoi, c'est compliqué. Il faudrait peut-être du temps pour décortiquer ces choses-là, mais je crois que tout le monde est confronté à ce fait, qu'à un moment donné, quelque chose qui n'est pas possible le devient.
Philippe Chauveau :
C'est donc votre premier roman Philippe B. Grimbert, « Panne de secteur », et le livre est publié aux éditions Le Dilettante.
Philippe B. Grimbert
Panne de secteur
Livre 00'06'32"Philippe Chauveau :
Quelle drôle d'histoire, Philippe B. Grimbert ! J'ai déjà eu un coup de cœur pour la couverture. Je trouve que la création graphique au Dilettante a fait un très joli travail avec ce jeu de l'oie qui nous explique que rien ne va être simple dans la vie de ces trois personnages que vous nous présentez. Il y a un couple, c'est un couple d'aujourd'hui. Ils s'appellent Paul et Sylvie. Ils vivent à Paris. Et puis, il la petite Bérénice qui va venir couronner cet amour, s’il s’agit bien d’amour dans ce couple. Allez savoir... Qui sont-ils Paul et Sylvie ?
Philippe B. Grimbert :
C'est difficile de les enfermer dans une catégorie, mais disons qu'ils appartiennent à la classe moyenne un peu déclassée. Paul est chercheur, Sylvie travaille dans une institution régionale du service public. Ils habitent l'est de la région parisienne. Ils représentent évidemment quelque chose malgré eux. Ils ont un enfant et sont très investis dans son éducation comme si, finalement, c'était la dernière grande valeur ou en tout cas le dernier capital de ces classes moyennes.
Philippe Chauveau :
Ils l'appellent Bérénice, quelle idée ? C'est joli comme prénom mais ce n'est pas facile de porter !
Philippe B. Grimbert :
J'ai toujours trouvé très amusant les prénoms qui sont parfois totalement dégagés de toute forme de signification intime et qui obéissent à des règles ou des emprunts. Ils ont donné un prénom que le père de Bérénice qualifie lui-même d'un peu boursouflé, d'un peu prétentieux. C'est un prénom bien joli mais pas forcément facile. Donc, Au-delà du prénom, il imagine pour leur fille un destin valorisant à ses yeux, pour lui comme pour elle. Il y a, sur la première page, cette phrase, tirée du « Bérénice » de Racine qui dit : "mon amour m'emportait, je venais peut-être me chercher moi-même et me reconnaître." Donc voilà, c'est au cœur de cette problématique de la relation entre parents et enfants. Que fait-on pour soi-même ? Que fait-on pour les autres ? Et ce prénom, pour qui a-t-il été choisi ? On ne sait pas très bien, mais Paul donne des indications qui ne sont pas très glorieuses.
Philippe Chauveau :
C’est donc un roman sur la famille, sur la relation parents-enfants. Je le disais, il y a Paul et Sylvie et la petite Bérénice que l'on va voir grandir. C'est le personnage de Paul qui va être au cœur même du roman. Ce personnage est chercheur mais il se cherche aussi beaucoup lui-même. Il a beaucoup de comptes à régler, peut-être avec son passé, avec là d'où il vient. En tout cas, il veut le meilleur pour sa fille. Mais il en veut peut-être un peu trop ?
Philippe B. Grimbert :
Il veut le meilleur pour sa fille. Et puis surtout, elle est là sans doute aussi pour réaliser, comme beaucoup de parents d’ailleurs, une partie de ce que lui n'a pas fait. Sa fille se trouve donc être une projection de toutes ces petites frustrations.
Philippe Chauveau :
Je ne vais pas rentrer dans les détails. Je ne vais rien trahir l'intrigue. Mais forcément, à force de vouloir le meilleur pour sa fille, tout va partir en vrille et de façon assez grandiose. C'est donc une histoire sur les relations parents-enfants mais c'est surtout une histoire très drôle que vous avez voulu nous raconter. Il y a beaucoup d'humour mais un humour parfois un peu grinçant, un peu sarcastique. Il y a pas mal de petits coups de griffes sur notre monde contemporain, sur notre vie, sur notre société. Tout le monde en prend pour son grade.
Philippe B. Grimbert :
Oui, parce qu'évidemment, quand on se regarde et quand on regarde un peu les gens qui nous entourent, il y a quelque chose d'absolument ridicule dans nombre de nos comportements mais je trouve que ce côté un peu grotesque est souvent le plus représenté. Moi, j'ai toujours trouvé que c'était très juste. C'est évidemment la force de l'humour et de la dérision sous toutes ses formes. Là, évidemment, la dérision est assez grinçante. Elle montre ce qu'il y a de ridicule ou de tragi comique dans certains de nos comportements et de nos travers, a fortiori dans les excès d'investissements qui peuvent être le cas de ces parents.
Philippe Chauveau :
L'humour passe par l'intrigue, par les situations rocambolesques dans lesquelles vous entraînez vos personnages. L'humour passe aussi par votre écriture, une écriture qui est dense, foisonnante, où il y a toujours des petit brins d'humour qui viennent s'intercaler dans des phrases qui, au demeurant, se veulent très littéraires. Comment avez-vous travaillé votre écriture, pour ce qui est, je le rappelle, votre premier roman ?
Philippe B. Grimbert :
Il est difficile pour moi de parler de ce travail parce que j'ai l'impression que les choses se sont écrites comme ça. Ce n'était pas vraiment mon intention de donner cette dimension là à ce livre au moment même où je l'ai envisagé. Elle s'est imposée d'elle-même, peut-être parce que les personnages se sont caricaturés d'eux-mêmes, au fur et à mesure qu'ils apparaissaient et qu'ils naissaient. Et finalement, c'est comme ça que les choses se sont faites.
Philippe Chauveau :
Dans l'histoire de cette famille, Paul, Sylvie et leur fille Bérénice que l'on va voir grandir au fil des pages, il y a donc beaucoup d'humour, un humour grinçant, mais aussi une certaine mélancolie. Paul court toujours après son bonheur et ses rêves. Et il y a aussi une sorte de rendez-vous manqué avec sa fille.
Philippe B. Grimbert :
Evidemment, c’est un rendez-vous manqué. Mais, sans dévoiler l'intrigue, ce malheureux Paul vit un certain nombre d'événements qui sont assez douloureux et j'ai eu envie, à un moment donné, de le sauver. C'était une façon de lui permettre, justement, d'être capable de renouer le fil non seulement avec lui-même mais également avec son enfant. C’était aussi pour moi une manière de ne pas abandonner ce personnage, qui nous est à la fois étranger, mais aussi assez familier.
Philippe Chauveau :
Ces trois personnages sont énervants et exaspérants par leurs choix de vie. Mais c'est aussi pour ça qu'on les trouve très attachants lorsqu'on est lecteur. Voilà un livre que nous allons dédier à tous les Paul que l'on peut croiser au cours de sa vie. C'est votre premier roman Philippe B. Grimbert, « Panne de secteur » et vous êtes publié aux éditions Le Dilettante. Merci beaucoup.