Adrien Borne

Adrien Borne

La vie qui commence

Portrait 00'06'50"

Philippe Chauveau

Bonjour Adrien Borne.

Adrien Borne

Bonjour.

Philippe Chauveau

Votre actualité chez Jean-Claude Lattès, La vie qui commence, c'est votre nouveau titre, votre deuxième roman, puisqu'il y avait eu Mémoire de soie précédemment. Et on vous connaît aussi en tant que journaliste, vous avez sévi pendant plusieurs années sur des chaînes d'info notamment, notamment LCi. Aujourd'hui, d'ailleurs, vous vous définissez comme un journaliste ou comme un romancier ?

Adrien Borne

Les deux, mon capitaine. J'aime bien d'abord ne pas être résumé à quelques mots. Donc déjà, ça m'arrange qu'il y en ait deux, parce que ça ouvre d'autres horizons et différents horizons. Et en l'espèce, le journalisme et l'écriture m'offrent des champs respectifs de recherches qui sont très complémentaires au fond.

Philippe Chauveau

Pourquoi le journalisme dans votre carrière ?

Adrien Borne

Un peu par hasard. Et puis parce que je suis tombé amoureux de la radio, vraiment complètement amoureux de la radio à l'école de journalisme de Lille où j'ai appris ce métier, et où j'ai appris la radio et je me suis rendu compte, c'était déjà une intuition en tant qu'auditeur, je me suis rendu compte déjà, et c'est pour ça vous voyez qu'il y a un lien entre le journalisme et l'écriture, du pouvoir et de la puissance des mots et du plaisir qu'on pouvait avoir à raconter des histoires, certes vraies, derrière un micro, bien à l'abri derrière son micro et avec le soin accordé aux mots, parce qu'il y a un enjeu de temps, un enjeu de rythme. Il faut tenir compte de ces paramètres-là. Je me mettais dans la peau en tant que journaliste de celui qui rapporte, de celui qui transmet, de celui qui raconte.

Philippe Chauveau

C'est être au coeur de l'actualité ?

Adrien Borne

Oui, absolument, c'est être au cœur. Et puis vous maniez l'humain sous toutes ses formes, les formes les plus belles, les plus excitantes. Ses parts beaucoup plus sombres également. Et puis vous ajoutez à cela et ça, c'est quelque chose que j'aime beaucoup, c'est l'enjeu du direct, évidemment. Ce fil sur lequel vous marchez avec l'exigence de ne pas pouvoir vous tromper, vous n'avez pas le droit de vous tromper. Alors si vous le faites, vous vous excusez si vous avez le temps. C'est ce petit pincement, l'adrénaline, peut-être cette part d'acteur, diront certains , peut-être que c'est comme quand on se présente et qu'on est quelques instants avant de rentrer sur scène. Mais il y a un peu de ça quand même, j'en suis parfaitement conscient. C'est pour ça d'ailleurs que je n'ai jamais fait de presse écrite. Peut-être que je n'aurais pas trouvé cette adrénaline-là.

Philippe Chauveau

Alors vous commencez par la radio, RTL notamment, après il y a la télévision, on l'a dit avec iTélé ou LCI. Vous parlez de l'urgence, de l'actualité, du fait d'être en adéquation avec ce qui se passe dans le monde. Et puis après, il y a l'écriture et notamment en mémoire de soie, qui est votre premier titre ? Ça a été une sorte de refuge parce que là, vous étiez tout seul avec vous-même. Vous aviez le temps de l'écriture. Ça a été une sorte de soupape par rapport à la frénésie du métier de journaliste en télévision et en radio ?

Adrien Borne

Oui, je pense que c'est le mot, même si j'ai mis du temps à le réaliser. Véronique Cardi, qui est à la tête de Lattès, m'a contacté. Notre première rencontre remonte à plus de douze ans et déjà elle m'avait dit « Tu devrais écrire et tu vas y arriver ». J'ai mis dix ans pour parvenir à Mémoires de soie et par réaliser vraiment qu'il fallait que je trouve un autre point d'appui, le calme, le choix de la temporalité. Parce que le journalisme, surtout dans des chaînes d'info, est une exigence extrême en termes de rythme, de séquençage, de moments de vitalité et à travers l'écriture, j'ai trouvé soudainement l'espace, soudainement d'ouverture. Effectivement, et c'est ce qui était très important pour moi, c'était de choisir, choisir ma temporalité, soudainement, mes personnages, mon époque également et d'une certaine manière, c'était reposant que d'écrire.

Philippe Chauveau

Vous faites le choix, dans votre premier roman, de puiser dans vos racines familiales avec Mémoires de soie. Ça a été une évidence que votre premier roman serait une sorte d'hommage à votre famille ? Pourquoi ce choix ?

Adrien Borne

Ça n'a pas du tout été évident. Si j'ai mis si longtemps à écrire, c'est que j'ai réalisé très tardivement que je ne devais pas partir d'un personnage ou d'une époque, mais d'un lieu. Et j'ai réalisé que j'étais un déraciné, comme tout bon Parisien bien souvent, que je n'étais que du pollen finalement, et qu'il était temps que je me rappelle d’où je venais. Et la Drôme, effectivement, ce lien-là, ces racines-là. Et quand je me suis plongé et planté dans cette terre, au moment d'écrire ,cette Drôme que je connais si bien et où toute ma famille a vécu et une partie d'entre elle vit encore, là soudainement, j'ai été un peu plus alimenté et ça a pu me servir de support.

Philippe Chauveau

Comme vous le dites, vous n'avez commis que 2 livres, mais bien sûr, il y en aura d'autres. Néanmoins, on décèle très vite chez vous l'importance de la langue, le travail sur la syntaxe, la musicalité de votre écriture. Ça, c'est quelque chose... C'est un peu votre marque de fabrique, c'est que vous aimez les mots ?

Adrien Borne

J'adore les mots. Je trouve que la langue française, qui est la seule que je maîtrise un peu parce que sinon, je n'ose pas me lancer dans une langue étrangère, parce que j'ai peur de manquer de vocabulaire.

Philippe Chauveau

Dans cette époque où tout est dans l'urgence, où tout se passe entre texto et message très court sur Insta, est-ce que vous n'avez pas l'impression d'être un peu décalé, justement en revendiquant la richesse du mot, de la langue française dans toute sa complexité ?

Adrien Borne

Je ne suis pas décalé, je suis convaincu, et je vous raconte une toute petite anecdote et vous allez comprendre très vite. J'étais dans un lycée et je montrais un smiley, vous savez, ce visage jaune qui fait un bisou avec un cœur, vous voyez ? Et je disais à un élève « Mais ça, toi, tu l'utilises ? » à un jeune homme et il me dit « Ouais, je l'utilise même pour parler à mon meilleur ami. Je lui envoie ça » et je lui dis « Mais si ça tu devais le traduire à ton meilleur ami en mots, tu lui dirais quoi en mots ? » Et là, il a un temps d'arrêt et il me répond. « Je lui dirais que je tiens à lui ». Ils se sont mis tous les deux à rougir. Mais vous voyez, là, je me suis dis voilà exactement ce que nous offre la langue, cet espace de nuances, de profondeur, de sincérité que jamais on retrouvera dans un petit visage jaune avec un cœur, et ce qui apparaît comme un je ne sais quoi.

Philippe Chauveau

Donc on va suivre votre parcours. Ça s'appelle La vie qui commence, c'est votre actualité,

Adrien BOrne, vous êtes publié aux éditions Lattès.

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